La littérature russe
Publié le 10/11/2018
Extrait du document
ENTRE GUERRE ET PAIX
Après des débuts tardifs, la littérature russe s'épanouit sous le règne de la Grande Catherine, au xviiie siècle, avant de connaître un élan irrésistible qui conduira au véritable âge d'or du roman russe, dans la seconde moitié du xixe siècle. Une grande effervescence poétique et théâtrale parcourt alors la Russie avant que la révolution d'octobre 1917 ne conduise au « réalisme soviétique». L'émergence de la dissidence et les réformes des années 1980 mettent à mal la ligne culturelle officielle. Une certaine forme de libéralisation est en marche lorsque l'URSS implose en 1991. Les auteurs autrefois interdits sont publiés. La Russie retrouve son passé. Les artistes cherchent de nouveaux repères, slavophiles, nationalistes ou autres. C'est la fin des certitudes et celui des mutations créatrices.
LA Russie de Kiev (988-1240)
• Aucun document n'atteste d'une littérature écrite russe avant le xi' siècle. Les premiers textes sont religieux et juridiques. Il existe en revanche une riche littérature orale véhiculée par les joueurs de gousli (instrument à cordes) et les saltimbanques.
• Deux œuvres émergent de cette période : la Chronique des temps passés (vers 1120) et une chanson de geste (poésie épique), le Dit de la campagne d'Igor (vers 1185).
«
LA
POÉSIE
• Aleksandr Blok (1880-1921)
est le plus célèbre des poètes
symbolistes (les Douze, 1917).
• Valeri Brioussov (1873-1924)
est un partisan de « l'art pur » influencé
par Baudelaire.
• Andreï Belyï (1880-1934) prophétise
l'éclatement du monde russe
dans la Colombe d'argent (1904).
LEs ANNÉES 1920
• Durant les années 1920,Ies artistes
cherchent à situer leur art par rapport
au nouveau pouvoir.
• Vladimir Maïakovski (1893-1930)
célèbre
d'abord
la
révolution
d'Octobre avant de
la tourner
en dérision
dans son théâtre
(la Punaise,
1928).
• Sergueï Essenine (1895-1925)
adopte la même attitude, tout
en exprimant un amour quasi religieux
pour la terre russe.
LES ANNÉES 1930
• À
partir
des années 1930, les auteurs
reçoivent pour mission de glorifier
le socialisme soviétique sous l'égide
de l'Union des écrivains de l'URSS
fondée en 1934.
C'est l'époque
du « héros positif» et de « l'avenir
radieux ».
le style doit être
« simple et uniforme ».
• Certains écrivains se plient
à la ligne imposée par le régime.
Leonid Leonov (1899-1994) devient
ainsi un spécialiste des romans sociaux
sur fond d'Industrialisation.
C'est
aussi le cas de Mikhai1 Cholokhov
(1905-
1984) qui
1940; Terres défrichées, 1932; prix
Nobel en 1965).
·D'autres
résistent
à leur
manière.
Mikhail
Boulgakov (1891-1940)
décrit la
guerre civile
dans
Garde
blanche (1925),
aborde la science-fiction dans
les Œufs fatidiques (1925), adopte
un ton satirique dans ses comédies
(l'Île pourpre, 1927-1928) et travaille
douze ans à un grand roman,
le Maitre et Marguerite (1928-1940)
qui ne sera publié qu'en 1966,
après sa mort.
Il répond au
totalitarisme par le fantastique
et l'imaginaire.
Ce n'est qu'après
la mort de Staline, en 1953, que
la portée de son œuvre apparaîtra.
• Boris Pasternak (1890-1960)
adhère
dans un
._,_....;..•u� ce
poète
et romancier.
Boris Pasternak publie
de nombreux recueils de poèmes
où il chante la nature et la solidarité
entre les hommes (Ma sœur la vie,
1922).
Il se dressera plus tard
contre le régime.
• D'autres écrivains émigrent.
C'est
le cas du grand nouvelliste, romancier
et poète Ivan Bounine (1870-1953,
prix Nobel en 1933) qui meurt à Paris
après avoir poursuivi son œuvre en
langue russe (le Village, 1910 ; l'Amour
de Mitia, 1933), alors que le romancier
Vladimir
Nabokov (1899-
1�
..
.
§1 1977 ),
qui se fera
naturaliser
américain.
adopte la
langue de
son pays
d'adoption
(Lolita, 1955; Ada ou l'Ardeur, 1969).
