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« Le Réaliste, s’il est un artiste, cherchera non à nous montrer la photographie banale de la vie, mais à nous en donner la vision plus complète, plus saisissante, plus probante que la réalité même. » Expliquer et discuter.

Publié le 04/11/2016

Extrait du document

Chacun de nous se fait donc simplement une illusion du monde, illusion poétique, sentimentale, joyeuse, mélancolique, sale ou lugubre suivant sa nature. Et l’écrivain n’a d’autre mission que de reproduire fidèlement cette illusion avec tous les procédés d’art qu’il a appris et dont il peut disposer.

Voilà pourquoi l’artiste, ayant choisi son thème, ne prendra dans cette vie encombrée de hasards et de futilités que les détails caractéristiques utiles à son sujet, et il rejettera tout le reste, tout l’à-côté.
Un exemple entre mille :
Le nombre des gens qui meurent chaque jour par accident est considérable sur la terre. Mais pouvons-nous faire tomber une tuile sur la tête d’un personnage principal, ou le jeter sous les roues d’une voiture, au milieu d’un récit, sous prétexte qu’il faut faire la part de l’accident?
La vie encore laisse tout au même plan, précipite les faits ou les traîne indéfiniment. L’art, au contraire, consiste à user de précautions et de préparations, à ménager des transitions savantes et dissimulées, à mettre en pleine lumière, par la seule adresse de la composition, les événements essentiels et à donner à tous les autres le degré de relief qui leur convient, suivant leur importance, pour produire la sensation profonde de la vérité spéciale qu’on veut montrer.
Faire vrai consiste donc à donner l’illusion complète du vrai, suivant la logique ordinaire des faits, et non à les transcrire servilement dans le pêle-mêle de leur succession.
J’en conclus que les Réalistes de talent devraient s’appeler plutôt des Illusionnistes.
Quel enfantillage, d’ailleurs, de croire à la réalité puisque nous portons chacun la nôtre dans notre pensée et dans nos organes ! Nos yeux, nos oreilles, notre odorat, notre goût différents créent autant de vérités qu’il y a d’hommes sur la terre. Et nos esprits qui reçoivent les instructions de ces organes, diversement impressionnés, comprennent, analysent et jugent comme si chacun de nous appartenait à une autre race.
Chacun de nous se fait donc simplement une illusion du monde, illusion poétique, sentimentale, joyeuse, mélancolique, sale ou lugubre suivant sa nature. Et l’écrivain n’a d’autre mission que de reproduire fidèlement cette illusion avec tous les procédés d’art qu’il a appris et dont il peut disposer.
Illusion du beau qui est Me convention humaine ! Illusion du laid qui est une opinion changeante ! Illusion du vrai jamais immuable ! Illusion de l’ignoble qui attire tant d’êtres ! Les grands artistes sont ceux qui imposent à l’humanité leur illusion particulière.
Guy de MAUPASSA^T, Préface de Pierre et Jean, 1888.

1. Au choix, présentez soit un résumé de ce texte qui respecte l’ordre d’exposition des idées, soit une analyse qui dégage les thèmes dominants du passage et mette en relief les grandes articulations de la pensée. Vous indiquerez en tête de votre copie Résumé ou Analyse.

 

2. Ensuite, choisissez une idée du texte qui vous parait intéressante, précisez-en les données et commentez-la à l’aide d’exemples précis.

Pourtant dans la Préface de Pierre et Jean, il prend position contre les écoles Réaliste et Naturaliste et leur prétention à ne montrer « que la Vérité, toute la Vérité »•

 

Il affirme qu’un artiste ne doit pas se contenter d’une « photographie banale de la vie »•

 

Esthétique originale donc.

 

Alors? ... l’œuvre d’art doit-elle donner au lecteur « une vision plus complète... que la Réalité même? »

 

1. Le « Réaliste », observateur de la Réalité.

 

Précision préliminaire :

 

- tandis que la vision romantique est « poétique », « surhumaine -, cf. G. Sand affirmant : « l’art n’est pas une étude de la Réalité positive, c’est une recherche de la vérité idéale »,

 

- les écoles Réaliste, puis Naturaliste affirment la nécessité d’une observation précise de la Réalité.

« La vie, en outre, est composée des choses les plus différentes, les plus imprévues, les plus contraires, les plus disparates; elle est brutale, sans suite, sans chaine, pleine de catastrophes inexpli­ cables, illogiques et contradictoires qui doivent être classées au chapitre faits divers.

Voilà pourquoi l'artiste, ayant choisi son thème, ne prendra dans cette vie encombrée de hasards et de futilités que les détails caractéristiques utiles à son sujet, et il rejettera tout le reste, tout l'à-côté.

Un exemple entre mille : Le nombre des gens qui meurent chaque jour par accident est considérable sur la terre.

Mais pouvons-nous faire tomber une tuile sur la tête d'un personnage principal, ou le jeter sous les roues d'une voiture, au milieu d'un récit, sous prétexte qu'il faut faire la part de l'accident? La vie encore laisse tout au même plan, précipite les faits ou les traîne indéfiniment.

L'art, au contraire, consiste à user de précautions et de préparations, à ménager des transitions savantes et dissimulées, à mettre en pleine lumière, par la seule adresse de la composition, les événements essentiels et à donner à tous les autres le degré de relief qui leur convient, suivant leur importance, pour produire la sensation profonde de la vérité spéciale qu'on veut montrer.

Faire vrai consiste donc à donner l'illusion complète du vrai, suivant la logique ordinaire des faits, et non à les transcrire servi­ lement dans le pêle-mêle de leur succession.

J'en conclus que les Réalistes de talent devraient s'appeler plutôt des Illusionnistes.

Quel enfantillage, d'ailleurs, de croire à la réalité puisque nous portons chacun la nôtre dans notre pensée et dans nos organes ! Nos yeux, nos oreilles, notre odorat, notre goftt différents créent autant de vérités qu'il y a d'bommes sur la terre.

Et nos esprits qui reçoivent les instructions de ces organes, diversement impres­ sionnés, comprennent, analysent et jugent comme si chacun de nous appartenait à une autre race.

Chacun de nous se fait donc simplement une illusion du monde, illusion poétique, sentimentale, joyeuse, mélancolique, sale ou lugubre suivant sa nature.

Et l'écrivain n'a d'autre mission que de reproduire fidèlement cette illusion avec tous les procédés d'art qu'il a appris et dont il peut disposer.. »

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