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Les idées et les sentiments d'Alfred de Vigny.

Publié le 27/05/2011

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vigny

Quoiqu'il ait compté parmi les plus ardents romantiques, les ouvrages d'Alfred de Vigny ne contiennent point des confidences, analogues à celles qui abondent dans les Méditations, les Contemplations, les Nuits. Le Journal d'un poète et l'Esprit pur n'ont été publiés qu'après sa mort, et aucun auteur de cette époque n'a mis plus de réserve à nous parler de son « moi «. En revanche, avec une joie amère, partout et toujours, il nous expose ce qu'il pense des problèmes philosophiques, éternel tourment de l'humanité. Tout d'abord, Alfred de Vigny fut un rigoureux idéaliste. Il croyait voir lés Idées apparaître devant ses yeux éblouis ; il en parlait comme d'une Cassandre ou d'une Elvire ; il restait plongé dans l'extase de leur immatérielle beauté ! Le dédain profond lui venait alors de tout ce qui est chose extérieure : la politique méprisable, l'action stérile, la forme littéraire elle-même qui traduit si pauvrement les rêves splendides du poète, le citoyen du pays bleu. 

vigny

« Dans la voie où le sort a voulu t'appeler ;Puis, après, comme moi, souffre et meurs sans parler. Ces idées, qu'on les désapprouve ou les admette, nous semblent puissamment originales et pleines d'une grandeurqui oblige au respect.

Si l'on ne considère que la vigueur de la pensée, l'auteur des Destinées est assurément lepremier poète du XIXe siècle.L'écrivain et le poète.

— On peut se demander pourquoi un poète de celte envergure fut pendant si longtempspresque méconnu.

Certains ont prétendu que l'écrivain avait desservi lé poète.

On a relevé dans les Poèmes de lafausse élégance et des périphrases à la Delille, comme Lamartine lui-même s'en est permis.

On a noté avec minutiedes tournures gauches, des expressions impropres, de l'obscurité ! On s'est offusqué de voir ses rimes tomberquelquefois dans l'indigence.

On a voulu l'écraser sous une comparaison avec des écrivains plus souples et desversificateurs plus habiles.

Accordons cela aux aristarques.

Concédons-leur encore que, par moments, son style aquelque chose de laborieux, à cause des difficultés qu'il doit vaincre pour exprimer des idées fort abstraites.

Il n'enreste pas moins que chez Vigny la forme est à la hauteur de la pensée.Profondément sincère, c'est de l'idée qu'il se préoccupe avant tout.

« Le malheur des écrivains, déclare-t-il en 1834dans son Journal, c'est qu'ils s'embarrassent peu de dire vrai, pourvu qu'ils disent...

Il est temps de ne chercher lesparoles que dans sa conscience ».

Vigny n'a donc rien de commun avec les gens qui croient avoir fait merveillequand sur un thème pris au hasard ils ont brodé des variations éblouissantes, et il aurait rougi de développer uneidée en empruntant à la rhétorique des accumulations de mots et d'images.

Sa méthode est bien différente.

Quand «une pensée philosophique » l'a séduit, il commence par y réfléchir pendant longtemps ; à ses yeux, « l'art est lavérité choisie », car il entend ne rien produire que de longuement médité.

Ensuite il cherche une fiction qui, servantd'enveloppe à son idée lui permettra de « la mettre en scène sous une forme épique ou dramatique ».

Ettardivement vient l'heure de l'exécution, d'où résultent ,en général des chefs-d'œuvre.Tout d'abord, la composition de ces poèmes est savante.

Bien proportionnés à l'idée, ils sont construits avec art,et, habilement, ils nous conduisent à la conclusion que veut nous imposer le poète.

Qu'on étudie à ce point de vuela Colère de Samson, le Mont des Oliviers, le Déluge, mais surtout la Bouteille à la Mer et la Mort du loup : le cadre,l'action, le dénouement ou les réflexions finales, tout témoigne d'une science réelle et l'effet produit estconsidérable.

Nous avons la même impression d'un art très sûr de lui-même quand nous remarquons combien Vigny,dans son oeuvre entière possède le sentiment du goût et de la mesure, professe le respect de la langue, s'exprimeavec une élégante simplicité ! Et puis, sans parler des tableaux superbes ou des gracieuses comparaisons, que devers pleins et sonores ! que de tirades magnifiquement lancées et soutenues, comme celles de Moïse, de Jésus etde la Nature ! Quelle voluptueuse douceur dans le discours de Satan à Eloa ! Quels accents indignés dansl'anathème de Samson, mais, aussi quelle émotion grandiose, dans la fin du Mont des Oliviers et de la Mort du loup !Et n'est-il pas mesquin de chicaner sur quelques négligences celui qui composa les stances de la Maison du bergerou de la Bouteille à la mer, ces stances de sept vers si pleines d'harmonie et d'ampleur ?Pour conclure Alfred de Vigny a été moins populaire que certains autres parce que sa haute conscience d'artiste luiinterdisait d'exploiter sa renommée par une production incessante, de sacrifier aux modes littéraires et aux capricessouvent malsains de la foule et de mener une réclame tapageuse autour de ses vers et de son nom.

Mais, depuis lapublication de son recueil posthume, sa réputation ne fait que s'accroître et il est de plus en plus l'auteur favori desgens que ne contentent point la virtuosité étourdissante ou l'harmonie impeccable, mais qui se plaisent à réfléchirsur d'angoissants problèmes métaphysiques et qui s'en vont chercher dans son œuvre, ainsi qu'il les conviait à lefaire, « l'idéal du poète et des graves penseurs ».. »

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