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Extrait du chapitre I [Thunder-ten-tronckh]

Publié le 22/05/2015

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Extrait du chapitre I

[Thunder-ten-tronckh]l

11 y avait en Westphalie, dans le château de monsieur le baron de Thunder-ten-tronckh, un jeune homme à qui la nature avait donné les moeurs les plus douces. Sa physionomie annonçait son âme. Il avait le

5 jugement assez droit, avec l'esprit le plus simple ; c'est, je crois, pour cette raison qu'on le nommait Candide. Les anciens domestiques de la maison soupçonnaient qu'il était le fils de la soeur de mon¬sieur le baron, et d'un bon et honnête gentilhomme

10 du voisinage, que cette demoiselle ne voulut jamais épouser, parce qu'il n'avait pu prouver que soixante et onze quartiers, et que le reste de son arbre généalogique avait été perdu par l'injure du temps.

Monsieur le baron était un des plus puissants

15 seigneurs de la Westphalie, car son château avait une porte et des fenêtres. Sa grande salle même était ornée d'une tapisserie. Tous les chiens de ses basses-cours composaient une meute dans le besoin; ses palefreniers étaient ses piqueurs; le

20 vicaire du village était son grand aumônier. Ils l'appelaient tous Monseigneur, et ils riaient quand il faisait des contes.

Madame la baronne, qui pesait environ trois cent cinquante livres, s'attirait par là une très grande

25 considération, et faisait les honneurs de la maison avec une dignité qui la rendait encore plus respec-table. Sa fille Cunégonde, âgée de dix-sept ans, était haute en couleur, fraîche, grasse, appétissante. Le fils du baron paraissait en tout digne de son père. Le

30 précepteur Pangloss était l'oracle de la maison, et le petit Candide écoutait ses leçons avec toute la bonne foi de son âge et de son caractère.

1. Ces intertitres entre crochets, sauf au chapitre 4, ne sont pas de Voltaire; ils donnent l'idée d'ensemble du texte.

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Pangloss enseignait la métaphysico-théologo-cos-molonigologie. Il prouvait admirablement qu'il n'y a

35 point d'effet sans cause, et que, dans ce meilleur des mondes possibles, le château de monseigneur le baron était le plus beau des châteaux, et madame la meilleure des baronnes possibles.

·    Les noms propres

Les noms propres sont pour Voltaire une occasion de donner libre cours à sa fantaisie verbale. Ce sont en général des noms-portraits, dont l'étymologie ou les sonorités annoncent le caractère du contenu.

Thunder-ten-tronckh, par ses lourdes allitérations en «t«, tourne en dérision la lignée du baron; l'étymologie de Thunder — qui veut dire en anglais «tonnerre« —ridiculise ironiquement ses prétentions.

Pangloss est un nom composé du mot grec pan (tout) et glossa (langue). Pangloss en effet parle toujours et cherche à tout justifier par le discours.

Candide s'appelle du nom même de sa principale caractéristique : il aborde le monde avec innocence et crédulité. Pour le moment, il est toujours décrit dans une attitude passive : «On le nommait Candide« (1. 6-7); «le petit Candide écoutait« (1. 31). Cette candeur implique cependant aussi l'idée de pureté : le jeune homme a «le jugement assez droit« (1. 4-5). La confrontation de cet esprit honnête et juste avec un monde livré à l'omnipré­sence du mal permettra à Voltaire de mener à bien son entreprise critique.

 

Quant à Cunégonde, «haute en couleur, fraîche, grasse, appétissante« (1. 28), elle apparaît d'emblée comme une jeune fille au tempérament sensuel. La suite du conte ne fera que confirmer ce trait.

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