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Adaptation d'une oeuvre littéraire au cinéma : Vipère Au Poing - Comparaison livre et film

Publié le 30/08/2012

Extrait du document

Dans le roman, M. Rezeau est avant tout le digne représentant d'une race déchue, celle de la bourgeoisie du XIXe siècle. Bazin le décrit comme un homme mort, préférant s'accrocher à des valeurs dépassées plutôt que de se résoudre à la modernité, l'un de ses passe-temps favoris étant ironiquement la généalogie. Si Bazin n'épargne pas sa famille dans Vipère au poing, il fait aussi une critique acerbe de cette caste sociale dont il est luimême l'héritier. Philippe de Broca, provenant lui-même de la petite aristocratie française, affirme pourtant ne pas partager la haine de Bazin face à cette caste sociale. Il préfère d'ailleurs ne pas prendre position dans son film, s'attardant davantage sur l'avènement de la modernité que sur une quelconque critique sociale. Aussi, l'escapade de M. Rezeau et de ses deux fils à Nantes sera le prétexte pour mettre en scène le contraste entre la vie de la famille Rezeau et l'émergence d'un nouveau monde : les années folles, le jazz, le cinéma... De même, dans l'adaptation cinématographique, on choisit de remplacer la révolte de Jean Rezeau, symbolisant cette volonté de changement propre à l'entre-deux-guerres, par l'avènement de l'électricité, aussi garante de la fin d'une époque. Bien que Philippe de Broca ait préféré édulcorer l'aigreur de l'œuvre de Bazin, cela ne veut pas dire que son adaptation de Vipère au poing soit mauvaise pour autant. Il semble que si Bazin pose un regard d'adulte désenchanté sur sa propre enfance, de Broca choisit plutôt de présenter le même récit à travers la perception d'un enfant. En ce sens, l'œuvre du cinéaste s'apparente davantage à l'univers du conte, Folcoche étant la méchante sorcière que Jean devra vaincre. 

« COMPARAISON FILM/LIVREVipère au poing est avant tout un livre sur la mère.

Une mère dépourvue d'instinct maternel, une mère castratrice dont l'ultime plaisir est de tyranniser ses fils.

Unemère si cruelle qu'elle ne pourrait exister, semble-t-il, que dans les contes des frères Grimm...

Pourtant, en créant ce personnage plus grand que nature, Hervé Bazins'est largement inspiré de sa propre mère.

Plusieurs éléments de Vipère au poing ont une troublante ressemblance avec la réalité, si bien qu'il est parfois difficile dedépartager la vérité de la fiction.

Tout comme son personnage de Jean Rezeau, Hervé Bazin appartient à la bourgeoisie provinciale française et a été élevé par sagrand-mère, alors que ses parents vivaient en Asie.

Comme dans le roman, ce n'est qu'à la mort de sa grandmère que celui-ci a fait la connaissance de ses parents.

Deplus, la mère de Bazin et celle de Jean, rebaptisée Folcoche par ses fils, charmante contraction de « folle » et « cochonne », partagent toutes deux le prénom dePaule...

Ainsi, le premier roman de Bazin apparaît à plusieurs égards comme une charge revancharde contre sa propre mère.

Mais plus encore, il y fait une critiquevirulente d'institutions à l'époque intouchables : la famille, l'Église et la bourgeoisie.

Aujourd'hui, Vipère au poing est sans conteste un classique de la littératurejeunesse, publié à quatre millions d'exemplaires, traduit en 44 langues, et même déjà adapté pour la télévision en 1971 par Pierre Cardinal.

Il n'est donc passurprenant que, près de 10 ans après la mort de l'écrivain, on ait voulu adapter au cinéma l'œuvre la plus célèbre de Bazin.

D'ailleurs, bien que ce dernier film dePhilippe de Broca ait été une commande, il s'agissait bel et bien d'un défi, celui de mettre en images un récit ayant particulièrement marqué l'imaginaire des Français.L'adaptation de Philippe de Broca, de facture somme toute assez classique, est fidèle à l'œuvre de Bazin, récupérant parfois des scènes entières du roman et laissantcertains dialogues pratiquement intacts.

Bien entendu, la scénariste Olga Vincent a effectué quelques changements d'ordre technique afin de ne pas compromettre lacohérence et la fluidité du film.

Par exemple, le roman s'échelonne de l'enfance de Jean Rezeau jusqu'à son adolescence, tandis que le film se déroule sur une périoded'un an, évitant ainsi d'avoir recours à plusieurs acteurs pour interpréter un seul personnage.

Par contre, si la force du roman est sans contredit le discours subversifde Bazin, son adaptation cinématographique évite tant bien que mal d'endosser celui-ci.

L'intention d'alléger le récit et la mise de côté de son caractère revanchardtransparaît de diverses manières dans le film.

D'ailleurs, le premier procédé employé à cet effet est de récupérer la nature autobiographique de Vipère au poing pouren faire les prémices du récit.

Ainsi, le film s'ouvre sur une anecdote véridique selon laquelle la mère de Hervé Bazin, bien que ne l'ayant pas revu depuis 28 ans,serait venue trouver la mort chez son fils à Paris.

En mettant en scène ces funestes l'exmplepage 9 COMPARAISON FILM/LIVREretrouvailles, on suggère dès le départ une réconciliation implicite de la mère et du fils, pourtant inexistante dans le roman.

De plus, le premier plan du film, celuid'une bibliothèque où sont alignés les livres de Hervé Bazin, montre une volonté de confondre l'écrivain et Jean Rezeau en un seul et même personnage.

Mais plusencore, le film se distancie de l'œuvre littéraire par le simple plan d'un livre trônant sur le bureau de l'écrivain, bien entendu, intitulé Vipère au poing.

L'adaptationcinématographique se distingue, en proposant une vision davantage nuancée ou « politiquement correcte », de la perception sombre et empreinte de rancœur deBazin.

On comprend qu'il aurait été peut-être délicat de montrer crûment, dans un film grand public, des sévices corporels contre des enfants...

On préfère doncremplacer les coups de fouet par la menace de l'école de réforme.

Aussi, sans occulter totalement l'agressivité contenue dans l'œuvre, on a voulu la diluer, l'expliquerdavantage, et ce, particulièrement dans le cas du personnage de la mère interprétée par Catherine Frot.

Il faut dire que dans son roman, Bazin ne la ménage pas, ladécrivant comme un véritable monstre.

Cette mère indigne, qui prend plaisir à persécuter son fils, a semé dans son cœur une graine de vengeance qui se déploieratout au long de son enfance.

Ainsi, par une lente gestation faite de mesquineries, Folcoche donnera naissance une seconde fois à son fils, faisant de lui un être plusredoutable encore.

On assiste aussi dans le film à cette transformation de la victime en bourreau.

Jean (Jules Sitruk), déballant l'arc offert par sa grand-mère en guisede cadeau de Noël, n'est plus le même lorsqu'il s'apprête à quitter la demeure familiale pour le collège l'année suivante.

Cette fois-ci, on ne se contente pourtant pasd'appliquer ce raisonnement de cause à effet seulement à l'égard du fils, mais aussi à la mère.

La haine de Folcoche cacherait-elle une grande souffrance? C'est dumoins ce que l'on tente de nous démontrer en insistant sur cette hypothèse de la victime devenue tortionnaire.

Si, dans le roman, la seule faille de Folcoche était sasanté physique, cette dernière échappant même à la mort par volonté d'empoisonner la vie de ses fils, le personnage est davantage humanisé dans le film.

D'ailleurs,Jean découvrira, lors de sa fugue chez ses grands-parents à Paris, que sa mère aurait aussi été privée d'amour durant son enfance.

De plus, on récupère une pistementionnée dans le roman, selon laquelle le mariage des parents de Jean en serait un de convention, pour dresser un portrait plutôt sombre de leur relation conjugale.Le duo Frot-Villeret est, d'ailleurs, l'un des éléments les plus réussis du film.

L'interprétation de Villeret est particulièrement savoureuse dans le rôle d'un père lâche,se réfugiant dans son savoir encyclopédique plutôt que d'affronter sa femme.

