Devoir de Philosophie

L'occupation américaine, Pascal Quignard

Publié le 22/02/2012

Extrait du document

pascal
« Ce fut soudain. Soudain, il fut surpris d'avoir quitté l'enfance. » C'est ainsi que le narrateur de L'Occupation américaine exprime de vive voix le changement qui s'opère apparemment dans cet extrait. C'est à dire la sortie du monde de l'enfance par le personnage principal, Patrick Carrion. Après s'être fait tabasser devant chez lui par des anti-américains, Patrick est secouru et recueilli par le sergent Caberra et le lieutenant Wadd, deux militaires de la base américaine de l'US air force basée à Meung. Dans cet extrait, il entre de plein pied dans le monde américain qu'il convoitait tant, ce « Royaume » comme est intitulé le deuxième chapitre, royaume qui peut aussi représenter l'âge adulte puisque d'après Patrick lui-même il quitte l'enfance pour y entrer. Par cette découverte, il touche enfin ce rêve qu'il avait en commun avec Marie-José, son amour d'enfance.
pascal

« Mais tout cela, reste la vision de Patrick, parce que justement, cette liberté que l'on voit chez lui, rappelle plutôt laspontanéité de l'enfance. II)a)Cette spontanéité est très bien ressentie avec le jazz puisque comme dit plus tôt, il qualifie cette musiqued'improvisée.

Elle fait perdre le contrôle de son propre corps : « une possibilité de prendre au mot le hasard d'uninstant et de le ressentir de la tête aux pieds ».

C'est une musique corporelle et unificatrice : « vivante », « unetristesse devenue corps », « comme s'il formait qu'un seul corps », « une façon de respirer et de mouvoir tous sesmembres », « tous ceux qui écoutaient s'accordaient au même rythme », « c'était un véritable lien social ».

Mais ilinsiste aussi sur le fait que ce soit spontané « C'était une solidarité aussi subite que bouleversante.

», « le hasardd'un instant », « immédiatement », « un lien immédiat associant sur le champ ceux qui jouaient à ceux quiécoutaient ».

Ce n'est pas le comportement raisonné que l'on affilie à l'âge adulte.

Un trop plein de liberté plutôt liéà l'enfance.

On ressent aussi un côté primitif lorsqu'il dit « comme une tribu des premiers âges.

Chacun croyaitretrouver un chant qui remontait de l'aube.

» et ça n'est pas sans rappeler le fait que le jazz est arrivé en Francedans les années 20 et fut connu par La revue nègre et notamment Joséphine Baker qui dansait en pagne debananes et aussi les affiches de concert représentaient souvent des noirs dans le stéréotype de l'africain cannibale,primitif venant de tribus lointaines.

De plus, le narrateur ajoute un côté rythmé à sa description de cette musiqueavec le rythme ternaire qu'il utilise dès le début « Il avait déjà entendu cette musique mais la découvrir improvisée,quotidienne, vivante ».

Et même après il fait une longue phrase ponctuée par plusieurs points virgules afin démontrerle l'union qu'opère le jazz et aussi la façon dont le jazz s'exprime à travers le corps.b)Et le côté primaire et enfantin est encore une fois retrouvé dans le passage mais cette fois dans le comportementdes américains.

Augustus par exemple change d'un instant à l'autre d'humeur : « comme s'il était pris de colère », «Augustus se mit à sangloter ».

Et même la façon dont s'exprime le narrateur est enfantine puisqu'il utiliseénormément la parataxe : en parlant d'Augustus « Le trompettiste gémit doucement tout à coup.

Il poussa unsoupir.

Il s'assit.

Il faisait non avec la tête.

».

En parlant de Caberra « Il était gigantesque.

Il avait trente ans.

Ils'enticha de Patrick.

».

Un autre exemple « Patrick se leva.

Il alla le trouver.

Il lui parla.

»Ils ne font pas particulièrement preuve d'empathie « Le trompettiste regarda avec désespoir le saxophoniste qui riaittoujours aux éclats.

».

Ils sont rustres aussi dans leur comportement comme on le voit avec la bagarre qui a lieu àla fin du passage, Augustus et Mel décide de s'y mêler sans raison apparente « Augustus et Mel s'avançaient pourprendre part au combat à mains nues.

