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Explication linéaire : « L'Aveugle », Sonnets de Charles Péguy.

Publié le 28/11/2011

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( Le vers 5, outre l’anaphore de l’adjectif « Innombrables «, comporte une expression sylleptique : « des ténèbres premières «.  ( En construisant le champ sémantique du substantif « ténèbres «, il est possible de rendre compte de l’équivocité de cette expression :  1 - Absence de lumière (donc cécité).  2- Absence de lumière avant la formation de l’univers.  3- Obscurantisme (absence de connaissance).  4- L’Enfer.  Ici, l’adjectif qualificatif « premières « (au sens d’originel) nous indique qu’il s’agit des ténèbres qui ont précédé la formation de l’univers ; mais le sens reste ouvert.  L’intégralité du vers 5 fonctionne comme une métaphore de la « cécité « qui plonge les aveugles dans les ténèbres, ténèbres semblables à la nuit des temps.   

« « (…) soient Césars de tout ce qui se fait ».Certes, l'antonomase « Césars » suggère la précellence des « autres » pour connaître « tout ce qui se fait » ; mais ilest impossible de savoir qui sont les autres et la nature de ce qui se fait (en règle générale comme l'indique l'emploidu présent gnomique).( Le vers 11 s'inscrit dans le prolongement du champ lexical de « la vue ».Cf.

« témoins » (celui qui voit) et « paraître ».A la parataxe des quatrains, répond désormais l'hypotaxe.( Mais le vers 11 met également en place le champ lexical du savoir (« connaître »).( Ici, ce sont les hommes qui voient (« témoins » et « greffiers ») et qui connaissent ; mais le dernier tercet montrequ'ils ne sont pas les seuls à posséder un savoir sur ce les entoure.

D'où une possible distinction entre deux typesde savoirs.( Le champ lexical du savoir se poursuit au vers 12.( Il y a même un effet d'insistance avec la dérivation « savants »/« se sait ».Le vers 12 est construit sur le même modèle que le vers 10 : il y a un parallélisme de construction et les deux verssemblent aller de pair, se faire écho.( Au vers 13, « l'aveugle » est enfin mentionné.( La présence de l'article défini « le » ne doit pas induire en erreur.Certes, le substantif est particularisé ; mais le défini à ici une valeur généralisante.« L'aveugle », ce sont tous les aveugles.( Dans le même vers, l'emploi du futur est remarquable (Cf.

« sera »).( En effet, il y a non seulement introduction d'une temporalité au sein du poème, mais encore assurance quel'aveugle ne sera jamais égalé dans son savoir.

Cette interprétation est d'ailleurs corroborée par l'emploi duconnecteur temporel toujours.( Le vers 14 fonctionne comme une « pointe » conclusive (typique du sonnet).( Il est enfin possible de comprendre quel est le savoir de l'aveugle :Il est le maître « Sous tout ce qui se dit, de tout ce qui se tait ».L'explication est encore différée puisque le dernier segment du vers - après la coupe à l'hémistiche - constitue uneffet d'hyperbate.

Mais il est ensuite possible de saisir que l'aveugle a une connaissance sensible et intuitive qui faitsouvent défaut aux hommes ordinaires.

Il aurait développé ce don à cause de sa cécité. Si les deux premières strophes de « L'Aveugle » semblent déplorer la condition pathétique de ces êtres, les deuxtercets montrent que ce sont des personnes d'exception, capables d'aller au plus profond des choses.

Leurconnaissance l'emporte ici sur celle du commun des mortels puisqu'ils parviennent à saisir le non-dit, ou encorel'essence des choses.

Charles Péguy renouvelle donc bien le thème tout en conservant une forme poétiquetraditionnelle : celle du sonnet.

« L'Aveugle » pourrait être envisagé comme une réponse aux « Aveugles » deBaudelaire dans Les Fleurs du Mal.

Le poète, après avoir évoqué le ridicule de ces êtres, concluait de la manièresuivante : « Je dis : Que cherchent-ils au Ciel, tous ces aveugles ? ».. »

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