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Les personnages de FANNY, MARIUS ET CÉSAR

Publié le 22/02/2012

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Petite marchande de coquillages sur le vieux port de Marseille, Fanny est le personnage central et effacé de la trilogie de Marcel Pagnol : Marius, Fanny et César. Elle porte un amour passionné et soumis à Marius, jeune homme dévoré par le démon du voyage qui tient un bar avec son père, le truculent cafetier César. Plus que des personnages, Pagnol a créé, avec cette oeuvre, un monde inoubliable. Le Marseille populeux de l'entre-deux-guerres, avec son parler coloré et pittoresque, ses types caricaturaux et chaleureux, lui ont inspiré des scènes et des répliques qui font aujourd'hui partie du patrimoine culturel français.

« Si Topaze montrait chez Pagnol des talents satiriques, Marius fait alterner les scènes comiques (la partie de carteset son fameux « Tu rne fends le coeur ») avec des moments de véritable émotion (les adieux de Marius à son père,le sermon de César...) qui n'évitent pas toujours le mélodrame.

Le succès de la pièce s'explique autant par le fondde l'histoire, très simple et très humaine, que par l'exploitation d'un « folklore » marseillais, à base d'accent, depastis et de jeux de cartes.Il faut également souligner la qualité de la distribution, aussi bien des rôles-clés (l'extraordinaire Raimu en César,Orane Demazis en Fanny et Pierre Fresnay — un Alsacien ! — en Marius) que des personnages secondaires (Charpin,Paul Dullac et Alida Rouffe jouant Panisse, Escartefigue et Honorine).Le succès de Marius poussa Pagnol à écrire une suite : Fanny.

En même temps, la compagnie américaine Paramountproposa à Pagnol d'adapter sa pièce à l'écran.

Ce sera chose faite en 1931, sous la direction d'un metteur en scèneaméricain d'origine hongroise, Alexander Korda, et avec la même distribution que la pièce de théâtre.

Le film fera letour du monde...Fanny sera jouée pour la première fois en décembre 1931, et adaptée presque aussitôt au cinéma par Pagnol et lejeune réalisateur Marc Allégret.

En 1936, la trilogie sera close avec César, écrit directement pour l'écran.

Pagnolétait déjà passé dans le camp du cinéma avec des films comme Jofroi, Angèle ou Merlusse.

Il assura donc lui-mêmela réalisation de ce troisième volet.Cette « trilogie marseillaise » a connu un succès énorme, devenant un véritable classique de l'écran.

Pagnol seconsacra désormais à la caméra, adaptant des oeuvres de Giono (La Femme du boulanger), Zola (Naïs), Maupassant(Le Rosier de Madame Husson) ou Daudet (Les Lettres de mon moulin) ou écrivant ses propres scénarios (LeSchpountz, La Fille du puisatier, Manon des sources...) avec toujours les mêmes ingrédients : habile alternance descènes d'humour et d'émotion, servies par une distribution sans faille au premier rang de laquelle figurent Fernandelet surtout Raimu.En 1946, Marcel Pagnol connaîtra la consécration avec son élection à l'Académie française. Les origines La trilogie Marius, Fanny et César, s'inspirant des moeurs et de la culture marseillaises, s'inscrit dans un certaincourant régionaliste.

S'il exploite à l'excès certains clichés ou certaines plaisanteries traditionnelles, Pagnol estparfaitement conscient de faire de la caricature.

Il a d'ailleurs introduit dans Fanny (acte I, scènes VI et VII) unecurieuse dénonciation des clichés en question.Mais le régionalisme de Pagnol n'a rien à voir avec celui d'autres écrivains méridionaux comme Giono ou Henri Bosco.Par sa verve, son écriture jaillissante, son style simple et vivant, son goût des scènes pittoresques, il serapprocherait plutôt d'auteurs du XIXe siècle comme Courteline ou Maupassant.C'est également de Maupassant que Pagnol se rapproche par la description des situations tragiques ou horriblesqu'engendrent le respect des codes sociaux ou la cupidité.

La vie de Fanny sera gâchée parce que sa famille n'a pasvoulu qu'elle mette au monde un enfant sans père.

De même, dans La Fille du puisatier, un père séquestre sa fillepour dissimuler qu'elle est enceinte tandis que, dans Manon des sources, une famille se déchire pour la propriétéd'un champ.Quant à César, il incarne à la fois le « gros bon sens » et un curieux mélange de bonté et de violence.Son aspect de brute au grand coeur, assez conventionnel, permet des effets comiques souvent réutilisés par Pagnolpour d'autres personnages (tel l'oncle Baptiste dans Le Schpountz).

Mais le talent de l'auteur dote César d'unevéritable épaisseur humaine.César dissimule ses sentiments et ses émotions par souci d'une pudeur mal comprise, explicitée au début de Fannypar les habitués du bar.

Comme le dit Georges Brassens (1921- 1981) dans une chanson intitulée « Modeste » :«Selon lui, mettre en plein soleil Son coeur ou son cul, c'est pareil»Pourtant, ce personnage bourru capable des pires colères sait parfois trouver les mots ou les attitudes les plusjustes, les plus émouvants.

A cet égard, la scène de Marius (Acte IV,scène IV) dans laquelle il fait la leçon à son fils demeure un véritable chef-d'œuvre.

C'est là que l'on trouve safameuse réplique : « L'honneur, c'est comme les allumettes : ça ne sert qu'une fois.»Derrière son aspect populaire, César exprime finalement toute les exigences du code social.

Si Marius agit parinconscience, Fanny par amour et Panisse par une charité mêlée d'intérêt, César et Honorine agissent par respectdes conventions.

Ils font tout pour préserver la « façade », la respectabilité...Le drame de César provient alors d'un déchirement.

Il obéit à ces conventions tout en se rendant compte qu'ellesferont le malheur de Fanny et de son fils.

Ainsi, sa dualité « mauvais caractère — bon coeur » traduit une dualitéplus tragique, l'opposition entre nature et culture, entre amour paternel et respect des codes sociaux.Mais au-delà de la critique sociale à la Maupassant, on trouve chez Marcel Pagnol une autre influence : celle duthéâtre grec de l'Antiquité.

Elle se manifeste à la fois dans la construction du scénario et dans la motivation despersonnages.En effet, deux des éléments caractéristiques du théâtre antique sont le poids du destin sur les actes despersonnages et l'intervention du choeur, groupe de récitants qui commente, explique et parfois fait progresserl'action.Dans la trilogie de Pagnol, le choeur est présent de façon quasi permanente sous la forme des habitués du «Bar dela Marine ».

Escartefigue, Monsieur Brun ou le capitaine du ferry-boat participent de loin à l'action principale; maisen revanche, ils expliquent et commentent chaque nouvelle péripétie.Quant au destin, cette force inévitable qui guide malgré eux les pas des personnages, elle prend chez Pagnol desformes diverses.

La passion de Marius, la soif irraisonnée de navigation et d'aventures maritimes qui le pousse àquitter Fanny et cause tout le drame, est l'une de ces formes.

Une autre, plus subtile, est la pression sociale quipousse Fanny à épouser Panisse pour éviter le déshonneur de sa famille.... »

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