Devoir de Philosophie

LA STRUCTURE DES ROMANS DE BALZAC

Publié le 29/06/2011

Extrait du document

balzac

« Sainte-Beuve, dans l'article qu'il écrivit à la mort de Balzac, dit : « Il y a trois choses à considérer dans un roman ; les caractères, l'action, le style «. Il n'emploie pas dans cette table des valeurs justes, le mot composition. Mais trois pages plus loin il écrit : « M. Eugène Sue est peut-être l'égal de M. de Balzac en invention, en fécondité, en composition «. La composition a pris place dans les trois qualités, plutôt inférieures, en lesquelles un Eugène Sue peut dépasser un Balzac «. Pour apprécier l'originalité, le talent, les mérites de ce dernier, continuons d'examiner les moyens dont il use. Nous en avons saisi plusieurs : la description, l'observation, la documentation, un système philosophique, les idées, les passions. Ces deux dernières ne sont pas pour Balzac des abstractions, mais des forces vives, des ressorts intimes, coulés pour ainsi dire, dans l'organisme humain et dans la nature; leurs attaches s'y soudent sans qu'on puisse trouver le point de jointure. Sa fécondité s'étale dans la nomenclature formidable des titres qui composent La Comédie Humaine. Nous avons étudié la technique des caractères. Avant de passer à celle du style, nous devons nous arrêter à celle de l'action. Nous devons examiner ce qu'elle doit à Y exposition, à l'intrigue, au dialogue, pour porter un jugement sur la composition du roman balzacien. Enfin une question fort débattue ne peut être écartée : l'art romanesque de La Comédie Humaine n'use-t-il pas jusqu'à un certain point, des ressources de Y art dramatique ?

balzac

« adverses : les deux frères, Joseph et Philippe Bridau, les deux Rouget père et fils, les deux demi-solde, MaxenceGilet et Philippe Bridau, chacun à la tête d'un parti d'amis.Le contraste est partout dans La Comédie Humaine.

Des groupes d'œuvre ne se feront plus opposition mais serontrangés dans la catégorie Rivalités, étiquette qui classera La Vieille Fille et Le Cabinet des Antiques.

Caractères,portraits, situations, intrigues, les lieux eux-mêmes qui localisent l'action, les maisons et leurs habitants : entre tousrègnent des correspondances de similitudes ou de dissimilitudes qui se subdivisent dans le détail.

Par elles s'établitcomme un jeu dramatique où les forces vitales sont comme aimantées.

Cette dualité s'organise dans une sorted'unité artistique, "L'Histoire de la Grandeur et de la Décadence de César Birotteau abonde en ces oppositions decaractères et de décors et de personnages.

L'effet le plus puissant de ces contrastes compose le dénouement.Quand le parfumeur, « ce héros de probité Commerciale », réhabilité solennellement dans son honneur, rentre dansson ancienne maison, dans son salon, d'où la faillite l'avait honteusement chassé quelques années auparavant, lemême décor, les mêmes femmes dans les mêmes toilettes de bal, les mêmes invités de marque, la même musique —le mouvement héroïque du final de la grande symphonie de Beethoven — occasionnent « une énorme surprise » quile transporte dans un bonheur indicible ; son saisissement est tel qu'il en meurt sur le coup.

Le bonheur cause lapeine, la vie cause la mort»Cette loi n'est-elle pas fondée en nature ? « Par une bizarrerie qu'expliquerait le proverbe : les extrêmes se touchent», des contrastes naît l'attirance : observation profonde dont Balzac sut tirer le meilleur parti.

Ainsi la sympathiereliera-t-elle Minoret, médecin matérialiste et athée, et l'abbé Chaperon, curé de Nemours.

« Pour pouvoir disputer,deux hommes doivent d'abord se comprendre.

Quel plaisir goûte-t-on d'adresser des mots piquants à quelqu'un quine les sent pas ? Le médecin et le prêtre avaient trop de bon goût, ils avaient vu trop bonne compagnie pour ne pasen pratiquer les préceptes, ils purent alors se faire cette petite guerre nécessaire à la conversation.

Ils haïssaientl'un et l'autre leurs opinions, mais ils estimaient leurs caractères.

Si de semblables contrastes, si de tellessympathies ne sont pas les éléments de la vie intime, ne faudrait-il pas désespérer de la société qui, surtout enFrance, exige un antagonisme quelconque ? C'est du choc des caractères et non de la lutte des idées que naissentles antipathies ».

En formulant ce principe de psychologie dans Ursule Mirouët, en 1841, l'écrivain l'appuie sur salongue expérience, mais après l'avoir appliqué dans l'abstrait à la conduite de nombreux personnages.

