Moderato Cantabiile
Publié le 16/12/2013
Extrait du document
«
II/ Le rejet des mœurs bourgeoises
A/ L'opposition entre deux univers
Nous voyons comment les paragraphes abordent sans transition les scènes se déroulant
dans le salon de réception et celles qui se passent dehors au sein d'un même paragraphe.
Par ce procédé, l'auteur nous permet de rentrer en contact avec le personnage, puisqu'il nous
semble suivre le fil de ses pensées et de ses sensations, malgré la présence d'une narration
externe.
Ce passage nous propose deux univers, nettement contrastés : l'intérieur bourgeois,
milieu fermé et confortable, où le mari d’Anne, représenté par le pronom « on » (l.
19/22/32/42/46/50/51/53/56/57/65), et ses invités se livrent à un rite social ; auquel s'oppose
la grève, milieu ouvert et naturel, rude et froid, où un homme se tient, solitaire.
B/ Une vision péjorative des femmes
L’ironie est réservée au rite de la réception mondaine.
L’utilisation de nombreuses figures de
styles mène à un rythme pompeux qui marque le cérémonial et qui sert à dénoncer le vide et la
superficialité qui se cache derrière le rituel.
Cette importance contraste avec l’insignifiance des
paroles échangées.
Les femmes autour de la table sont indifférenciées comme en témoignent
le nom collectif « femmes » (l.27/31) repris par le pronom personnel « elles » (l.27/32/33).
Ce
sont des marionnettes qui jouent la comédie qu'on leur a enseignée.
Leur seul rôle, défini à
l'avance, est celui d’épouse.
C'est une parodie de la sélection naturelle qui montre qu'Anne
Desbaresdes est complètement inadaptée à ce milieu.
La voracité des femmes, cette obscène
gloutonnerie qui aboutit à la « dévoration du canard » (l.53) a une dimension fortement
sexuelle.
C/ Le rejet d’Anne
-Nous ne pouvons passer a coté de la métaphore flagrante qui allie la bourgeoisie au canard à
l’orange qu’Anne refusera à trois reprises (l.40/41/64).
En effet, le contraste établi entre le
comportement d’Anne et celui des autres convives montre comment et combien Anne est
étrangère a ce rituel gastronomique auquel elle devrait participer comme le font son mari et
ses invités.
Le fait qu'Anne Desbaresdes ne participe pas à la voracité ambiante par son refus
de manger suffit à créer le malaise.
Le seul acte de ne pas manger du canard constitue un
acte de rébellion, même s'il est fait avec politesse : « Non, merci » (l.37) « je ne pourrais pas,
je m'en excuse » (l.43).
Cependant, nous pouvons observer que de l'autre côté, ce simple
geste constitue un acte répréhensible : « un temps très court, mais celui du scandale » (l.41).
La politesse domine les rapports, mais la critique est implicite, il faut trouver une excuse pour
sauver les apparences : « C’est peut-être cette fleur » (l.46).
Conclusion :
Anne pousse à son comble son infraction sociale puisqu’elle exhibe un érotisme indigne de la
bourgeoisie à laquelle elle appartient et dont elle rejettera l’ensemble de ses mœurs.
Ce
roman mêle étroitement deux thèmes de prédilection de Marguerite Duras : celui de l’amour,
que l’on retrouve dans presque tous ses romans tels que L’Amour , Hiroshima mon amour ou
encore Détruire dit-elle ; et de l’alcool, présent entre autres dans Le Ravissement de Lol V.
Stein ..
»
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