Les Confessions, Livre IV: J'aime à marcher à mon aise, et m'arrêter quand il me plaît. La vie ambulante est celle qu'il me faut...
Publié le 17/01/2022
Extrait du document
«
II.
L'auto-portrait
La confidence au lecteur
Comme il le fait fréquemment, Rousseau s'abandonne au plaisir de se raconter.
Il brosse ici le portrait d'un hommeaux goûts simples mais nettement affirmés :
s'adonnant avec bonheur aux exercices physiques, à la marche à pied y compris dans les «chemins raboteux»(I.
8) ;
fuyant les contraintes comme l'indiquent les formules qui insistent sur son amour de la liberté («...
j'aime àmarcher à mon aise et m'arrêter quand il me plaît [...] sans être pressé» (I.
1 -3) ;
savourant en épicurien les plaisirs qui passent à sa portée; il avoue avec un égoïsme tranquille que laperspective de revoir sa «chère Maman» ne l'empêche nullement de s'attarder en chemin.
Rousseau entre les lignes
Il y a aussi ce qui n'est pas dit mais qui se laisse deviner entre les lignes.
Tel qu'il est décrit, le paysage estrévélateur.
On peut le déchiffrer comme une projection du
monde intérieur de l'auteur.
Dans le charme qu'exerce sur lui la nature sauvage, Rousseau trahit une tendance aurepliement sur soi-même.
Ce paysage presque déshumanisé révèle une inclination sans doute excessive vers lasolitude, voire une misanthropie que ses détracteurs lui ont souvent reprochée.
De plus, à travers la nature, s'exprime l'un des penchants les plus intimes de Rousseau, celui de la contemplation etparticulièrement de la contemplation de l'eau qui a toujours exercé sur lui une véritable fascination.
Jean-Jacquess'attardant des « heures entières» (I.
20) pour entrevoir l'éclat du torrent annonce le «promeneur solitaire »s'abîmant jusqu'à l'extase dans «le flux et le reflux» des eaux du lac de Bienne'.
Le texte, d'ailleurs, tisse unecontinuité entre le passé et le présent : ainsi s'affirme la permanence de l'être.
Ce passage tendrait à confirmer le jugement de certains critiques qui ont vu dans Les Confessions un roman du «Moi».
Écrit avec l'aisance, la liberté, la simplicité d'une confidence à bâtons rompus, le texte correspond à l'une desprincipales motivations de Rousseau lorsqu'il entreprend la rédaction de ses souvenirs : pallier les déceptions et lesamertumes de la vie réelle en se dévoilant à un lecteur idéal, capable de l'accepter tel qu'il est — ou tel qu'ilvoudrait être — dans sa sincérité et sa singularité..
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