L'une de sespremières nouvelles, Le Bal de Sceaux (1829), avait montré une jeune fille, Emilie de Fontaine, manquant sottementun mariage, par suite d'un caractère vaniteux et frivole, incapable de comprendre la noblesse et « la fermeté decaractère » du vicomte de Longue ville.A ce jeu d'oppositions le plan gagne en variété, et l'action, quand elle est réduite à un symbole qu'il faut expliquer, àune idée qu'il faut démontrer, acquiert un mouvement d'oscillations chatoyantes.

Par ce moyen, Balzac révèle que,pour lui, décrire, c'est comprendre.

Son don poétique y excelle, comme dans Jésus-Christ en Flandre.

On est tentéde dire que la composition de ce conte est miroitante.

Elle embrasse deux idées : l'état lamentable de l'Eglise dans leprésent, l'état splendide de l'Eglise dans le passé.

Cette opposition se morcelle encore par l'éparpillement des imagesillustrant les déformations et les souillures par lesquelles les passions humaines ont, au cours des siècles, défigurél'harmonieuse intégrité d'une institution divine.

La conclusion sera comme un appel à retourner vers l'idéal primitif.

Onpeut considérer ce plan, animé de résonnances constamment alternées, comme une ébauche assez rudimentaire decelui qui, d'une facture très savante, dressera face à face dans La Cousine Bette, des personnages incarnant lesvices et les vertus contraires.

Il serait trop long d'en faire les portraits.

Chacune des vertus est représentée par unpersonnage différent, mais la troupe des vices, comme un vol d'horribles oiseaux, s'abat sur le héros central, l'infâmebaron Hector Hulot.

Il a les satellites de sa hideur morale, son affreuse cousine Lisbeth, l'ignoble Crevel et sa femmeValérie Marneffe, créature dépravée.

En face d'eux, le groupe vertueux fait contraste : la baronne Hulot, ange debonté, sa fille la Comtesse de Steinbock, âme fière et pure, son beau-frère, type de la probité, le maréchal Hulot,Nous ne pourrions épuiser toutes les oppositions qui se ramifient à travers tous les caractères et toutes lespéripéties.

Ce roman, paru en 1847, l'un des trois derniers qu'ait écrits Balzac, le plus volumineux, le plus touffu, leplus grouillant de personnages, est comme une vaste synthèse des moyens dramatiques employés par l'écrivain.

Onpeut juger maintenant de l'importance primordiale qu'y tient l'antithèse des passions individuelles et des rivalitéssociales.

Un contraste permanent soulève en tous sens les flots de l'océan balzacien.

Suivant l'éclairage de l'heureet du moment, une multitude de formes et de figures farouches ou désespérées s'agitent, se démènent, luttententre elles, ou se lutinent gracieuses.

Et l'on songe aux cortège d'Amphitrite, décrit dans Télémaque, à la surfacedes eaux paisibles où vole le char de la déesse, tandis qu'Eole, qui le suit, inquiet et ardent, aux sourcils épais,s'apprête à déchaîner de sa voix menaçante, l'esprit des noires tempêtes et des vents séditieux.Un autre élément de composition est l'exposition.

Il s'agit d'introduire le lecteur dans le milieu social où va sedérouler le drame, de lui en présenter les acteurs, et surtout le personnage central et ses comparses.

C'est à ladescription d'abord que ce rôle sera confié.

Elle n'est pas seulement de la couleur locale, du pittoresque.

Elle estsurtout un témoignage sur l'époque, une sorte d'exploration sociale, un document sur la situation et le caractère desgens.

Elle prépare l'intelligence du récit par la tonalité des couleurs qu'elle projette dans le champ de la vision.

Nousavons étudié l'importance de ce procédé.

Qu'il nous suffise de rappeler la maison du marchand drapier Guillaume, l'hôtel de Mme de Granville (L'Interdiction), lapension Vauquer (Le Père Goriot), la maison Claës (La Recherche de l'Absolu), le cabinet du juge Popinot(L'Interdiction), qui appartiennent aux Scènes de la Vie Privée.

Tout au long de La Comédie Humaine, la descriptionremplira le même office.

Le boudoir de Diane de Maufrigneuse et l'hôtel d'Escrignon (Cabinet des Antiques), l'antiquelogis de Mme de la Chanterie (L'Envers de l'Histoire Contemporaine), la gentilhommière du baron du Guénic, comme laville de Guérande (Béatrix), sont des « portraits des anciens âges », les « images » des « siècles », où «l'archéologue moral » entend parler les pierres qui communiquent des idées sur les gens qui les habitent.

Pour nousintroduire jusqu'au nœud de l'intrigue, il faut que nous connaissions les antécédents des personnages, d'oùdécoulent leurs rivalités, puis les événements qui les ont excitées et mises aux prises.

L'exposition devientdramatique en se complétant d'une digression vers la passé : c'est le retour en arrière.

Elle nécessite la peintureextérieure de ces personnages ; c'est le moment de dresser leurs portraits en pied.

Presque toutes les Scènes de la. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles