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Le genre et les registres dans Zazie dans le métro --> roman de Raymond Queneau

Publié le 30/01/2020

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crédibilité de la fiction. La parodie (reprise décalée des procédés d’un genre ou d’un registre particuliers) permet, en effet, de multiplier les effets de discordance entre les événements rapportés et la tonalité employée, comme « une écaille que l'on fait sauter à la vieille peau littéraire », selon l’image suggestive de R. Barthes (op. cit.9 p. 131). Nous allons donc voir les principales parodies auxquelles se Livre Queneau, qui participent au plaisir de lecture par la complicité instaurée avec le lecteur capable d’en savourer le décalage.

L’épopée : Queneau s’amuse à employer le style homérique pour décrire des réalités prosaïques et d’autant plus incongrues qu’elles étaient inconnues à cette époque : ainsi, la périphrase, si caractéristique d’Homère, transforme les poin-çonneurs en « employés aux pinces perforantes » (p. 15) ou le car en « véhicule aux lourds pneumatiques » (p. 120) ; les paroles les plus banales deviennent des « mots ailés » (p. 100), formule récurrente dans l’œuvre homérique ; il utilise également le procédé du « vers formulaire », expressions ou segments de phrase qui reviennent pour introduire le discours direct - par exemple, « Zazie reprit son discours en ces termes » (p. 69) - ou pour créer une forme de refrain, comme « le lendemain les voyageurs partaient pour Gibraltar aux anciens parapets. Tel était leur itinéraire » (p. 125).

La bataille aux Nyctalopes, vulgaire bagarre de bistrot, prend des dimensions dignes de l’Iliade ou de la Chanson de Roland1, par l’amplification du nombre des combattants devenant des « troupeaux de loufiats » (p. 228) ou une « meute limonadière », par l’anoblissement des combattants, animés du « fier désir de combats » (p. 228) ou faisant preuve de « T esprit militaire [...] grand chez les filles de France » (ibid.) ! Le narrateur joue avec les procédés du genre épique, comme la comparaison animalière : ainsi Gabriel combat-il « tel le coléoptère attaqué par une colonne myrmidonne, tel le bœuf assailli par un banc hirudi-naire » (ibid.) ; admirons ici la virtuosité de Queneau, qui réécrit 1*Iliade à sa façon en jouant sur les mots à plusieurs niveaux : le terme « myrmidon » désigne le peuple du héros Achille, mais étymologiquement il signifie « fourmi » ; quant à l’adjectif « hirudinaire », il est forgé par Queneau à partir du nom savant des sangsues, hirudinées... Cette même inventivité facétieuse se retrouve dans l’évocation des exploits de Gabriel qui « leur fait sonner le cassis T un contre Vautre de telle force et belle façon que les deux farauds s'effondrent fondus » (p. 227), mêlant vocabulaire familier et recherche poétique sur les sonorités avec l’allitération du/.

La tragédie grecque subit également un traitement dévastateur dans la bouche de Zazie : l’héroïne raconte soi-disant sa propre histoire, qui se révèle être un remake de l’histoire sanglante des Atrides, avec Jeanne Lalochère dans le rôle de Clytemnestre tuant son époux Agamemnon à coups de hache avec l’aide de son amant Egisthe, devenu ici Georges... Mais ce récit est traité de façon à verser

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