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L'adaptation cinématographique d'une oeuvre littéraire.

Publié le 29/03/2011

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   PLAN Introduction    ■ Le cinéma = art mineur, d'après les « lettrés «!    ■ Pour eux il est simple divertissement et même « passe-temps d'illettrés « (Duhamel).    ■ Mais évolution de ce jugement de valeur (en particulier à partir du Surréalisme).    ■ D'où de multiples adaptations d'œuvres littéraires, avec plus ou moins de discernement.    ■ Peut-on les admettre comme « simples décalques « ?    ■ Comment le cinéma peut-il conserver — dans ces travaux — ses moyens et son langage spécifiques ?    Ire Partie    ■ Le cinéma muet, sa valeur créatrice, ses 1res adaptations.    ■ Simples « décalques « d'abord, puis transpositions.   

« faut-il pas que — même partant d'un texte littéraire — le cinéma conserve ses moyens, son langage spécifiques ? * * * Avant même la 1re guerre mondiale, le cinéma se voulait avec Lumière de « la nature sur le vif ».

Mais GeorgesMéliès faisant triompher la mise en scène dans le monde entier marque le vrai début de l'art du film.

Certes,illusionniste, venu du théâtre, il emploie — avec des truquages photographiques en tous genres — les ressources duthéâtre : acteurs, décors, costumes, scénarios, maquillages, machinerie, bref la mise en scène.

Mais il n'identifie pasl'écran au théâtre.

Sa fantaisie et sa malicieuse imagination partent des ressources propres du cinéma pour écrire àl'écran : Les voyages de Gulliver ou Pygmalion et Galatée ou Le Barbier de Séville et une grande quantité d'œuvresfilmiques empruntées à des textes littéraires ou à des féeries.

Ce ne sont pas ses chefs-d'œuvre (tels Le Voyagedans la lune ou L'Affaire Dreyfus), mais il y conserve toute l'autonomie des moyens et de la créationcinématographiques.

Autour de lui cependant, on ne laisse pas toujours voir la même indépendance par rapport à lalittérature et on se tourne de plus en plus vers les textes écrits pour y trouver matière.

Ce sont d'abord les romanspopulaires qui alimentent les films, tels les 1ers films â épisodes de Louis Feuillade.

Un pillage en règle s'établit quiconfirme toutes les attaques les plus basses des intellectuels traditionnels.

Car ces plates adaptations ne masquentguère la pauvreté d'invention du cinéaste.

Même si- on laisse de côté de telles tentatives méprisables ou banales, ilest certain que la valeur profonde de la création au cinéma se voit bien plus souvent alors dans les œuvres qui nesont pas adaptées de romans ou pièces de théâtre.

Par exemple les transpositions plus sérieuses comme LaSymphonie Pastorale de Gide, par le metteur en scène Delannoy (1946) ne sont pas encore tout à faitconvainquantes.

Car le metteur en scène, comme le public, comme le critique, appartenant souvent à l'éliteintellectuelle, voient — en création comme en simple vision — le texte filmique, avec une tête pleine de référenceslittéraires ; — la tentation — de part et d'autre — est de faire puis de juger une adaptation sur sa fidélité.

Prenonspar ex.

le Thérèse Desqueyroux où Franju adapte Mauriac.

Pour que l'héroïne du film (jouée par Emmanuelle Riva)soit vivante, crédible, possible, il lui faut être autonome par rapport au personnage de Mauriac; il faut qu'elle nesuscite aucun besoin de référence à sa cousine de papier.

Si elle est une femme prise dans les tenailles d'unesociété bourgeoise, le film de Georges Franju sait faire partager ses angoisses au spectateur, quel que soit sonmilieu culturel.

Il ne s'agit plus alors de fidélité, mais de respect créateur.

On dépasse l'effort méritoire des dialoguesde Cocteau pour la transposition — à l'époque moderne — d'un épisode de Jacques le Fataliste de Diderot, dans lefilm Les Dames du Bois de Boulogne; ou plus encore — pire encore! — de celle des Liaisons Dangereuses de Laclos,dans la facilité du changement d'époque des Liaisons Dangereuses 1960 de Roger Vadim.

