Devoir de Philosophie

La tendance à l'art pur ou l'art pour l'art

Publié le 27/03/2012

Extrait du document

Cette prétention de rendre l'art utile, de le mettre au service de la société, devait susciter les réactions d'un certain nombre d'écrivains, prosateurs et surtout poètes, qui, fidèles à la tradition inaugurée par les Orientales de Hugo, voulurent rester de purs artistes. Ils font de l'Art un dieu qui se suffit à lui-même, et qui mérite d'être adoré et honoré par un culte désintéressé, que ne vienne traverser aucune préoccupation utilitaire ou moralisante. Théophile Gautier (1811-1872) est le premier en date à représenter cette tendance que l'on pouvait apercevoir dès 1830 dans son premier recueil de Poésies; il s'y montrait en effet habile à décrire avec précision des paysages, des objets, des spectacles directement observés et révélait déjà toute la valeur du mot bien choisi. Son poème Albertus, paru en 1832, ...

« ' , ' 1 THÉOPHILE GAUTIER 4R\l s'il se transcende par la difficulté de l'exécution; dans mainte préface et dans maint article, de 1836 à 1838, il devait revenir sur la même idée.

.

Cette fermeté de ton et cette netteté d'attitude firent rapidement de Gautier un chef d'école.

Après.

1840, d'ailleurs, les grandes ;voix du romantisme sen­ timental et humanitaire se taisaient une à une.

Les jeunes poètes, au lieu d'intituler leurs recueils Élégies, Mélodies,, Inspirations, Méditations, les intitulent Caria­ tides, Stàlactites (Banville), Onyx (Coran), Formes.

et couleurs (Ponroy), Arabesques (BerclOux).

La posténté des Orientales se lève quand commence à mourir celle des Méditations.

Gautier lui-même donne l'exemple.

En 1845, il publie Espaiia, où l'évocation plastique prend presque toute la place, qu'elle se suffise à elle-même· ou qu'elle traduise .une observation· psychologique.

Émaux et Camées .

enfin (1852), illustrent parfaitement cette.

conception de la poésie.

L'auteur -~ adopté un mètre fort bref qui rend le moindre effet plus saillant, et contraint la phrase à une densité expressive.

Par cet admirable exercice de langue et de versification, Gautier, tempérant la liberté définitivement conquise par les poètes romanti­ ques, va engendrer une postérit~ · de versificateurs précis et de stylistes"minutieU:x; sôn exemplè va rendre très désuète l'imitation_;, relâchée des épanchements lamartiniens, des éloquences hugolie!lnes, des aveux déchirants à la Musset.

En particulier, une courte pièce, l'Art, écrite en 1857, et ajoutée alors au reç.ueil, allait devenir le credo des jeunes poètes.

La critique n'a longtemps vu dans Émaux et Camées qu'un admirable exercice; en réalité, la sensibilité du poète perce à travers la technique.

Certes, Gautier n'étale ni ses joies ni ses douleurs; l'émotion, qui remplace désormais le sentiment comme matière· de la poésie, n'est pas largement orchestrée et le je reste rare.

Néanmoins, ce serait faire une erreur grossière sur la vraie nature de ce recueil, que de n'y voir qu'un jeu habilè.

La pudeur interdit le cri, la plainte, le gémissement; mais la souf­ france anime cet art subtil et le lecteur un peu délicat la devine sous la ciselure de la rime et sous l'émail du mot.

Par une étrange décision du sort, ce poète amoureux de perfection~ et qui n'éût désiré que de sculpter à loisir des œuvres d'art parfaites, fut contraint d'écrire. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles