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Les Liaisons dangereuses, une tragédie ?

Publié le 06/12/2019

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liaisons dangereuses

Entre les parties I etlI, la Présidente devient une héroïne, héroïne du déchirement et de la dignité, à l'image de Bérénice chez Racine (1670). Lorsque la passion commence à se manifester en elle, l'obstacle qui s'oppose à sa vertu est externe, incarné en la personne de Valmont ; cet obstacle est interne à partir du moment où, par l'imagination, elle se consacre à son amant : « Écarté sous une forme, vous vous reproduisez sous une autre » (LVI). Partagée entre le devoir et l'amour, elle ne peut choisir que la fidélité conjugale. Le libertin transforme le dilemme. Sommée de trancher entre le bonheur et la mort de Valmont, elle tente de le sauver. Abnégation ou masochisme, sa passion se transforme en passion christique :

Les Liaisons dangereuses

Pierre-Ambroise-François Choderlos De Laclos

liaisons dangereuses

« 10 8 sa déterm ination : «J 'ai dé jà osé fixer les yeux sur ce moment fatal et mon parti est pris » (CX XVI II).

Elle est capable d'analyse et de lucidité:« C'est pour lui que je me suis perdue » (CXX VIII).

Sa fin dans l'enceinte du couvent, en proie au délir e, unit les deux faces de sa pers onnalit é : l'âme pieuse et l'amante.

Mme de Rosemonde : une confidente Marginale par rapport aux intrigues, Mme de Rosemonde prend une stature de confidente.

D'une origine sociale plus élevée que les confidentes de tragé die, elle a plus de culture, d'éducation, elle a surtout plus de clair voyance et de maîtrise du lan­ gage.

Elle a la sagesse de soutenir une morale sans prêche et de s'en reme ttre à Dieu : « Laissons le droit de juger à celui-là seul qui lit dans les cœurs » (CXXX).

Son sa dignit é lui conf èrent vis-à-vis de la Présidente un rôle de mère (CXXVI).

Ill.

Un langage tragique Les deux ressor ts de la tra die Reprenant les préceptes d'Aristote, il serait excessif d'évoquer la terreur.

La pitié semble en accord avec le mouvement de sensibilité qui anime la fin du siècle.

Pitié pour les paysans qu'une société inégalitaire pressure, pitié pour Cécile, dont la car­ rière est aussi brève que chaotique.

Compassion pour Mme de Tourvel, dont la courbe psychique rend perceptible le combat entre conscience et îllusion.

Par la juxtaposition des lettres, Laclos reproduit ce que Proust appellera les « intermittences du cœur }>.

�� Après J'aveu de sa chute, la Présidente veut croire à« un bonheur parfait» ((CXXXII).

Au sortir de la rencontr e à l'Opéra, nouvel accablement, mais dès Je lendemain, elle s' empresse d'innocent er Valmont : «Tout est réparé » (CXXXIX).

La scène de rup- ture brise ce cycle de tourments et d'e spérances.

Formes théâtra les et ue Bien des formes caractéristiques de la tragé die s'inscrivent dans l'écrit ure des lettres.

De la tirade (XXVI) aux stichomythies, telle que « la guerre », les missives usent de toutes les formes d'expression, la réplique étant le mode naturel des libertins.

La vie de Mme de Tourvel se joue entre deux dilemmes : « Placée par vous entre le désespoir et la fatalité » (XXXVI) ; «Placée par M.

de Valmont entre sa mort ou son bonhe ur» (CXXVIII).

Les manipul ateurs, eux, recourent plutôt à J'ult imatum.

Ainsi, Valmont lance à la Marquise : «O u reprenez -moi, ou au moins prenez-en un autre » (IV).

II revient au lecteur de départager l'hyperbole outrée de Valmont : «Cette même nuit [ ...

] allait être pour lui un siècle de doul eurs » (XXIV) de l'aveu authentique de Mme de Tourvel : «J e me croyais bien sûre d'en mourir » (CIXL), d' entendre l'élé­ gie de Danceny déplorant « l'a bsence si cruelle, si funeste » (XCII), de se méfier de l' antithèse de Valmont : « Vous frappez et j'adore » (XXXV).

En virtuose du style, Laclos entrelace le tragique et sa parodie.

Laclos donne l'impression d'un monde finissant, et les mœurs libertines ne survivront pas à la Révolution.

La forme qu'il choisit sera pratiquée par Balzac, puis s' estompera.

Cette double finitude du représenté et de la représentation scelle comme un destin tragique, cependant que l'ironie est appréciée tel un signe de modernité.

Que l'h omme joue avec le destin dénote pour Je moins sa maîtrise et sa conscience.. »

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