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L' énonciation dans Une partie de Campagne (Maupassant et Renoir)

Publié le 05/12/2019

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maupassant

la diégèse*, et qui, par conséquent, est à mettre au compte de l'énonciation* (effet de discours). De ce strict point de vue, la présence de Renoir reste fort discrète : pas de cadrage* ni d'angle de prise de vue insolites, pas d'effets spéciaux. Tout semble aller de soi, sans rien devoir à un quelconque narrateur.

 

• Quelques interventions directes

 

Quelques infractions, pourtant, à cette neutralité conventionnelle et relative : tout d'abord, les deux cartons*, intervention directe du narrateur auprès du spectateur, mais qui, tout en dénonçant l'illusion, aide, par sa fonction informative, le spectateur à y adhérer. Les ouvertures en fondu* et les fondus au noir*, ensuite, qui, soulignant la structure, jouent ici un rôle essentiellement narratif (ouverture et clôture d'une séquence*). D'où la faiblesse de leur valeur énonciative. En revanche, le fondu enchaîné* qui succède au gros plan* du baiser des deux amants, moins conventionnel, acquiert une valeur énonciative plus forte : il s'agit d'une figure de style (ellipse*) dictée par une esthétique de la pudeur et de la sobriété. Le plan* en plongée* sur Henri et Henriette en yole, non justifié par la diégèse (aucun personnage ne regarde en surplomb les deux amants), trahit de même la présence du narrateur. Enfin, précédant le dernier carton, le travelling* arrière long et rapide sur la rivière ne peut être, lui non plus, attribué à aucun personnage, à aucune situation diégétique. N'étant pas « naturalisé », il ne peut être perçu que comme un effet de discours (le narrateur veut nous « dire » quelque chose, d'ordre symbolique : « ça se gâte »), probablement le plus marqué de tout le film.

Maupassant

 

Dans un récit littéraire, le narrateur a le choix entre prendre en charge la relation des événements - le récit pur - ou déléguer son pouvoir aux personnages, leur laissant la parole - le dialogue, qui semble mimer le réel.

 

Le récit pur permet au narrateur d'intervenir plus facilement et de rendre plus perceptible sa présence : choix du lexique, figures de style, rythme du récit et de la phrase, effets de sympathie ou d'ironie envers les personnages ... La nette prédominance du récit sur les dialogues, dans Une partie de campagne, réduit sensiblement le parti pris d'objectivité naturaliste du narrateur : le récit est le lieu de son intervention masquée.

 

Les dialogues, derrière lesquels le narrateur s'efface totalement (ou, du moins, le feint), sont fort rares. Ils en acquièrent une signification accrue, mettant en évidence telle ou telle caractéristique d'un personnage, son parler, sa naïveté, sa vulgarité, son émotion (voir le chapitre sur les dialogues, p. 82). Mais, toujours, ils ont la vertu de dynamiser le récit, par les effets de scénification qu'ils engendrent. Le texte se convertit alors, le temps d'un dialogue, ou d'un simple énoncé en discours direct en « scène » qui actualise soudain les personnages : (( Assise sur l'autre balançoire, Mme Dufour gémissait d'une façon monotone et continue : - « Cyprien, viens me pousser ; viens donc me pousser, Cyprien 1 >>

 

Le narrateur fait en outre usage du discours indirect : « ... et elle se trémoussait continuellement sous prétexte que des fourmis lui étaient entrées quelque part. >> ; cette technique lui permet, sans rompre la fluidité de l'énoncé, d'utiliser le langage même du personnage et les effets d'ironie qui lui sont liés. Il a également recours - très discrètement - au discours indirect libre1, figure de

maupassant

« Il s'agi t donc d'une narra tion * qui dissi mule sa sub jecti­ vité, ce dont témoigne, à cer tains momen ts d'élar gisse­ ment de la perspective, l'emploi du « on » indéfini : « On aper ceva it en core la che velur e jaune d'un garçon qui ...

». »

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