L'oeuvre de Giraudoux

« Après une première période où sont publiés Suzanne et le Pacifique (1921), Siegfried et le Limousin (1922), Juliette au pays des hommes (1924), Bella (1926) et Églantine (1927), Giraudoux se tourne vers le théâtre.

Mais il ne renonce pas pour autant à écrire d'autres romans qui se situent dans la lignée des premiers.

Les Aventures de Jérôme Bardini (1930), La France sentimentale (1932), Combat avec l'Ange (1934), Choix des élues (1939) expriment peut-être davantage le malaise de l'écrivain dans un monde menacé par la montée des périls queconnaissait trop bien ce témoin privilégié. L'ACCOMPLISSEMENT DRAMATIQUE C'est le théâtre qui va permettre à ce romancier reconnu, en pleine possession de ses moyens, de s'accomplir.Lorsque, grâce à Jouvet, Giraudoux vient au théâtre avec Siegfried (1928), il a quarante-six ans.

Il va écrire pour une troupe, pour des acteurs précis, donnant ainsi plus d'impact aux répliques, s'en remettant entièrement à Jouvetpour tout ce qui touche à la réalisation du spectacle.

Dès lors, sa production dramatique — production abondante etrégulière — va constituer la majeure partie de son oeuvre.

De 1928 à sa mort, Giraudoux écrit des œuvres qui sontgoûtées par un public conquis d'avance.

Avec lui la scène française retrouve un véritable langage théâtral, littérairemais accessible, même s'il est parfois déroutant, un théâtre de connivence culturelle où le langage retrouve sepleine fonction, où il devient une véritable monnaie d'échange entre l'auteur et les spectateurs. Le dramaturge puise dans l'Antiquité (Amphitryon 38 en 1929, La guerre de Troie n'aura pas lieu en 1935, Électre en 1937), dans la Bible (Judith en 1931, Sodome et Gomorrhe en 1943), dans les légendes allemandes (Ondine en 1939), mais il se révèle aussi capable de créations originales (Intermezzo en 1933, La Folle de Chaillot représentée après sa mort en 1945).

Son théâtre, lieu privilégié des conflits, entre hommes et femmes, entre hommes et dieux,met en scène une vision tragique de l'homme, vision qui s'assombrit à partir d'Électre.

Le héros affronte un destin à l'image renouvelée, dont il est en grande partie responsable. L'ESSAYISTE Qu'il s'agisse du normalien ou du diplomate, Giraudoux était un homme plus sensible et plus généreux qu'il n'y paraît.Le dialogue dramatique suffirait à le prouver.

À côté de l'oeuvre littéraire à proprement parler, existe une oeuvretournée vers la réflexion critique ou théorique, vers la médiation (Les Cinq tentations de La Fontaine en 1938, Littérature en 1941, Racine en 1950).

Mais surtout grâce à son expérience diplomatique et à sa connaissance de la vie politique, Giraudoux se révèle capable d'une réflexion tournée vers la réalité sociale.

Pleins Pouvoirs (1939) et Sans Pouvoirs (posthume, 1946) témoignent de sa passion de l'humain, commune à toutes ses oeuvres. Le pessimisme de Giraudoux n'est jamais négatif parce qu'il comporte toujours une part essentielle de confiance etde lucidité, ce qu'il exprimait en ces termes dans Littérature : « Le sentiment de l'égalité complète, de l'association absolue avec toutes les races et espèces, morales ou physiques, c'est cela l'innocence ».. »