"Le thème de tout roman, c'est le conflit d'un personnage romanesque avec des choses et des hommes qu'il découvre en perspective à mesure qu'il avance, qu'il connaît d'abord mal et qu'il ne comprend jamais tout à fait." Alain nous offre une recette permettant de fabriquer des romans.

Le roman, selon Alain, repose tout d'abord sur un personnage central, auquel le narrateur prête son point de vue. Ce personnage est alors celui qui « découvre », tandis qu'autour de lui gravitent les personnages à découvrir. Il est donc préférable que le héros romanesque soit jeune et ignorant, afin que le processus de la découverte puisse avoir lieu. Or ce système romanesque s'observe idéalement dans le roman de formation, qui constituerait donc pour Alain l'archétype de tout roman. Dans Illusions perdues, Balzac peint par exemple en Lucien de Rubempré l'un de ces jeunes gens naïfs et ignorants. Lucien quitte en effet sa ville natale d'Angoulême pour « monter à Paris » et y chercher la gloire littéraire. Son arrivée à Paris lui permet de faire de nombreuses rencontres dans des milieux variés tels que la bohème, le journalisme, le demi-monde, où se concentrent « les choses et les hommes qu'il découvre en perspective ». Ainsi, ce roman est bien centré sur un personnage principal dont la formation se déroule au fil de la narration. D'autre part, si le personnage est ignorant au début de sa formation, il n'en nourrit pas moins des idées préconçues sur les « choses et les hommes ».