» Et ils semblent aimer ça en plus « Qui cherche le trouble et désir les ennuis?» dit le sergent Caberra.

Même dans la musique ils sont violent mais cette fois c'est Ridelsky qui en est l'exemple(même s'il n'est pas américain il est quand même déjà dans cet univers) : « Ridelsky plaquait son accord, l'accord leplus violent, le plus discordant : tout ce qui dissociait tombait.

» Ici il y a d'abord encore une fois une insistanceavec l'anadiplose, puis une autre avec l'anaphore doublé du superlatif qui appuie sur l'excès dont ils font preuve, etensuite ce que l'on peut considérer comme une antithèse avec les mot « accord » et « violent » et aussi « accord »et « discordant ».

Il y a la volonté d'union et en même temps la violence, la force.

Alors, ici Patrick est loin de sortirde l'enfance, il semble plutôt y faire même au contraire une incursion. III)a)Tels les enfants, Patrick est enthousiaste l'idée de la nouveauté, il est ébahi devant le jazz, il est ébahi devantRidelsky « Patrick fut ébloui par François-Marie Ridelsky.

».

Patrick est dans l'observation dès qu'il est dans le mess,à aucun moment le narrateur ne le fait parler.

De plus, encore une fois comme un enfant, il agit par mimétisme faceau gens qui l'entoure ce qui traduit une volonté d'intégration de sa part.

On le voit avec la comparaison : « Patricks'efforçait de rire afin de faire comme ils faisaient tous »b) L'autre particularité qui renvoit Patrick au mon de l'enfance, c'est le comportement des deux nouveauxpersonnage Trudy Wadd et Wilbur Caberra à son égard.

La première prend soin de lui et affiche presque un côtématernel : « elle posa la main sur son front.

», « en articulant lentement les mots », « Trudy Wadd demanda àPatrick Carrion comment il se sentait.

».

Et lui est réceptif : « Mais Patrick prit les doigt de Trudy tout en se taisant.».

Le sergent Caberra lui, en complément, représente l'image paternel et dominatrice.

Tout d'abord, c'est lui (en plusdu lieutenant) qui secoure Patrick dans la scène juste avant.

Ensuite comme spécifié plus tôt, il l'introduit dans cenouveau monde rêvé.

Et la description faite de lui est assez parlante : « Wilbur Caberra avait fait le Pacifique, leJapon, la Corée.

Il était gigantesque.

Il avait trente ans.

Il s'enticha de Patrick.

».

On souligne ici encore une fois lerythme ternaire qui tend à multiplier les mérite du sergent.

Ainsi que l'hyperbole quant à sa taille.

Et le styleparataxique sur sa description rappel l'enfance ou tout du moins une description que serait faite par un enfant.

Luiaussi prend soin de Patrick « il [...] s'inquiéta de la santé de l'adolescent ».

De plus, c'est lui qui par la suite luioffrira sa batterie morceau par morceau ce qui nous laisse croire qu'il y a derrière ça une leçon sur le mérite.

Il aaussi cette figure dominante « la table du sergent », mais il fait aussi parti de la bagarre « Patrick vit le sergentWilbur Caberra qui dominait la mêlée en levant ses poings », « tandis que ses points s'abattaient sur le visage desnoirs ».

Mais déjà, on perçoit les prémices de la prise de conscience de Patrick.c)Car la sortie du monde de l'enfance ne semble pas tant le réjouir que ça au départ.

Comme précisé plus tôt, c'estune découverte abrupte pour lui : « Brusquement, les adorations, les jeux absorbants s 'effacèrent sous la gommedes mots précis, des terreurs, dans la peur des ridicules, dans la contraction de l'angoisse.

Père, mère – maisaussi condisciple, aussi amour d'enfance -, une espèce de niaiserie s'attacha soudain à eux et lui fit honte.

» Toutesces reformulations pour dire une chose, la prise de conscience de la peur, de la honte, du ridicule.

C'est une césurequi se crée entre ce qu'il était et ce qu'il est, entre lui et ceux qu'il connaissait « Père, mère », « aussi amour. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles