Les Contemplations (V. Hugo) - Association Du Poétique Et Du Romanesque
Publié le 08/01/2013
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On en vient à se demander si la poésie ne pourrait pas tout simplement être une variation du roman.
L’auteur pourrait utiliser une forme spécifique pour se rapprocher le plus possible de l’effet qu’il veut
produire, du message qu’il veut transmettre au lecteur. La poésie offre par sa forme et sa composition un
caractère d’élévation. Les images, la sonorité, les rythmes ou encore l’emploi du vers ont pour objectif
de suggérer une connaissance des êtres et du monde que la prose n’est pas capable d’exprimer. On peut
donc considérer la poésie comme un travail esthétique et formel, et non un langage différent, permettant
de caractériser une certaine vision du monde. Ce propos est également celui de Roland Barthes qui dit
dans Le Degré Zéro que « la poésie classique n’était sentie que comme une variation ornementale de la
Prose, le fruit d’un art, jamais comme un langage différent «. La poésie n’exprime
pas des idées différentes de la prose, mais en modifie l’expression en la rendant plus frappante, plus
noble, plus spirituelle. Donc la poésie et le roman ne diffèrent que dans la forme, mais des formes

«
comme « les mémoires d’une âme ».
Il suit donc le cheminement d’un homme fictif.
La fiction est la
principale caractéristique du roman, voila donc une autre marque du romanesque dans la poésie de
Hugo.
On constate l’omniprésence du Je dans le recueil, et lorsqu’on se réfère de nouveau à la préface,
on comprend que ce Je peut aisément se transformer en Il.
C’est de cette façon que doit être interprété la
phrase « Ce livre doit être lu comme le livre d’un mort ».
Elle justifie le personnage fictif, car contrairement
à Victor Hugo, l’homme que l’on suit tout au long du recueil est mort, le Moi est donc fictif.
Ce paradoxe
du Je est présent dans toute l’œuvre : dans Trois ans après par exemple, les deux premiers vers « Il est
temps que je me repose ; Je suis terrassé pas le sort » montre un sentiment commun à tout individu
ayant perdu un être cher.
Dans Les Contemplations, nous sommes donc en présence d’un Je poétique et
non d’un Je du poète.
Un autre élément qui vient renforcer cette idée de fiction, et plus généralement de caractère romanesque,
c’est que nous retraçons les étapes de la vie intime d’un homme à travers une chronologie réinventée.
En
effet, à l’instar du personnage des Contemplations, la chronologie est fictive.
Les poèmes ont été écrits
pour la plupart entre 1854 et 1855, durant son
exil.
L’ossature chronologique est donc symbolique.
Les dates que Victor Hugo attribue à chaque poème
sont inventées, ce qui justifie une nouvelle fois que nous suivons les mémoires d’une âme, d’un
personnage fictif, et non celle du poète.
La seule date qui permet d’identifier Victor Hugo dans ce recueil,
c’est le 4 septembre 1843, date de la mort de sa fille Léopoldine, date qui coupe le recueil en deux.
Mais
c’est finalement cette date qui renforce l’idée de chronologie fictive, principalement dans Pauca Meae.
Hugo donne effectivement dans ce Livre Quatrième des dates tout à fait symboliques, puisqu’il réutilise
plusieurs fois le 4 septembre des années qui suivent, et utilise également le jour des morts en novembre
1846.
Il veut montrer à travers ses dates, ainsi que par l’absence soudaine de chronologie dans la
datation des poèmes, que l’homme endeuillé est enfermé dans cette commémoration de la mort.
Cet arrêt
du temps révèle le titre ambigu de ce volume Aujourd’hui, un aujourd’hui qui dure treize ans.
Les aspects
autobiographiques et fictionnels aussi bien au niveau de la vie intime du personnage que de la
chronologie montrent que l’ouvrage de Victor Hugo présente un certain nombre de caractéristiques du
roman, cependant il reste un recueil de poème à part entière.
Les Contemplations, avant toute chose, sont un recueil de poèmes.
Bien qu’il présente des
caractéristiques indéniables du roman, l’ouvrage
de Hugo reste avant tout de la poésie.
Molière dit dans le Bourgeois Gentilhomme : « tout ce qui n’est
point prose est vers ; et tout ce qui n’est point vers est prose ».
En effet, La différence la plus
remarquable entre le roman et la poésie est évidemment l’aspect formel.
Le genre romanesque a des
caractéristiques formelles largement moins strictes.
Un roman est en général une narration fictionnelle en
prose, d’une longueur conséquente, assez pour contenir un schéma narratif et actanciel.
La poésie
demande une mise en forme bien particulière, beaucoup plus exigeante.
Elle obéit à une structure
précise, est composé de vers et de rimes afin de créer un rythme, une concentration des effets sonores
du signifiant (assonance, allitération) et jeux sur le signifié (métaphores).
Les Contemplations répondent
parfaitement à tous ces critères.
Sur le plan structurel, on peut citer deux sortes de strophes qui
reviennent en permanence dans le recueil.
Son quatrain d’octosyllabes est assez fréquent, on le voit dans
Trois ans après entre autre.
On trouve aussi le sixain 12.12.6, par exemple dans le poème VIII du Livre
Quatrième.
Il expérimente également toutes les formes de rimes, il respecte la plupart du temps
l’alternance en rimes masculines et féminines : « Je l’entendais sous ma fenêtre / Jouer le matin
doucement » (Livre IV, poème IX), ainsi que les différentes richesses: rampe / lampe (Livre III,
Mélancholia).
Il utilise également tous les effets sonores possibles.
De plus, on retrouve dans tout le recueil une
importante quantité de métaphores qui donnent à la poésie de Victor Hugo une dimension lyrique..
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