Car le cinéaste a eulongtemps tendance à « transcrire pour l'écran, dans une quasi-identité, une œuvre dont il reconnaît a priori latranscendance » (Bazin).

Il met ou risque de mettre ainsi le cinéma en état d'infériorité, de « dépendance ».

Et lecritique accentue cette tendance en se demandant s'il a « respecté ou trahi » l'œuvre dont il s'est inspiré. * * * Or une bonne adaptation doit « contenir tout ce que le roman pouvait offrir et par surcroît, sa réfraction dans lecinéma.

Donc la même chose, non pas en mieux, mais en plus » (André Bazin).

Reprenons l'exemple précédent deThérèse Desqueyroux.

Nous y trouvons encore des éléments de rhétorique, donc littéraires, telle l'image de lapalombe, rapport symbolique avec le sort de Thérèse, ou les multiples flash-back — procédé de pur artifice —destinés à traduire le regard qu'une femme, désormais au banc de la société, porte sur le passé vécu avant sonacte meurtrier.

Ce sont les traces gardées de la littérature, dont cet adaptateur — bon pourtant — n'a pas sutotalement se défaire, et qui soulevèrent (ironie!) la satisfaction de bien des « lettrés » (qui crient au scandale dèsque la « fidélité » n'est pas totale), car on retrouvait, comme dans le roman, « Thérèse regardant] ces jours purs desa vie — purs mais éclairés d'un bonheur imprécis; et cette trouble lueur de joie, [dont] elle ne savait pas alors quece devait être son unique part en ce monde » (Mauriac).

Deux exemples sont assez frappants des tâtonnements oudes réussites en ce genre.

Hamlet adapté par Laurence Olivier et Macbeth recréé par Orson Welles.

Lesshakespeariens crièrent au scandale devant la réalisation d'Orson Welles, qui pourtant sut utiliser toutes lesressources particulières au cinéma, éclairages contrastés, angles de prises de vue, choix des objectifs, déformationsde perspectives, gigantisme de jeu de l'acteur (Orson Welles lui-même) pour faire mieux ressentir l'épopée tragiquede Macbeth; le réalisateur repense entièrement le sujet en fonction de la caméra, comme dans sa très belleadaptation d'Othello (toujours d'après Shakespeare); c'est à propos d'elle d'ailleurs, qu'Orson Welles déclara, parlantde la « tradition shakespearienne » : « Le grand acteur, comme le dieu antique, doit tuer son père.

Et quand la rouerevient à son point de départ, qu'il périsse sous les coups d'un nouveau sauveur...

Telle est la vraie, l'uniquetradition.

» Il sut ainsi partir des mythes shakespeariens et créer « autre chose »; de même qu'il sut nimber d'unfantastique au 1er degré sa version du Procès de Kafka.

Laurence Olivier, lui, ne prend pas les mêmes distancesavec le théâtre et malgré les ressources extérieures bien plus vastes fournies par le cinéma (décors entre autres), ilsemble parfois se croire à l'Old Vick Theatre.

Son film est un grand morceau de ciné-théâtre où ce metteur en scèneshakespearien a — c'est vrai — utilisé les ressources d'une caméra très mobile, mais il n'est pas du pur cinéma.

Cedernier ne doit être ni théâtre ni roman filmés.

Il doit utiliser son langage propre qui est tout à fait original etétendu, ne pas calquer l'œuvre littéraire mais la traduire à l'aide des images, successions de plans, procédéstechniques divers, — non surimprimés mais autonomes.

Ainsi le long déroulement panoramique des confins de lalande, des marécages désolés, piqués de quelques buissons, situe et donne dès les 1res images du film une certainetonalité de grisaille, au profit de la tension dramatique qui va susciter l'intérêt du spectateur dans la 1re scène(Thérèse Desqueyroux, film de Franju).

La technique cinématographique a été mise ici au service d'une transmissionau public d'un certain lien en rapport étroit avec l'émotion de l'héroïne dont la destinée va être peu à peu révélée,et de l'éveil d'attention du spectateur à cette destinée tragique.

Tel déroulement d'images va donner à l'histoire unedimension fantastique (tandis que le romancier présente au contraire par touches discrètes et cruelles) : Thérèse et. »

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