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En quoi le récit du Guépard de Lampedusa est-il un récit réaliste ?

Publié le 15/09/2011

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Malgré la forte présence de l’Histoire dans le roman, on ne peut réduire le Guépard à un roman historique, car il n’en est pas une description exacte : dans ce roman, l’Histoire de l’Italie représente le support : Il ne s’agit pas d’observer l’Histoire qui met en place un changement capital, mais plutôt d’analyser les conséquences que ce changement produit. Le succès du roman est dû à son thème principal : L’histoire d’un homme en crise qui traverse des états d’âmes complexes, témoin d’un monde qui change sans parvenir à s’y adapter.

« page 12 à la suite de l’anecdote précédente, et lucide : Il est impuissant face aux temps qui changent, et il le sait :On peut noter la page 249, lors de sa discussion avec le colonel Pallavicino à propos de la situation politique del’Italie qu’il « sent son cœur se serrer ».

Lampedusa a créé ce personnage réaliste par la complexité de sapersonnalité : il n’est pas caractérisé par un trait de caractère principal, mais par plusieurs.

De plus, comme toutêtre humain ; il a des passions et des peurs, et il est lui aussi parfois guidé par ses sentiments plutôt que sa raison,citons pour ne citer qu’un exemple dans la sixième partie, à la page 242, sa danse avec Angelica, pour qui il éprouveune légère attirance, en dépit du fait qu’elle soit la femme de Tancredi.

Le but d’un personnage réaliste, tout commele prince Fabrizio dans le Guépard, n’est pas la gloire ou l’argent : leur motivation élémentaire est un bonheur simple,une vie tranquille, un travail acceptable.

Ainsi le lecteur ne le ressent pas comme un idéal ou un modèle à suivre,mais le sent proche de lui-même, et c’est ici l’enjeu du réalisme : permettre l’identification du lecteur auxpersonnages, par la mise en valeur du réalisme des personnages.

L’auteur tend à réduire au maximum la distanceentre ses personnages et ses lecteurs, pour permettre l’identification aux personnages.Pour confirmer l’illusion du réel, l’auteur ira même jusqu’à insérer des personnages ayant déjà existé, tels que le pèrePirrone.

On peut aussi noter la présence de personnages historiques, comme le petit roi François, dont on parle à lapage 16, et du colonel Pallavicino à la sixième partie qui permettent d’ajouter à la vraisemblance de l’intrigue, afind’accentuer le réalisme de l’œuvre. Les personnages sont aussi présents pour rappeler les classes sociales, thème récurrent du roman réaliste.

Ainsi leprince et sa famille représente l’aristocratie, tandis qu’Angelica et Don Calogero représentent la bourgeoisiemontante : Ils sont issus d’une famille pauvre, et don Calogero apparaît comme vulgaire, grossier, inculte, incapablede se vêtir correctement, mais il est doué et fin pour les affaires.

Le prince reconnaitra à la page 113 qu’il ‘d’uneintelligence rare’.

Angelica, qui est jeune, chaleureuse, sensuelle, incarne la transition de l’aristocratie décadente àla bourgeoisie montante par son mariage avec Tancredi.Ainsi, si l’on a vu plus haut que le contexte spatio-temporel, et donc le cadre du roman, répondait aux exigences dumouvement réaliste, on retrouve ici une intrigue et des personnages empreints eux aussi de ce mouvement, parleurs personnalités complexes et très détaillées et par leur promiscuité avec le lecteur : Ils ne sont pas parfaits, ilsne sont pas des héros, mais des personnes ordinaires, avec des qualités, des défauts, et des sentiments. Le fond du roman est donc à tout point de vue, réaliste, que ce soit au niveau du cadre du roman, des personnagesou de l’intrigue : tout contribue à donner l’illusion du réel.

Qu’en est il dès lors de la forme ? Lampedusa parvient àlier tous ces éléments pour n’en former qu’un.

Les caractéristiques écrites du réalisme sont les suivantes : l’auteurréaliste insère à son œuvre des détails réels, qui peuvent être sordides ou familiers, évoque des lieux ou despériodes de l’Histoire ayant existé, ou bien des citations d’hommes existant ou ayant existé.

On peut aussi noterl’introduction in media res dans le récit : le lecteur arrive au beau milieu d’une scène, sans savoir à quoi s’attendre,qui est très fréquente chez les auteurs réalistes.

Au niveau de la langue parlée, il insérera des fautes courantes, desexpressions populaires, voir même de l’argot : on peut observer le franc parler de don Ciccio dans la troisième partiedu Guépard.Cependant, Lampedusa au contraire de d’autres écrivains n’utilise pas toutes ces cartes : certes, pour en revenir àdon Ciccio, sa façon de s’exprimer est populaire, cependant on ne retrouve pas dans l’œuvre d’expressions tropfamilières, voir argotiques, comme on pourrait par exemple le noter dans l’Assommoir de Zola.

Ainsi le réalisme deLampedusa est un réalisme qui a évolué par rapport à celui de Zola, pour reprendre l’exemple précédent : Zola étaitun observateur : Il accumulait des renseignements sur les différents milieux sociaux, les conditions de vie et del’environnement et sur le rôle qu’y joue l’hérédité : Gervaise dans l’assommoir est condamnée dès le début du romanà une vie misérable.

Elle est moins la marionnette d’un créateur que le jouet d’un système et d’une méthode.

Zolaprend du recul et se situe en dehors de l’intrigue, bien qu’il la narre dans les moindres détails : On se souvient tousdes descriptions interminables de Zola, comme par exemple, pour n’en prendre qu’un, celle de l’immeuble à la page53 de l’assommoir.

Lampedusa axe plutôt sa réflexion sur les réalités psychologiques et les visions du futur.

Demême, il prend moins de distance que Zola par rapport à l’intrigue, on le sent à l’intérieur de la villa Salina, et plusproche de ses personnages.Ainsi, si Lampedusa utilise les techniques réalistes, et si roman lui-même appartient au mouvement réaliste, on peutconstater en le comparant avec d’autres auteurs que son réalisme est plus évolué et axé sur d’autres pistes deréflexions, bien que les bases, au niveau des formes d’écriture, de la construction des personnages et de la façondont il implante le cadre spatio-temporel, soient les mêmes.

Le réalisme de Lampedusa pourrait être aussi bienqualifié de ‘Néoréalisme’, par sa singularité et son évolution. En conclusion, le Guépard de Lampedusa semble être un observateur assez critique de la réalité de l’aristocratiedécadente des années 1860 aux années 1910 et peut être classé sans difficultés dans les romans réalistes, grâce àun contexte spatio-temporel détaillé et vraisemblable qui permet l’adhésion du lecteur, mais aussi grâce à l’intrigueet aux personnages qui suivent les caractéristiques de l’esthétique réaliste.

Il est cependant intéressant deremarquer que le Guépard de Lampedusa est empreint d’un réalisme qui a évolué et s’est détaché du réalismeauxquels Zola et Flaubert nous avaient habitués. »

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