Les Goncourt à Gisors.

Il est des lieux — plus encore, peut-être, des demeures — auxquels reste fixé pour la vie le souvenir des joies de l'enfance et des premières découvertes d'un monde en miniature. Du bruissement des hauts feuillages ou du contact de l'eau glacée d'une source naissent parfois des sensations si vives qu'elles porteront toujours en elles le rappel d'une période pleine de promesses : c'est le gazouillement de la grive dont le son magique tire Chateaubriand de ses réflexions et fait reparaître à ses yeux le château paternel; c'est le cri de l'hirondelle, sans cesse tournoyant au-dessus de la maison, qu'entend Gide lorsqu'il songe à La Roque. Il s'agit là, certes, de la demeure familiale à laquelle l'enfant tend à s'identifier. Mais, toute chose appartenant un peu à qui sait en jouir, l'hospitalité, sous sa forme la plus agréable, se rapprochant ainsi de la possession, ne devient-elle pas source d'attaches profondes pour ceux qui en ont bénéficié dans leur jeune âge?