• Certains, notamment des poètes
soucieux de préserver« l'âme russe»,
1------------� qui refusent de réviser leurs valeurs,
LES GRANDS PERSONNAGES
DE LA LITTÉRATURE RUSSE
Boris Godounov (tragédie de
Pouchkine, 1825) est le type même
de l'usurpateur ; Tarass Boulba
(roman de Gogol, 1835), celui
du sauvage guerrier ; Eugène
Onéguine (roman en vers de
Pouchkine, 1830), celui du mondain
sans moralité ; Oblomov (roman
d'Ivan Gontcharov, 1858), celui
du paresseux; Raskolnlkov (Crime
et Châtiment de Dostoïevski, 1866),
celui de l'intellectuel immoral ;
Allllil Karénine (roman de Tolstoï,
1875-1877), celui de la passionnée ;
le docteur Jivago (roman de
Pasternak, 1957) celui de l'idéaliste.
le
payent de leur vie.
Ainsi Nikolaï
Stepanovitch Goumilev (1886-1921)
et Boris Kornilov (1907-1938)
sont fusillés, Ossip Mandelstam
(1891-1938) et Nikolaï Alekseïevitch
Kliouïev (1887-1937) meurent
dans les camps du goulag,
-....----,
Vladimir Maïakovski (1893-1930)
et Marillil Tsvetaïeva (1892-1941)
se donnent la mort.
LE
DÉGEL (1953 -1962 )
l'OUVERTURE POSTSTAUNIENNE
• l'article du critique Vladimir
Pomerancev, « De la sincérité en
littérature », qui paraît dans la revue
le Monde nouveau en 1953, année
de la mort de Staline, lance
le mouvement de contestation.
• Plusieurs œuvres profitent d'un
relâchement relatif de la censure,
comme le roman le Dégel (1954)
d' Ilia Ehrtnbourg (1891-1967)
ou la pièce
Invités
toutefois le contrôle du parti
communiste sur la production littéraire.
• les écrivains contestataires
s'enhardissent.
Ils refusent de faire
leur autocritique.
Publié à l'étranger
en 1957,
le roman
Dodeur
à son auteur, Boris Pasternak, d'être
exclu de l'Union des écrivains en 1958
après avoir reçu le prix Nobel qu'il
est contraint de décliner.
• l'écrivain devient un héros de la lutte
contre le stalinisme.
C'est la période
de la fuite des manuscrits vers
l'étranger, celle de la publication
en samizdat- publication clandestine
du très beau
Requiem (1935-1940} d'Anna
AJchmtdOVII
(1889-1966),
des poèmes
en prose
de Soljenitsyne
et des articles
de Siniavski.
• En 1962, Khrouchtchev autorise
la parution d'Une journée d'Ivan
Denissovitch de Soljenitsyne.
LE REFLUX (1964 -1991 )
Une fois refermée, en 1964,
la parenthèse « libérale » incarnée
par Nikita Khrouchtchev, la répression
s'abat de nouveau sur le monde littéraire.
En 1965, la police perquisitionne chez
Alexandre Soljenitsyne et confisque
ses manuscrits.
les procès d'écrivains
se multiplient.
le parti communiste
réaffirme avec force ses «valeurs ».
Mais la censure est contournée.
les néo-staliniens qui occupent le
pouvoir ne parviennent pas à éteindre
la flamme qui anime les écrivains.
la plupart des chefs-d'œuvre littéraires
de cette époque sont publiés
à l'étranger.
incarner
une dissidence
nostalgique
et slavophile,
écrit son témoignage dans Une journée
d'Ivan Denissavitch (1962).
Il exalte
l'esprit slave dans la Maison de
Matriona (1963) et dénonce l'oppression
du régime soviétique (le Premier
Cerde, 1955-1958 ; le Pavillon
des cancéreux, 1963-1966, publiés à
l'étranger).
Après l'Archipel du Goulag
(1974), il est expulsé d'URSS.
li obtient
le prix Nobel de littérature en 1970.
• De son côté, Andi'èï -Siniavski
(1925-1997), qui sera condamné
à sept ans de camp, ne voit le salut
de la Russie que dans l'Europe
(le Verglas, 1961 ).
Interné en hôpital
psychiatrique et expulsé en 1977,
le romancier Vladimir Boukovski
se tourne aussi vers l'Occident
au nom de la liberté et du progrès.
• Condamné à la déportation, Joseph
Brodsky (1940-1996) s'exile quant à lui
aux États-Unis en 1972.
Naturalisé
américain, il reçoit le prix Nobel
de littérature en 1987 pour son œuvre
poétique écrite en russe.
l'œuvre
de Nina Berberova (1901-1993),
qui s'exile en France en 1922 et gagne
les États-Unis en 1950, est consacrée
au sort des émigrés russes
(l'Acco mpagnatrice, 1934).
