Devoir de Philosophie

Giraudoux, "Electre", Acte I scène 1

Publié le 17/01/2022

Extrait du document

giraudoux
La première scène garde chez Giraudoux sa fonction traditionnelle d'exposition, mais la présentation est partielle : comme le palais d'Agamemnon, l'action conserve une part de mystère et d'anonymat, malgré les indications didascaliques identifiant l'étranger comme Oreste et les petites filles comme les Euménides. Le décalage est constant entre l'intemporalité mythologique et l'impression de familiarité quotidienne qui se dégage des propos et de la situation. Dans cette perspective, la mosaïque évoquée par Oreste dans ses souvenirs d'enfance est un élément doublement symbolique: elle reflète le morcellement mortel de la famille et le puzzle de l'histoire à reconstituer.
giraudoux

« À chaque partie de l'édifice, véritable monument funèbre, correspondent un souvenir et un forfait, la descriptiondevient progressivement une exploration du passé.

Chaque personnage va accrocher à ce palais son évocation dupassé, dans un récit dont les contenus et les tons diffèrent : à l'évocation nostalgique d'Oreste succèdent le récitdémythifié et troublant des Euménides (les petites filles) et la version officielle du jardinier, porte-parole du peuple. Une confession indirecte.

Relayant les Euménides qui répondent à sa place à la question du jardinier ( « Vous avez déjà visité le palais? ») et le poussent insidieusement à dévoiler son identité, Oreste évoque sur le mode lyrique, avec des récurrences poétiques, des images de son enfance, des souvenirs propres à révéler qui il est, même s'ilgarde l'anonymat. Les indices sont livrés par les autres protagonistes : les repères temporels ( « Tout enfant», « Il y a vingt ans», « Il ne marchait pas encore...

») ; les noms et les liens familiaux («Parce que c'est l'ancienne chambre du petit Oreste, son frère, que sa mère envoya hors du pays quand il avait deux ans, et dont on n'a plus de nouvelles.

»). Ainsi la vérité du personnage est-elle partiellement reconstituée, du moins devinée à travers ses bribes deconversation et c'est finalement sa propre histoire qu'Oreste nous livre et qu'il entend lui-même : «Écoutez, écoutez, mes soeurs! On parle du petit Oreste ! » Un récit démythifié.

La tragédie est ici ramenée à une dimension humaine, par un jeu de va-et-vient entre un passé terrible et figé (que rend le passé simple « la chambre où Atrée, le premier roi d'Argos tua les fils de son frère»), un présent ( «Elle habite toujours le palais, Électre ? ») et un passé composé qui donne une impression de proximité temporelle et de familiarité ( »Il les a coupés, ou fait cuire entiers?»). L'humour noir est fondé sur les détails prosaïques et horribles (voilette de Cassandre assassinée) et les allusions à lacuisine ( «repas», « goût », «fait cuire entiers») qui a suivi le massacre familial.

À cela s'ajoute une curiosité morbide ( «Je voudrais bien savoir quel goût ils avaient», «J'aurais bien voulu voir») symbolisée par les nombreuses fenêtres du palais et accentuée par le laconisme des phrases juxtaposées.

Mais tous ces détails correspondent àl'esthétique de la digression et du contraste qui, selon Giraudoux, met en valeur la vérité concentrée dans quelquesphrases lapidaires comme «Il prit son bain après sa mort.

À deux minutes près.

Voilà la différence.

» La version officielle des faits.

En contrepoint à cette démythification de la tragédie, le jardinier représente la voix convenue.

Giraudoux joue sur la complicité avec le spectateur, qui en sait plus que le jardinier.

En effet, ce dernierapparaît comme un personnage naïf, aveugle ou qui ne veut pas voir la vérité, car il veut à tout prix préserver lapaix de la cité et des esprits, dans un constant souci de rationalité («Étranger, ne cherchez aucune relation entre les fenêtres et les fleurs.

») et de solidarité avec ses concitoyens ( « notre roi », « on n'a plus de nouvelles»). Dans ses longues phrases solennelles, il livre les informations essentielles qui sont la version officielle des faits : «La fenêtre avec les roses, étrange); est celle de la piscine où notre roi Agamemnon, le père d'Électre glissa, revenantde la guerre, et se tua, tombant sur son épée.

[...] c'est l'ancienne chambre du petit Oreste, son frère, que samère envoya hors du pays quand il avait deux ans, et dont on n'a plus de nouvelles.

» Cependant, il reste du mauvais côté de la fenêtre. (CONCLUSION) La première scène garde chez Giraudoux sa fonction traditionnelle d'exposition, mais la présentation est partielle :comme le palais d'Agamemnon, l'action conserve une part de mystère et d'anonymat, malgré les indicationsdidascaliques identifiant l'étranger comme Oreste et les petites filles comme les Euménides.

Le décalage estconstant entre l'intemporalité mythologique et l'impression de familiarité quotidienne qui se dégage des propos et dela situation.

Dans cette perspective, la mosaïque évoquée par Oreste dans ses souvenirs d'enfance est un élémentdoublement symbolique: elle reflète le morcellement mortel de la famille et le puzzle de l'histoire à reconstituer.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles