LITTÉRATURES ARABE ET MUSULMANE
Publié le 10/11/2018
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Le Coran joue un rôle fondamental dans les lettres arabes. Il représente l'enseignement du Tout Puissant transmis de 612 à 632 à Mahomet par l'ange Gabriel, que le prophète eut pour mission de réciter. La tradition le pose donc en modèle inimitable (ijaz), puisque d'inspiration divine. Sa rédaction introduisit aussi l'usage de la prose chez les Arabes, qui supplanta rapidement la poésie orale. L'expansion de l'islam l'impose dans des contrées non-arabophones, et les nouveaux musulmans en adoptent la langue. Partout le Coran est tenu pour l'idéal de la clarté et de l'éloquence. C'est sur son modèle que s'établissent les standards de la langue littéraire, et quatorze siècles après sa rédaction, son poids reste sensible sur la prose arabe.
LITTÉRATURES ARABE ET MUSULMANE
Principalement musulmans depuis l'avènement de l'islam au vie siècle de notre ère, les Arabes ont une histoire vieille de 3 000 ans. Mais la culture arabe ne se réduit pas à son aspect religieux, et, si l'islam compte plus d'un milliard d'adeptes à travers le monde, seul un cinquième d'entre eux sont de langue arabe. Littérature arabe et littérature musulmane ne se superposent donc pas... Les lettres arabes ont existé avant l'Hégire, et au cours des siècles, si le Coran est resté la référence, elles se sont ouvertes aux influences grecques, persanes et, aujourd'hui, occidentales.
LA LITTÉRATURE PRÉ-ISLAMIQUE
De rares vestiges du vie siècle (fragments de textes divinatoires) sont en prose rimée et rythmée, mais les premiers textes littéraires arabes sont en vers. La poésie joue un rôle fondateur de la littérature arabe. Au ixe siècle av. J.-C., l'Arabie, carrefour de l'Égypte, de la Syrie, de la Mésopotamie et de l'Inde, offre aux Arabes les moyens d'un développement brillant, mais subit plusieurs invasions à partir du Il' siècle av. J.-C. Cette période de violence tribale, précédant l'arrivée du prophète Mahomet, est appelée par l'islam la Djahiliyya, \"le temps de la fureur\". Ce n'est pas de la riche Arabie du Sud, civilisée, où l'écriture se généralise, que nous viennent les premières traces d'une littérature en langue arabe, mais des peuples bédouins nomades des plateaux désertiques.
La POÉSIE
Née de joutes poétiques et de chants collectifs, la littérature arabe des origines est une littérature orale, et donc dominée par la poésie : ses formes primitives reposent sur la récitation ; la rime et le mètre y servent de cadre à la mémorisation. Le poème a la violence de la vie dans le désert, même dans ses passages amoureux ou érotiques. C'est aussi une arme de combat : toute tribu se doit d'avoir son poète attitré, qui célèbre ses exploits et transfigure ses échecs. La prose s'épanouit avec le support de l'écriture et implique un degré de civilisation avancé que les Bédouins ne connaîtront pas avant le IVe siècle apr. J.-C. Les plus
La philosophie & les sciences
Les écoles de droit et de théologie gagnent en influence, et les intellectuels cherchent à relier la philosophie antique et les exégèses islamiques. On redécouvre les penseurs grecs, en philosophie, médecine, mathématiques ou histoire. Les principaux philosophes issus de ce courant sont Al-Farabi (870-950), Al-Ghazali {1058-1128) et Ibn Arabi (1165-1240). Bagdad devient le centre du savoir encyclopédique.
Les travaux des savants serviront de base à la renaissance philosophique de l'Occident au xiiie siècle.
De cette époque datent les deux hommes de lettres les plus influents du Moyen Âge arabe, Avicenne et Averroès.
• Avicenne
Médecin, philosophe et exégète iranien (980-1037). Ses écrits étaient le seul accès à la pensée d'Aristote pour les chrétiens du Moyen Âge. Ses préceptes en médecine, hérités d'Hippocrate et Galien, furent suivis jusqu'au xvie siècle. Il rédigea Le canon de la médecine et La philosophie illuminative.
«
LA
PHILOSOPHIE n LES SCIENCES
Les écoles de droit et de théologie
gagnent en influence, et les intellectuels
cherchent à relier la philosophie
antique et les exégèses islamiques.
On redécouvre les penseurs grecs, en
philosophie, médecine, mathématiques
ou histoire.
Les principaux philosophes
issus de ce courant sont Al-Farabi
{870-950), Al-Ghazali {1058-1128)
et Ibn Arabi (1165-1240).
Bngdnd devient le centre du savoir
encyclopédique.
Les travaux des savants serviront
de base à la renaissance philosophique
de l'Occident au x111' siècle.
De cette époque datent les deux
hommes de lettres les plus influents
du Moyen Âge arabe, Avicenne
et Averroès.
• Avicenne
Médecin, philosophe et exégète iranien
(980-1037).
Ses écrits étaient le seul
accès à la pensée d'Aristote pour les
chrétiens du Moyen Âge.
Ses préceptes
en médecine, hérités d'Hippocrate et
Galien, furent suivis jusqu'au XVI' siècle.
Il rédigea Le conon de la médecine
et La philosophie illuminotive.
• Averroès
Philosophe et
mathématicien
de Cordoue
(1126-1 198).
Averroès est un
des grands
commentateurs
d'Aristote et va
contribuer au
bouleversement de l'enseignement
dans le monde chrétien.
Dès le début
du Xlii' siècle, les textes d'Averroès sont
étudiés et donnent lieu en Occident à
d'intenses disputes philosophiques où
le raisonnement, plus que la foi, tient
toute sa place.
LA
TRADITION DES BIBLIOTHtQUES
Plusieurs causes favorisent
la multiplication des bibliothèques :
le papier réduit le coût des livres,
les intellectuels copient et traduisent
des œuvres que leurs contemporains
d'Occident délaissent, à cause du
prix du parchemin.
De plus, lors des
conquêtes musulmanes, les collections
antiques n'étaient pas détruites ;
le personnel des bibliothèques
(les copistes, les trndudeurs) était
en général maintenu.
Enfin, il a de tout temps été de bon ton
pour les dirigeants musulmans d'être
cultivés, avant d'être des chefs de
guerre.
Les puissants du monde arabe
finançaient des " maisons de la
sagesse » et subventionnaient
les étudiants méritants de bourses.
Entre 750 et 1258, sous les Abbassides,
Bagdad comptait plus de trente-six
bibliothèques.
• Les bibliothèques califales
Centres de synthèse de tous les savoirs,
philosophiques, scientifiques et religieux,
elles sont des lieux de collecte, de
diffusion, de copie et de traduction.
Elles possèdent leurs services de
libraires, de copistes et de relieurs,
leurs académies de traduction et
un réseau de libraires-correspondants.
Elles mènent une politique d'acquisition
ambitieuse, qu'il s'agisse d'échanges
pacifiques ou de prises de guerre.
Un effort fut mis en œuvre à partir
du IX' siècle pour collecter les textes
grecs antiques, dont beaucoup ne nous
f--------------1 sont connus aujourd'hui que par des
TRADITION ARABE ET
LITTÉRATURE OCCIDENTALE
Bien avant la diffusion des Mille et Une
Nuits en Occident l'Orient et les contes
arabes ont fasciné les auteurs d'Europe.
La poésie des troubadours d'Aquitaine
doit beaucoup à celle des auteurs
arabes d'Espagne.
Il existe probablement une influence
arabe (avec qui les croisés étaient
souvent en contact) dans le thème de
l'amour courtois: Lancelot et Guenièvre
ou Tristan et Iseut.
Dante reprend
des détails de l'ascension du prophète
Mahomet dans sa Divine Comédie.
C'est chez Shakespeare que l'arabisme
est le plus marqué.
Le Marchand de
Venise met en scène un prince du
Maroc, et Othe/la est un prince maure.
La mode orientale à la cour de la reine
Élisabeth y mêle des éléments arabes,
perses et indiens.
L'intrigue des Mille et Une Nuits,
officiellement traduites en Occident
au XVII' siècle, a sans doute inspiré,
au XIV' siècle, les Contes de Canterbury
de Chaucer, le Décoméron de Boccace
et plus tard, Voltaire ou Byron, ainsi
que la mode de l'orientalisme.
traductions
arabes de cette époque.
La bibliothèque califale de Cordoue
compte au X' siècle près de 400 000
volumes.
• Les bibliothèques de mosquées
Elles tiennent à la disposition du public
des exemplaires du Coran et des textes
profanes à vocation édifiante.
• Les madrasas
Bibliothèques d'enseignement religieux,
elles sont surtout fréquentées par
des étudiants.
la chute de Bagdad, en 1258, marque
le début du déclin des lettres arabes.
Si la pensée des Arabes de l'Âge d'or
continue à jouer un rôle de premier
plan dans la vie intellectuelle de
l'Occident, il faut attendre le XIX' siècle
pour qu'un renouveau littéraire voit
le jour en Orient.
XIX'
-XX ' SIÈCLE : LE RÉVEIL
Le xiX' siècle est l'époque du renouveau,
de /'oi-Nohdo (« le réveil »).
L'imprimerie
apparaît au Caire, Beyrouth et Damas.
Son développement est timide,
et si on publie des journaux et
des encyclopédies, les auteurs
littéraires cherchent leur place entre
les anciens (on note un retour aux
sources antérieures au Xlii' siècle)
et la modernité (recherche de formes
et de thèmes nouveaux.
souvent issus
de l'Occident).
A cet égard, le Roman
de Ba ybars, qui retrace la vie de
ce sultan mamelouk du xm• siècle,
symbolise le travail d'enregistrement
de la littérature populaire qui débute
à cette époque.
C'est aussi l'époque du développement
du journalisme, des écoles,
des universités et des Académies,
à Damas (1921) et au Caire (1932).
Une littérature engagée voit aussi
le jour.
son influence participe à la naissance
du mouvement réformiste.
Ses figures
principales en sont Djamal al-Din
al-Afghani (1839-1897), Qasim Amin
(1865-1908), Rachid Rida (1865-1935).
La modernisation de la langue arabe
passe par l'édition de dictionnaires
(Ahmad Faris ai-Chidyaq, 1804-1887;
Butrus ai-Bustani, 1819-1883) et
d'encyclopédies.
Des œuvres de la
littérature occidentale sont traduites
en arabe : 1'1/iode, par Sulayman
ai-Bustani {1856-1925), ou la Bible,
par Nasif ai-Yazidji (1800-1871}.
Le dilemme entre anciens et modernes
débouche sur une langue moderne,
l'« arabe médian », que défend
dès 1930 Tawfiq al-Hakim.
fACE À L'OCCIDENT
• La poésie
la poésie se renouvelle dans ses
thèmes et sa structure, surtout en
Égypte avec ai-Barudi (1838-1904),
Ahmed Chawqi {1868-1932), le" prince
des poètes », Khalil Mutran (1872-1949} ;
en Irak, avec Az-Zahâwi (1863-1936)
et Rusafi (1875-1945).
A partir de 1880,
des poètes émigrent en Amérique :
c'est le mahdjar (littérature de l'exil).
La
(1883-1931).
connaissance
directe des
littératures
occidentales renouvelle
les thèmes
et les formes,
comme chez
le Libanais
Khnlil Cibrnn
• Les romans elles nouvelles
Le roman et la nouvelle, introduits
dans le monde arabe lors de la
conquête de l'Égypte par Bonaparte,
se concrétisent par des œuvres
historiques, comme celles du libanais
Djurdji Zaydan {1861-1914).
En
Égypte, Muhammad Husayn Haykal
(1888-1956) écrit la première grande
œuvre romanesque arabe, Zoynob
{1914), et Manfaluti (1876-1934) tire
de l'histoire arabe des biographies
romancées.
Dans les années 1920-1940,
vie quotidienne et personnelle sont au
centre des romans des Libanais Marun
Abbud {1886-1962) et Mikhail Nuayma
(1898-1989}, et des Égyptiens Tawfiq
al-Hakim (1898-1987) ou Taha Husayn
(1889-1973}.
Après la Seconde Guerre mondiale,
le réalisme prend son essor avec
les Égyptiens Djamal ai-Ghitani,
Abd al-Rahman ai-Charqawi et la vie
paysanne
égyptienne
dans la Terre
(1954), et
Nndjib
M nhfuz (né
en 1911), qui
publie entre
1956 et 1957
sa trilogie
décrivant trois générations de Cairotes
(Impasse des deux palais ; le Palais du
désir ; la Suaerie).
Le genre se développe aussi en Irak,
avec Dhu ai-Nun Ayyub, gagne le Liban,
avec l'auteur féministe Layla Baalbaki
(Je vis!, 1958}, puis le Soudan
(Attayyeb Salih) et la Syrie (Abd
al-Salam ai-Udjayli, Zakariyya Tamer).
• Le théâtre
Venu d'Occident, le théâtre démarre
avec AI-Bakhil (une adaptation
de l'Avare), par le Libanais Marun
ai-Naqqach, représentée à Beyrouth
en 1848.
En Égypte, Muhammad
Taymur (1891-1921) écrit des comédies
sociales et théorise le théâtre naissant.
La première troupe arabe professionnelle
est fondée en 1912, au Caire, par
Georges Abyad.
Au xX' siècle, Tawfiq al-Hakim domine la
production arabe, avec un théâtre de
langue classique, mais inspiré par le
théâtre grec classique et les auteurs
contemporains : Ionesco, Beckett.
Aujourd'hui, l'expression littéraire
de la Nahda, la culture arabe, témoigne
d'une grande vitalité : multiplicité des
genres, des styles et des origines (pays
du Maghreb, Soudan).
Les romanciers égyptiens tels que
Hafiz Ibrahim se font connaître hors
du monde arabe.
De nouveaux genres,
comme l'autobiographie, gagnent
les faveurs du public.
Celle de Ta ha
Husayn, publiée de 1920 à 1960,
monument de la prose arabe moderne,
est un témoignage poignant (l'auteur
devient aveugle).
LA POÉSIE
la poésie arabe contemporaine
exprime les aspirations du peuple chez
l'Égyptien Amal Danqal (1940-1983),
l'Irakien ei-Bayati (Poèmes d'amour
des sept portails du monde, trad.
fr.
1981 ), ou le Palestinien Mahmoud
Darwich, poète de la patrie perdue
(Rien qu'une autre année, 1966/1982,
trad.
fr.
1983}.
Poésie d'avant-garde, symbolisme et
surréalisme apparaissent à Beyrouth
dans le groupe Chi'r et chez le Libanais
Ali Sa7d, Adonis (le Livre de
la migration, trad.
fr.
1982).
Tradition
et modernité trouvent
un équilibre subtil chez les Irakiens
Nazik ai-Mala"1l.
»
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