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Flaubert: un livre sur rien

Publié le 12/09/2015

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Ce qui me semble beau, ce que je voudrais faire, c’est un livre sur rien, un livre sans atttache extérieure, qui se tiendrait de lui-même par la force interne de son style, comme la terre sans être soutenue se tient en l’air, un livre qui n’aurait presque pas de sujet ou du moins où le sujet serait presque invisible, si cela se peut. Les œuvres les plus belles sont celles où il y a le moins de matière ; plus l’expression se rapproche de la pensée, plus le mot colle dessus et disparaît, plus c’est beau. Je crois que l’avenir de l’Art est dans ces voies. Je le vois, à mesure qu’il grandit, s’éthérisant tant qu’il peut, depuis les pylônes égyptiens jusqu’aux lancettes gothiques, et depuis les poèmes de vingt mille vers des Indiens jusqu’aux jets de Byron. La forme, en devenant habile, s’atténue; elle quitte toute liturgie, toute règle, toute mesure; elle abandonne l’épique pour le roman, le vers pour la prose ; elle ne se connaît plus d’orthodoxie et est libre comme chaque volonté qui la produit. Cet affranchissement de la matérialité se retrouve en tout et les gouvernements l’ont suivi, depuis les despotismes orientaux jusqu’aux socialismes futurs.

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« des Indiens jusqu'aux jets de Byron.

La forme, en devenant habile, s'atténue; elle quitte toute liturgie, toute règle, toute mesure; elle abandonne l'épique pour le roman, le vers pour la prose ; elle ne se connaît plus d'orthodoxie et est libre comme chaque volonté qui la produit.

Cet affranchissement de la matérialité se retrouve en tout et les gouvernements l'ont suivi, depuis les despotismes orientaux jusqu'aux socialis­ mes futurs.

» ...,..

Flaubert, dans ces quelques lignes, expose comme une loi scientifique qui rendrait compte aussi bien de l'évolution de la littérature que de celle de l'architec­ ture ou des systèmes politiques : l'« affranchissement de la matérialité)), telle serait la loi du devenir.

La principale de ces considérations est cependant celle qui relève de l'esthétique romanesque.

Flaubert dessine brièvement le projet d'un livre parfait: «un livre sur rien» c'est-à-dire un livre qui tirerait toute sa valeur non pas de l'histoire qu'il raconte -puisque celle-ci aurait pratiquement disparu- mais du style même par lequel cette absence d'histoire serait racontée.

Il s'en explique encore dans la suite de sa lettre: «C'est pour cela qu'il n'y a ni beaux ni vilains sujets et qu'on pourrait presque établir comme axiome, en se posant au point de vue de 1 'Art pur, qu'il n'y en a aucun, le style étant à lui tout seul une manière absolue de voir les choses.

» Cette esthétique romanesque du vide ne peut être véri­ tablement comprise que si on rappelle à quel instant crucial de son itinéraire littéraire Flaubert se trouve au moment où il énonce ces principes.

Le romancier vient de s'engager depuis peu dans la rédaction de ce qui sera son premier ouvrage publié : Madame Bovary.

Depuis toujours il se consacre à l'écriture mais il lui a fallu reconnaître l'échec de ses. »

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