D'UNE RUSSIE
À l'AUTRE {1991-2002)
LA PERTE DES REPÈRES
• la disparition de l'URSS en 1991
s'assimile pour certains écrivains
à l'effondrement d'un monde.
Aucune
valeur ne semble plus offrir de repères
stables.
les jeunes écrivains doivent
inventer l'univers dans lequel ils vont
devoir vivre.
La littérature n'occupe plus
la première place, ni dans la glorification
du régime ni dans sa contestation.
La littérature officielle est morte avec
le régime communiste ; la littérature
dissidente n'a plus lieu d'être.
lE RENOUVEAU
• Pourtant la vie culturelle russe
est en pleine effervescence.
Quelques tendances apparaissent.
• les problèmes de société nourrissent
la création.
Réputée « écrivain de
combat », Svetlallil Alexievitch
(née en 1948) fonde son œuvre
sur les dernières grandes tragédies
traversées par son pays.
Dans
les Cercueils de zinc (1990), elle met
en scène les récits effrayants de jeunes
soldats russes en Afghanistan ;
la Supplication.
chronique du monde
aprés l'apocalypse (1996) témoigne
de la vie de ceux qui vivent encore
sur le site de Tchernobyl, dix ans
après l'accident du réacteur nucléaire.
• la fiction et le théâtre sont utilisés
pour recréer la vie.
Dans Prokhor
Menchoutine (1994), Mark
Kharitonov (né en 1937) invente
un personnage qui rêve de monter
une pièce sur le thème de Cendrillon
dans laquelle jouerait toute la ville.
Dans
les Répétitions (1999},
Alexis Charov (né en 1937) imagine
un univers archaïque où des paysans
simples croient qu'il suffit d'interpréter
la vie du Christ pour que celui-ci
apparaisse ; cette croyance leur vaudra
d'être déportés par le régime soviétique.
• la provocation est aussi un moyen
de lutter contre l'établissement
d'un nouvel ordre moral.
Vladimir
Solokine (né en 1955) connaît
une célébrité de scandale avec
le Lard bleu (1999).
11 est poursuivi
pour « pornographie » après avoir
imaginé une scène homosexuelle
entre Khrouchtchev et Staline.
• le grotesque permet de poursuivre
la tradition satirique.
Vidor Pelevine
(né en 1962) est souvent présenté
comme un écrivain culte du
postsoviétisme.
Sur le mode grotesque,
il exprime un questionnement sur le
sens à donner à la condition humaine
et sur les dangers d'une aliénation à
un système (Oman ra, 1998 ; la Flèche
jaune, 1999; Un monde de cristal, 1999).
• l'extrémisme peut aussi servir à
défendre« l'ancien régime».
Edouard
limonov (né en 1944), chef du parti
national-bolchévique, inculpé pour
« terrorisme » en 2002 et emprisonné,
lance un hymne à la « tribu des ratés »
dans des écrits iconoclastes (Journal
d'un raté, 1970).
Sa dissidence passée
(il est expulsé d'URSS en 1974) trouve
son prolongement dans les incertitudes
de la Russie postsoviétique.
D'AUTRES ÉCRIVAINS CONTEMPORAINS
• Viktor Erofeev (né en 1947),
censuré jusqu'en 1989, est considéré
comme le leader de la nouvelle
génération d'écrivains (/a Vie avec un
idiot, 1984-1988 ; la Belle de Moscou,
1990).
Il a publié une anthologie
de la nouvelle littérature russe,
les Fleurs du mal russes (1997).
• Tatiana Chtcherbillil (née en 1954)
est poétesse, romancière et journaliste.
Sa poésie est pleine d'ironie et
de magie (Parmi les alphabets, 1992).
• Andreï Bitov (né en 1937)
a longtemps publié à l'étranger
avant d'être consacré dans son pays
(la Maison Pouchkine, 1978}.
• Andrtï
un écrivain
écrivain
français
d'origine russe.
Pour lui, la langue n'est
pas le prisme essentiel qui modèle
notre vision du monde.
Créer un
univers poétique, voilà l'important pour
lui.
le message conditionne la forme.
Le Testament français (1995)
lui a valu le prix Goncourt.
LES PRIX NOBEL
DE LITTÉRATURE RUSSES
1933 Ivan Bounine
1958 Boris Pasternak (refusé)
1965 Mikha·11 Cholokhov
1970 Aleksandr Soljenitsyne
1987 Joseph Brodsky (naturalisé
américain).
»
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