La fin très morale de Jean de La Fontaine
Publié le 30/08/2013
Extrait du document
Une âme sincère
et candide
La Fontaine ne se laisse pas si facilement convaincre. Il ne comprend pas pourquoi il de¬vrait renier une oeuvre qu'il considère plus comme une sa¬tire que comme une apologie de la luxure. Mais son état de santé se dégrade, et en janvier il est très éprouvé par la mort édifiante de madame de La Sablière. Si bien que le 12 fé¬vrier, il exprime publiquement ses regrets d'avoir offensé la morale et les lois divines de¬vant une délégation de l'Aca¬démie française, dont il est membre depuis 1684. Cette déclaration solennelle lui vaut de recevoir le saint viatique, ainsi que cinquante louis d'or, versés par le duc de Bour¬gogne, petit-fils de Louis XIV, pour compenser les bénéfices du livre, auxquels il a renoncé. Mais cette aide financière ne lui évite pas la nécessité de trou¬ver de nouveaux protecteurs. Monsieur d'Hervart, riche maî¬tre des requêtes, et sa femme adoucissent les derniers jours du grand fabuliste,
«
de Vaux-le-Vicomte, près de
Melun .
En 1661, la disgrâce et
la chute du surintendant le
font retomber dans l'ombre,
jusqu'à ce qu'il revienne sur le
devant de la scène littéraire à
partir de 1664 et connaisse un
immense succès avec la publi
cation de ses premières Fables,
en mars 1668 .
En vieillissant Jean de La Fon
taine est de plus en plus sujet
à des crises de rhumatismes
aiguës.
Et ces défaillances
physiques provoquent d'au
tres crises, spirituelles celles
là.
Pendant le glacial hiver de
1692, le poète tombe grave
ment malade.
Sa protectrice,
Marguerite
de La Sablière, chez
qui il loge rue Saint-Honoré, a
récemment pris le chemin du
repentir et fait appel pour lui
« JE VAIS DE FLEUR
EN FLEUR»
En 1669, dans son roman
des Amours de Psyché et de
Cupidon, Jean de La Fontaine
fait dire au personnage de Polyphile, qui « aimait
toutes choses » : « J'aime le
jeu, l'amour, les livres, la musique , / La ville et la
campagne, enfin tout ; il n'est
rien / Oui ne me soit souverain
bien,/ Jusqu 'au sombre plaisir d 'un cœur mélancolique .
»
Un trait de caractère qui vaut autant pour l 'auteur que
pour sa créature.
Si ses Fables ont valu à La Fontaine de
passer à la postérité ,
elles
occultent le
foisonnement, la diversité et la
richesse du reste de son
œuvre .
li s'est essayé à toutes
les sortes
de poésies,
galante , avec Adonis , élégiaque
avec Clymène.
li a sacrifié avec
talent à tous les genres ,
chronique, satire, roman,
comédie,
drame , opéra,
ballet, farce.
Toujours avec
style
et sans pesanteur, car
« je suis chose légère,
écrit-il,
et vole à tout sujet,
je vais de fleur en fleur et
d'objet en objet ».
au curé de la paroisse voisine
de Saint-Roch .
Entre François
Aimé Pouget, jeune vicaire sé
vère, et le vieil écrivain qu'il
est chargé de ramener à la reli
gion, le dialogue s'instaure.
Les accents
mystiques du prê
tre font leur chemin dans l'es
prit torturé du poète .
La Fon
taine n'est pas le débauché
que le religieux redoutait de
rencontrer, mais « un homme
fort ingénieux et fort simple,
avec beaucoup d'esprit ».
Sou
mis à la confession et à la
pénitence, La Fontaine doit
payer le prix du pardon : s'il
veut mourir au sein de l'Église,
il
doit renier publiquement
son ceuvre jugée la plus scan
daleuse, les contes licencieux
publiés en 1664 .
Une âme sincère
et candide
La Fontaine ne se laisse pas si
facilement convaincre .
li ne
comprend pas pourquoi il de
vrait renier une ceuvre qu'il
considère plus comme une sa
tire que comme une apologie
de la luxure .
Mais son état de
santé se dégrade, et en janvier
il est très éprouvé par la mort
édifiante de madame de La
Sablière.
Si bien que le 12 fé
vrier, il exprime publiquement
ses regrets d'avoir offensé la
morale
et les lois divines de
vant une délégation de l'Aca
démie française, dont il est
membre depuis 1684 .
Cette
déclaration solennelle lui vaut
de recevoir le saint viatique ,
ainsi
que cinquante louis d' or,
versés
par le duc de Bour
gogne, petit-fils de Louis XIV,
pour compenser les bénéfices
du livre, auxquels il a renoncé .
Mais cette aide financière ne lui
évite pas la nécessité de trou
ver de nouveaux protecteurs.
Monsieur d'Hervart, riche maî
tre des requêtes, et sa femme
adoucissent les derniers jours
du grand fabuliste , qu'ils re-
çoivent dans leur hôtel pari
sien et dans leur château de
Bois-le-Vicomte.
Auprès de ce
jeune couple affectueux, La
Fontaine continue à travailler ,
traduit des hymnes et des
psaumes, revient à ses Fables,
dont l'ultime Livre XII, dédié
au duc de Bourgogne, est pu
blié en septembre 1694 .
Quel
ques mois plus tard, le 13 avril
1695, le poète s'éteint, à l 'âge
de soixante-treize ans.
Dans
sa dernière lettre à son
ami François Maucroix,
datée
de février, il dit sa peur de
«comparaître devant Dieu ».
Mais le chanoine n'a aucune
crainte :
«C'était l'âme la plus
sincère et la plus candide que
j'aie jamais connue ; jamais de
déguisement, je ne sais s'il a
jamais
menti en sa vie », note
t-il dans ses Mém oires..
»
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