Vivant des rentes de son épouse et préférant la compagnie des insectes à celle de safamille, il apparaît comme un enfant contraint au despotisme de Folcoche au même titre que ses propres fils. l'exmplepage 10 COMPARAISON FILM/LIVREDans le roman, M.

Rezeau est avant tout le digne représentant d'une race déchue, celle de la bourgeoisie du XIXe siècle.

Bazin le décrit comme un homme mort,préférant s'accrocher à des valeurs dépassées plutôt que de se résoudre à la modernité, l'un de ses passe-temps favoris étant ironiquement la généalogie.

Si Bazinn'épargne pas sa famille dans Vipère au poing, il fait aussi une critique acerbe de cette caste sociale dont il est luimême l'héritier.

Philippe de Broca, provenant lui-même de la petite aristocratie française, affirme pourtant ne pas partager la haine de Bazin face à cette caste sociale.

Il préfère d'ailleurs ne pas prendre position dansson film, s'attardant davantage sur l'avènement de la modernité que sur une quelconque critique sociale.

Aussi, l'escapade de M.

Rezeau et de ses deux fils à Nantessera le prétexte pour mettre en scène le contraste entre la vie de la famille Rezeau et l'émergence d'un nouveau monde : les années folles, le jazz, le cinéma...

Demême, dans l'adaptation cinématographique, on choisit de remplacer la révolte de Jean Rezeau, symbolisant cette volonté de changement propre à l'entre-deux-guerres, par l'avènement de l'électricité, aussi garante de la fin d'une époque.

Bien que Philippe de Broca ait préféré édulcorer l'aigreur de l'œuvre de Bazin, cela neveut pas dire que son adaptation de Vipère au poing soit mauvaise pour autant.

Il semble que si Bazin pose un regard d'adulte désenchanté sur sa propre enfance, deBroca choisit plutôt de présenter le même récit à travers la perception d'un enfant.

En ce sens, l'œuvre du cinéaste s'apparente davantage à l'univers du conte,Folcoche étant la méchante sorcière que Jean devra vaincre.

S'inspirant à la fois des films de type fantastique et des films d'épouvante, de Broca nous propose unmonde poétique où la nature lumineuse apparaît comme un lieu de fuite contrastant particulièrement avec la demeure familiale, qui prend l'apparence d'un sombredonjon.

Même la haine est mise en scène de manière ludique, reprenant candidement l'ironie déjà présente dans l'œuvre de Bazin.

Aussi, la mère et le fils se livrent unduel un peu à la manière d'un jeu, un jeu de guerre certes, fait de stratégies, de victoires et de défaites, mais un jeu dont Jean ne pourra bientôt plus se passer.

Il n'estdonc pas surprenant que le cri de rage sur lequel se clôt le roman, laissant présager le pire, soit tout autre dans le film.

Dans ce cas-ci, la haine devient plutôt uncatalyseur qui permettra la genèse d'un écrivain.

La boucle est bouclée, Philippe de Broca se distingue une fois de plus de Hervé Bazin, préférant voir en lui le doublede Jean Rezeau. conclusionpage 11 Ces trois exemples prouvent qu'une bonne adaptation cinématographique peut jouer un rôle décisif dans la découverte, l'appréciation et la vulgarisation d'une œuvrelittéraire.

Mettre un récit, un drame en image ne représente pas seulement un exploit technique.

Il s'agit bien évidemment de respecter l'auteur mais également lelecteur.

Le passage de son imaginaire aux images surgies de l'écran devra se faire en douceur, dans le plaisir, sans frustration.

La mise en scène d'un film peut aussisuggérer des idées, des sentiments, des émotions, non présents dans le texte d'origine.

C'est en cela qu'une adaptation est réussie ou pas ; lorsqu'elle respecte à la foisl'œuvre, l'écrivain et son lecteur/spectateur elle se met au service de l'écriture et assure sa pérennité.

En cela ces réalisations ont réussi leur pari. Bibliographiepage 12 BIBLIOGRAPHIE ET SOURCES. »

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