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LA BRUYÈRE. PORTRAIT DE GITON

Publié le 04/12/2010

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Giton a le teint frais, le visage plein et les joues pendantes, l'oeil fixe et assuré, les épaules larges, l'estomac haut, la démarche ferme et délibérée. Il parle avec confiance;il fait répéter celui qui l'entretient, et il ne goute que médiocrement tout ce qui lui dit. Il déploie un ample mouchoir et se mouche avec un grand bruit;il crache fort loin, et il éternue fort haut. Il dort le jour, il dort la nuit, et profondément; il ronfle en compagnie. Il occupe à table et à la promenade plus de place qu'un autre. Il tient le milieu en se promenant avec ses égaux; il s’arrête, et l’on s’arrête ; il continu de marcher, et l’on marche : tous se règlent sur lui. Il interrompt, il redresse ceux qui ont la parole :on ne l’interrompt pas, on l’écoute aussi longtemps qu’il veut parler ;on est de son avis, on croit les nouvelles qu’il débite.S’il s’assied, vous le voyez s’enfoncer dans un fauteuil, croiser les jambes l’une sur l’autre, froncer le sourcil, abaisser son chapeau sur ses yeux pour ne voir personne, ou le relever ensuite, et découvrir son front par fierté et par audace. Il est enjoué, grand rieur, impatient, présomptueux, colère, libertin, politique, mystérieux sur les affaires du temps ; il se croit des talents et de l’esprit. Il est riche.

Dans le chapitre « Des biens de Fortune «, La Bruyère insère un double portrait, du riche et du pauvre, dont nous étudierons ici le premier volet : Giton, le riche. Portrait d'un type social; le caractère de Giton ne lui est pas particulier, il est celui de toute une classe, cette bourgeoisie enrichie qui, au XVIIe siècle, prend le pouvoir réel que La Bruyère, dans le chapitre « Des grands « montre, se « plaçant, s'élevant «, évinçant les nobles. Voyons comment l'auteur parvient à peindre, non pas un individu, mais un personnage-type, défini par sa situation sociale.

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