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L'OEUVRE DE TOUS : L'ENCYCLOPEDIE

Publié le 16/05/2011

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Le but d'une encyclopédie est de rassembler les connaissances éparses sur la surface de la terre ; d'en exposer le système général aux hommes avec qui nous vivons, et de le transmettre aux hommes qui viendront après nous ; afin que les travaux des siècles passés n'aient pas été des travaux Inutiles pour les siècles. succéderont ; que nos neveux, devenant plus Instruits, deviennent en même temps plus vertueux et plus heureux, et que nous ne mourions pas sans avoir bien mérité du genre humain. Ainsi Diderot définit-il son but dans l'article « Encyclopédie«. Il ajoute plus loin :

« il n'appartenait qu'à un siècle philosophe de tenter une encyclopédie ; (...) cet ouvrage demande partout plus de hardiesse dans l'esprit qu'on n'en a communément dans les siècles pusillanimes du goût. li faut tout examiner, tout remuer sans exception et sans ménagement «.

« Au départ elle ne fut rien de plus qu'une entreprise de librairie.

Elle devint bientôt une affaire politique d'importancenationale, et elle est restée l'une des aventures intellectuelles les plus importantes dans l'histoire de la culture.En 1745 le libraire Le Breton obtient un privilège pour publier la traduction de la Cyclopaedia de Chambers.

L'affairesuscitant un vif intérêt dans le public est reprise sur une base plus large.

Le Breton forme un syndicat de librairespour réunir plus de capitaux.

Il s'assure la collaboration de d'Alembert, savant déjà illustre, et de Diderot qui avaitfait ses preuves comme traducteur du dictionnaire de médecine de James.

En 1748 il prend un nouveau privilègepour une Encyclopédie qui ne sera plus seulement une traduction.En 1749 l'arrestation de Diderot 1 faillit ruiner l'entreprise.

Mais déjà des intérêts trop considérables étaient engagés,et certains dirigeants de l'appareil d'Etat lui-même, comme le comte d'Argenson, garde des Sceaux, firent libérerl'animateur de l'équipe.

L'année suivante parait le prospectus qui annonce la publication de huit volumes de discourset de six cents planches en deux volumes ; et en 1751 sort le premier tome tiré à plus de deux mille exemplaires.Mille quatre cents souscripteurs avaient été trouvés, malgré le prix élevé : 280 livres.Tout de suite l'Encyclopédie doit livrer sa première bataille.

Les Jésuites du Journal de Trévoux comprenant lecaractère subversif de l'oeuvre, la dénoncent avec acharnement : Un de ses collaborateurs pour les articles dethéologie, l'abbé do Prades, volt condamner la thèse qu'il a soutenue en Sorbonne, et est obligé de s'exiler.

En 1752,un arrêt du conseil du roi ordonne que les deux premiers volumes seront et demeureront supprimés.

Mais le directeurde la librairie, Malesherbes, l'homme qui devrait diriger la répression, protège l'Encyclopédie.

Si les prêtres de l'équipesont obligés de disparaitre, si d'Alembert ébranlé décide de ne plus s'occuper que de mathématiques, l'oeuvrereprend do plus belle, avec un nombre de souscripteurs accru.

Des correspondants bénévoles envoient des articles,et remplacent les défaillants.

Mme de Pompadour accorde sa protection, Voltaire fait une propagande active.

Malgréla guerre de pamphlets que lui font ses ennemis, l'Encyclopédie parait sans trop d'encombres jusqu'au tome Vil en1757 (article « Gythinne »).

Le plan initial était largement dépassé.

Quatre mille souscripteurs permettaient desréalisations plus vastes.Le 5 février 1757, c'est l'attentat da Damiens.

Une vague de répression s'abat sur les « livres tendancieux Lesécrivains au service du parti dévêt saisissent l'occasion pour renouveler leurs accusations de plagiat et d'impiété.Sous les coups, le front des encyclopédistes se lézarde.

D'Alembert prend peur ; Voltaire lui-même conseilled'abandonner l'entreprise ou de la poursuivre à l'étranger.

Rousseau rompt publiquement avec ses anciens amis àpropos do l'article « Genève » qui e déjà suscité des difficultés avec les pasteurs genevois.Au moment où Diderot va réussir à force d'énergie à resserrer les rangs dans son parti, parait le livre De l'Espritd'Helvétius.

Il est condamné pour matérialisme par le Conseil du roi, l'archevêque de Paris, la Sorbonne, le Parlement,le Pape.

