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LE STOÏCISME DE MONTAIGNE

Publié le 01/04/2011

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montaigne

   Cet essai, comme la plupart de ceux qui ont été écrits entre 1572 et 1575, est d'inspiration stoïcienne. Qu'est-ce que le stoïcisme et comment Montaigne l'en-tendait-il ?    Quelques explications sont ici nécessaires pour suivre ensuite l'évolution de Montaigne. Le stoïcisme ou philosophie du Portique (stoa en grec signifie portique, galerie couverte sous laquelle les philosophes se promenaient en discutant) a pour fondateur le Grec Zénon (IVe siècle av. J.-C.), et pour maîtres illustres Sénèque, Epictète et Marc-Aurèle. Caton d'Utique, contemporain et.ami de Cicéron, qui se suicida par amour de la liberté est le martyr de la cause. Montaigne pouvait s'instruire de la doctrine dans le Manuel d'Epictète, les Pensées de Marc-Aurèle, les Lettres à Lucilius de Sénèque et les Paradoxes des Stoïciens de Cicéron, sans compter les adaptations et commentaires des humanistes.

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« devenus suspects à l'empereur; c'est Arria, femme de Pet-us, qui se poignarde et tend l'arme à son mari en disant :Petus, cela ne fait pas mal ! Montaigne connaît tous ces exemples et bien d'autres, soit antiques, soit modernes, qu'il rassemble dans l'essaiintitulé : Coutumes de l'île de Céa. Une anecdote concernant Sextus Pompée justifie le titre : Sextus Pompée, passant par l'île de Céa, vit une femmede grande autorité, ayant rendu compte à ses concitoyens pourquoi elle était résolue de finir sa vie, qui le priad'assister à sa mort pour la rendre plus honorable...

Elle avait passé quatre-vingt-dix ans en très heureux étatd'esprit et de corps, mais lors couchée sur son lit, mieux parée que de coutume, et appuyée sur le coude ; « Lesdieux, dit-elle, ô Sextus Pompée...

te sachent gré de quoi tu n'as pas dédaigné d'être et conseiller de ma vie ettémoin de ma mort! De ma part, ayant toujours essayé le favorable visage de fortune, de peur que l'envie de tropvivre ne m'en fasse voir un contraire, je m'en vais d'une heureuse fin donner congé au reste de mon âme, laissantde moi deux filles et une légion de neveux...

» Cette grandeur d'âme se manifeste surtout dans les malheurs de la guerre.

Le Lacédémonien Damindas, quelqu'undéplorant devant lui les calamités qui allaient suivre l'occupation de son pays par Philippe : Eh, poltron ! répondit-il,que peuvent souffrir ceux qui ne craignent point la mort... Comme de tels exemptes peuvent paraître légendaires ou périmés, Montaigne a soin de montrer par des anecdotescontemporaines que le suicide est toujours en honneur dans les situations critiques.

Il cite le cas d'un prisonnierpolitique à qui ses parents conseillent de ne pas attendre l'exécution : Ils appostèrent un prêtre pour lui dire que lesouverain remède de sa délivrance était qu'il se recommandât à tel saint avec tel ou tel vœu et qu'il fût huit jourssans prendre aucun aliment...

Il l'en crut et par ce moyen se défit, sans y penser, de la vie et du danger. On ne s'étonnera donc pas que Montaigne ait consacré un essai à la gloire de Caton d'Utique.

Non qu'il se vante del'égaler ! Mais un modèle, même inaccessible, fait progresser sur le chemin de la vertu : Rampant au limon de laterre, je ne laisse pas de remarquer jusque dans les nues la hauteur inimitable d'aucunes âmes héroïques. Dans les dernières années de sa vie, Montaigne repoussera |a doctrine stoïcienne de la préparation à la mort : lesépreuves de la guerre civile et de la peste lui ont montré que de simples paysans meurent plus courageusement quedes philosophes.

Il reniera sur ce point ses anciens maîtres : Nous troublons la vie par le soin de la mort, et la mortpar le soin de la vie...

La philosophie nous ordonne d'avoir la mort toujours devant les yeux, de la prévoir etconsidérer avant le temps...

Ainsi font les médecins qui nous jettent aux maladies, afin qu'ils aient où employer leursdrogues et leur art.

Si nous n'avons su vivre, c'est injustice de nous apprendre à mourir.,.

Si nous avons su vivreconstamment et tranquillement, nous saurons mourir de même... (La mort), c'est le bout, non pourtant le but de la vie. (E, III, xii : De la Physionomie). Cependant toutes les leçons du stoïcisme ne seront pas oubliées.

Plusieurs concordaient avec l'honnêteté foncièrede Montaigne, renforcée par l'exemple de son père et de son ami.

Toute sa vie, Montaigne restera d'une loyauté etd'une franchise absolues, d'un désintéressement total, mérite rare à toute époque et particulièrement dans cettepériode de confusion politique et religieuse.

En matière d'honneur, il ne transigera jamais et n'admettra pas M'excusedes circonstances.

Sans doute, il délaissera le culte spectaculaire de Caton, mais il continuera à lire et relireSénèque, ondoyant et divers comme lui-même.

Se plier aux usages du monde, mais conserver une entièreindépendance de jugement, s'analyser sans cesse, rechercher partout des recettes de morale pratique, voilà lesutiles conseils qu'il trouvait dans les Lettres à Lucilius et qu'il mettait lui-même en œuvre.

Intégrité, loyauté,indépendance et connaissance de soi-même étaient des vertus naturelles chez Montaigne, mais le stoïcisme leurapporta un fondement rationnel et les affermit pour toujours.. »

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