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L'écriture théâtrale chez Marivaux

Publié le 29/06/2015

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marivaux

Lisette : (...) Quelle finesse entendez-vous à ce que je dis ? Silvia : Moi, j'y entend finesse ! Moi, je vous querelle pour lui (Dorante) ! J'ai bonne opinion de lui ! Vous me man­quez de respect jusque-là ! Bonne opinion ! juste ciel ! Bonne opinion ! Que faut-il que je réponde à cela ? Qu'est-ce que cela veut dire ? A qui parlez-vous ?

Ici, il n'y a plus de retenue ; les mots dans leur désordre traduisent les bouleversements du coeur, l'humiliation de l'amour-propre, la surprise. La puissance de ces scènes per­met d'apprécier précisement le poids des mots et l'ambiguïté du langage. Dans ce cas, loin de permettre une communica­tion transparente, il épaissit les malentendus.

Les differents conflits dont la résolution est l'enjeu de la comédie (conflit social, conflit des générations, conflit amou­reux) se trouvent ainsi mis en valeur. C'est par le dialogue qu'ils évoluent.

L'UTILISATION DE LA DURÉE

·     Enchaînements

 

Selon le schéma classique, le changement de scène s'effec­tue dans le Jeu chaque fois qu'un personnage entre en scène ou en sort. Les transitions entre les scènes n'apparaissent jamais artificielles parce que les entrées et les sorties sont toujours justifiées. Ainsi, dans l'acte I (sc. 1 à 2), M. Orgon entre pour informer sa fille de l'arrivée de Dorante. Lisette et Silvia se retirent pour se déguiser (sc. 2, 3 à 4). Silvia réap­paraît pour montrer son costume de femme de chambre

UN DIALOGUE DYNAMIQUE

C'est en effet moins la subtilité que le mouvement qui défi­nit ce théâtre. Le spectateur de Marivaux a le sentiment de voyager, du début à la fin de la pièce, dans une spirale au déroulement quasi continu. Les situations ne sont jamais durablement bloquées. Leur progrès traduit au contraire l'évolution des sentiments, des jugements, des relations humaines. Cette dynamique, perceptible de scène en scène, l'est aussi de réplique en réplique. Le dialogue, dans lequel Marivaux est passé maître, est le coeur de ce mouvement.

·  La réplique

Parler, dans le théâtre de Marivaux, c'est le plus souvent répondre, réagir en prenant les mots au vol. Il faut donc donner au mot « réplique « son sens premier et plein.

Dans le Jeu de l'amour et du hasard, la réplique est mar­quée par sa brièveté. Elle est composée, le plus souvent, de deux ou trois phrases courtes. Les répliques plus longues sont des exceptions remarquables. Par exemple, celle dans laquelle M. Orgon donne lecture de la lettre du père de Dorante est une étape indispensable de l'exposition (I, 4). Tout aussi exceptionnelles et nécessaires, les tirades de Sil­via scandent les temps forts de la pièce. Elles traduisent son désir de se justifier face à Dorante (II, 9) ou sonpère (II, 11), sa joie (III, 4) ou la force de son amour (III, 8j. Le monologue, forme fréquente dans la comédie de Molière, est, dans le Jeu, représenté par une seule scène (II, 8).

 

Un autre caractère de la réplique type de cette comédie est la place tenue par l'exclamation et l'interrogation. Ces deux modalités illustrent, par leur fréquence exceptionnelle, les surprises et les doutes qui s'emparent de personnages jamais en repos. Ainsi Silvia, dans la scène 11 de l'acte II, multiplie les questions qui traduisent à la fois son trouble, son indignation et son désir de vérité : « ... Mais que fais-je ? de quoi m'accuse-t-on ? Instruisez-moi, je vous en con­jure ; cela est-il sérieux ? Me joue-t-on ? se moque-t-on de moi ? Je ne suis pas tranquille. «

marivaux

« et littéraire du 17e et du 18e siècle qui porte ce nom qu'un caractère trop travaillé, trop « poli » du style.

Marivaux est en somme accusé de pousser trop loin les prérogatives de l'écrivain et les artifices de l'écriture au point de préférer le style à la pensée.

(Voltaire ne reproche-t-il pas à Mari­ vaux de parce qu'il fuit l'artifice.

Il veut être jugé pour l'originalité de sa pensée et non sur le seul travail des mots.

Il croit au hasard et donc à la svontanéité dans l'élaboration de cette pensée : > Marivaux répond à ses détracteurs et redéfinit à sa façon le style:.

lls ne le sont pour­ tant pas, ce sont seulement des mots qu'on ne voit pas ordi­ nairement aller ensemble, parce que la pensée qu'il exprime n'est pas commune, et que les dix ou douze idées qu'il a été obligé d'unir pour former sa pensée, ne sont pas plus ordinairement ensemble >> (Sixième Feuille du Cabinet du Philosophe).

Le style, c'est finalement l'originalité, la nou­ veauté de Îa pensée qui produit des associations de mots nou­ velles.

On peut donc considérer Marivaux comme un inven­ teur.

Il a forgé nombre d'expressions que nous employons couramment aujourd'hui comme > ou >.

Les critiques contemporains ont d'ailleurs rendu justice à cet esprit novateur et le terme de > a pris un sens positif.

On a en effet mesuré la dette que notre lan­ gage a envers l'auteur du Jeu.

Marivaux a plus particulière­ m~nt marqué celui du théStre en lui imprimant un dyna­ misme nouveau.

1.

Marivaux, Première Feuille du Spectateur Français.

58. »

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