Et l'Encyclopédie est enveloppée dans la condamnation.

La vente du dictionnaire est interdite et sonprivilège révoqué.

Puis un autre arrêt oblige les libraires à rembourser les souscripteurs (1759).Tout semblait perdu.

Les forces hostiles (Jésuites et Jansénistes), désunies partout ailleurs, avaient réalisé contrel'Encyclopédie une unité provisoire.

Elles disposaient à la cour de protections puissantes, autour de la reine et dudauphin.

Ce qui sauva l'entreprise, ce fut non seulement le courage de Diderot, mais l'appui de l'opinion.

De grosintérêts financiers, on l'a dit, étaient en jeu, et les libraires menaçaient de continuer l'impression hors de France, cequi eût été un désastre national.

Malesherbes se prêta 'à un compromis.

Les libraires, pour dédommager lessouscripteurs, publieraient ouvertement les planches, et imprimeraient clandestinement les volumes de discours quiseraient distribués en une seule fois.

Le gouvernement fermerait les yeux.

Ainsi fut fait, en dépit de tout.

En dépitdes attaques de Fréron qui lança une campagne pour prouver que l'Encyclopédie pillait les recueils d'estampes deRéaumur.

En dépit de celles de Palissot, dont la comédie Les Philosophes (1760) eut un vif succès.

Dans lapolémique qui suivit, l'encyclopédiste Morellet alla faire un séjour à la Bastille.L'équipe encyclopédiste avait enregistré des pertes : d'Alembert, Turgot, etc.

Voltaire n'envoyait plus d'articles.Diderot fit face à tout, et refusa de s'expatrier malgré les conseils de Voltaire.

Onze volumes de planches parurentde 1762 à 1772.

Et les dix derniers volumes de discours furent diffusés au début de 1766.Mais le coup le plus grave qui eût été porté contre l'Encyclopédie venait de Lo Breton lui-même.

Par peur de larépression, il avait censuré de son propre chef les articles de Diderot et de plusieurs de ses collaborateurs.

Diderotprotesta dans une lettre célèbre au libraire (1764).

Il évita un scandale public, resta solidaire des libraires quand unsouscripteur mécontent, Luneau de Boisjermain, intenta un procès (1769).

11 put constater à cette occasion leprestige de son oeuvre, car Luneau ne put entraîner que très peu de souscripteurs.

Mais Diderot était désespéré, etil garda le sentiment que par la faute de Le Breton l'Encyclopédie était une oeuvre ratée.

Lui-même ne voyait pastoute l'ampleur du succès.Quelle était la composition du groupe qui sous la direction de Diderot a mené l'Encyclopédie à son terme ?Diderot, dans l'article « Encyclopédie », dit qu'une telle entreprise ne peut s'exécuter que par «une société de gensde lettres et d'artistes (...) des hommes liés par l'intérêt général du genre humain et par un sentiment debienveillance réciproque ».

Ce doit donc être une oeuvre collective, désintéressée.

Si les libraires s'y sont enrichis,d'autres, comme Jaucourt, s'y sont ruinés, et Diderot n'en a jamais tiré que des revenus sans rapport avec le travailet les talents qu'il y avait consacrés.

Cette société de gens de lettres fut un véritable parti, uni pour l'action par unidéal.

La composition s'en est renouvelée avec le temps.

Au début on y trouve des savants, des amis personnels deDiderot, comme J.-J.

Rousseau, encore inconnu, des artisans qui collaborent à la description des « arts », et mêmedes prêtres, qui sont chargés des articles philosophiques.

Ces derniers disparaîtront après le scandale de l'abbé dePrades, et c'est Diderot lui-même qui s'occupera de l'histoire de la philosophie.

A mesure que s'avance l'entreprise,apparaissent de nouvelles collaborations, parfois éminentes.

Buffon donne le prestige de son nom.

La répression quifait partir les moins ardents ou les plus vulnérables, suscite de nouveaux dévouements.

Jaucourt, un médecininconnu, vient assurer un travail qui sera immense.

D'Holbach se charge de la métallurgie et de la minéralogie.

Lemédecin Bordeu, l'avocat Boucher d'Argis ; Marmontel, Morellet, Duclos, hommes de lettres, l'explorateur LaCondamine, Quesnay, le futur physiocrate, Turgot, le président de Brosses, et surtout Montesquieu et Voltairedonnent un lustre incomparable à l'équipe.

Jusqu'au bout, des signatures nouvelles viendront compenser lesdéfections.. »

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