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Être et paraître dans La vie est un songe, de Calderon

Publié le 05/08/2014

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calderon

Être et paraître

L'idée selon laquelle le monde n'est qu'un théâtre est un topos littéraire

et philosophique répandu à l'époque de Calderon. Le thème n'a donc rien

d'original. Ce qui lest plus, c'est la manière dont le dramaturge refuse de

trancher, mettant en question les certitudes du spectateur, sa foi naïve

dans la réalité du monde où il vit.

1 - UN MONDE AMBIGU

Un monde bien réel

Au commencement, la pièce pose deux réalités bien séparées : celle de la tour,

celle du Palais. Dans l'une, Sigismond éprouve une souffrance bien réelle et se

révolte devant la condition qui lui est faite; dans l'autre, Basyle prépare sa succession.

Au vu de cette première journée tout semble donc net, tranché.

calderon

« E X P 0 S É S F C H E S À la fin de la deuxième journée, la distinction entre l'être et le paraître semble définitivement compromise:« Qu'est ce que la vie? Un délire.

Qu'est-ce donc que la vie? Une illusion,/ une ombre, une fiction.

» (v.

2175-2176) «Car toute la vie n'est qu'un songe» (v.

2187) Qu'est-ce qui est vrai? La vie palatine ou la détention dans la tour? Est-ce le passé ou le présent qui est un rêve ? Motif récurrent, le réveil, au lieu de marquer une rupture entre le sommeil et la vie éveillée, est devenu le moment de la plus grande illusion.

Calderon retrouve ici une réflexion présente chez Pascal qui, dans ses Pensées, écrit : « Si nous rêvions toutes les nuits la même chose, elle nous affecterait autant que les objets que nous voyons tous les jours.

» (240, Brunschvicg).

Ill -SIGNIFICATIONS La prison des apparences La situation de Sigismond renvoie à la condition humaine : l'homme est le cap­ tif des apparences sur un double plan, ontologique et social.

Sigismond n'en croit pas ses yeux lorsqu'il s'éveille au Palais, et son tort est de croire dans la comédie qui lui est faite.

Basyle a cru voir dans les signes et s'est trompé.

C'est que l'homme est doublement limité : dans ses sens comme dans son savoir.

À ce caractère labyrinthique du réel se superpose la comédie sociale : mise en scène de Basyle, déguisements, conventions du langage de la cour.

La cour est un théâtre où chacun cherche à paraître ce qu'il n'est pas.

La trajectoire d'une libération L'expérience menée par le roi sur son fils, pour cruelle qu'elle soit, est libéra­ trice.

Elle est pour Sigismond l'occasion d'un retour sur soi, d'une méditation sur l'instabilité des choses et le peu de consistance des apparences.

C'est le mo­ ment du desengaiio*, désabusement ou désillusion, centre du théâtre caldero­ nien.

Moment où le héros, au terme d'une épreuve douloureuse, accède à une forme de lucidité sur lui-même et sur le monde.

Et le héros de se doter d'une morale par provision qui lui permet de continuer à vivre et de ne pas sombrer dans un nihilisme paralysant : «Rêvons, ô mon âme, rêvons de nouveau ; /mais en prenant bien soin de ne point oublier /qu'il faudra un jour nous réveiller/ au beau milieu de ce rêve doré» (v.

2359 à 2361).

Le paradoxe du théâtre Paradoxalement, c'est donc le théâtre, lieu d'illusion par excellence, qui sert de cadre à cette révélation.

Le spectateur voit projetée sur la scène sa propre soumis­ sion au paraître.

Sigismond est son double mis à distance.

Théâtre qui ne se pro­ pose pas seulement de divertir mais de convertir.

Conclusion : Au moment où Calderon écrit, Descartes met en doute la réa­ lité du monde, imagine un malin génie tirant les ficelles des apparences : singulière convergence révélatrice des interrogations d'une époque.

Mais, alors que Descartes congédie son dieu malicieux et restaure la certi­ tude du cogito, La vie est un songe, bien plus moderne en cela, aban­ donne ses personnages à un monde incertain et équivoque.

li 671. »

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