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Le Pain de Françis PONGE (commentaire composé)

Publié le 16/09/2011

Extrait du document

ponge

LE PAIN
La surface du pain est merveilleuse d'abord à cause de cette
impression quasi panoramique qu'elle donne : comme si l'on avait
à sa disposition sous la main les Alpes, le Taurus 1 ou la Cordillère
des Andes.
Ainsi donc une masse amorphe en train d'éructer2 fut glissée pour
nous dans le four stellaire3
, où durcissant elle s'est façonnée en
vallées, crêtes, ondulations, crevasses ... Et tous ces plans dès lors si
nettement articulés, ces dalles minces où la lumière avec application
couche ses feux - sans un regard pour la mollesse ignoble
sous-jacente.
Ce lâche et froid sous-sol que l'on nomme la mie a son tissu pareil à
celui des éponges : feuilles ou fleurs y sont comme des soeurs
siamoises soudées par tous les coudes à la fois. Lorsque le pain
rassit ces fleurs fanent et se rétrécissent. Elles se détachent alors les
unes des autres, et la masse en devient friable ...
Mais brisons-la : car le pain doit être dans notre bouche moins
objet de respect que de consommation.
Francis PONGE.
 

En accordant votre attention au jeu subtil des rapprochements et des oppositions, des images et des suggestions qui naissent du choix des mots, vous pourrez, en particulier, montrer comment, avec une fantaisie où l'humour n'exclut pas le rêve, le poète renouvelle notre vision d'un aliment commun.

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« En 1942, Francis Ponge fit paraître un recueil de textes assez courts, à mi-chemin entre la prose et la poésie (le titre du recueil suivant, Proêmes, baptisera ce nouveau genre) : Le parti pris des choses .

Une phrase de Sartre, extraite d'un article publié en 1944 dans Situations 1, éclaire la polysémie du titre : « On voit, par la triple signification indifférenciée du titre, comment Ponge entend user de l'épaisseur sémantique des mots : prendre le parti des choses contre les hommes ; prendre son parti de leur existence (contre l'idéalisme qui réduit le monde aux représentations); en faire un parti pris esthétique.

» Ponge, que l'on a nommé avec humour le « Buffon du relative­ ment petit "• est persuadé de l'autonomie des choses, et il essaie de restituer leur dignité originelle aux plus humbles d'entre elles, dans de petites « histoires naturelles ,.

qui se présentent comme des comptes rendus dépouillés, des descriptions minutieuses.

Afin de mettre fin aux controverses qu'avait suscitées Le parti pris des choses, Ponge lui-même a précisé son projet: il ne s'agit pas pour lui d'être poète, mais « d'aboutir à des formules claires, et impersonnelles ».

Et il ajoute : « Je tends à des définitions­ descriptions rendant compte du contenu actuel des notions.

,.

L'étude des quelques lignes qu'il a consacrées au pain nous permettra de préciser la méthode de Ponge.

S'il cherche parfois la formule qui serait l'équivalent parfait du nom de l'objet, ici, il semble davantage soucieux de nous donner tout l'objet, au travers d'une analyse très complète .

Nous pourrons cependant nous demander s' il conserve, dans cette analyse, l'objectivité à laquelle il prétend : il semblerait plutôt que le point de vue analogique qu'il adopte, les nombreuses personnifications qui émaillent son texte, et la « chute ,.

que constituent les dernières lignes, relèvent d'une esthétique essentiellement subjective.

« Le poète, écrivait Proust, recherche les analogies inspiratrices.

,.

Et Francis Ponge lui-même affirme : « Il faut que mon livre remplace ( . ..

) le dictionnaire analogique (il n'existe pas).

"De fait, le point de vue adopté par Ponge pour définir et décrire le pain est un point de vue analogique.

Le titre, extrêmement neutre, ne laisse pas pressentir la métaphore géologique qui articule le texte, et qui produit un effet de surprise indéniable.

C'est une nouvelle façon de voir le pain que Ponge nous propose.. »

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