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Montrer la comparaison de deux oeuvres à votre choix que la littérature du XIXe siècle reflète plus complètement et plus fidèlement que la littérature classique la personnalité de l'écrivain

Publié le 15/02/2012

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La Lettre, les Mémoires requièrent la note personnelle. Nous connaissons aussi bien Retz, Saint-Simon, Mme de Sévigné et Mme de Maintenon que les mémorialistes et les épistoliers du XIXe siècle. Le théâtre ne nous paraît pas davantage désigné pour une telle démonstration. « Etre dramatique, a dit V. Hugo, c'est être les autres. « Comment prouver que le Cid reflete moins complètement, moins fidèlement la personnalité de Corneille qu'Hernani celle de Victor Hugo? D'ailleurs le mot oeuvre est extensible. Mieux vaut, croyons-nous, le prendre dans sa plus large acception. Au lieu de choisir une oeuvre particulière, un chef-d'oeuvre, nous nous arrêterons à une oeuvre d'ensemble, empruntée à chaque époque et appartenant à un même genre : l'oeuvre lyrique de Malherbe et l'oeuvre lyrique de Lamartine. C'est de 1605 à 1628 que paraissent les Poésies du premier, qui vont donner le ton au lyrisme classique durant deux siècles. C'est en 1820 qu'explosent les Méditations d'où procèdent le lyrisme romantique et une bonne partie de la poésie personnelle du XIXe siècle, raisons suffisantes - outre que « être lyrique, c'est être soi « - pour justifier notre choix.

« Sa monstrueuse vanite, qui s'etale dans sa correspondance (1), montre de temps a autre le bout du nez dans ses alexandrins coupes a l'hemistiche Les ouvrages communs vivent quelques annees, Ce que Malherbe ecrit dare eternellement, ou dans les octosyllabiques aussi connus Et trois ou quatre seulement, Au nombre desquels on me range, Peuvent donner une louange Qui demeure iternellement. Les vers de Malherbe ne nous apprennent rien de plus sur leur auteur. Tout le reste est d'une impersonnalite a peu pres absolue.

Tanta it para- phrase un psaume de David en strophes majestueuses et d'un lyrisme le moi est soigneusement banni; tantot, sous pretexte de consoler autrui, it developpe des lieux communs sur la mort : Li mort a des rigueurs a nulle autre pareilles....

'tantot it met a profit un evenement recent ou tout proche pour feliciter le Roi, souhaiter la bienvenue a la Reine, flatter un ministre; tant6t it prete la parole a une ville (Ostende) depuis plus de trois ans theatre de la guerre tantot it adresse au cieI une priere pour le roi allant en Limousin ou pour le Cardinal allant chatier les Rochellois.

Stances, sonnets, ballets, mascarades, chansons, epitaphes, epithalames, rendent tous le meme son anonyme.

Tout autre, quant au fond, eat pu signer ces vers; seule la facture permet de distinguer le rimeur impeccable.

A qui, a quoi attribuer cette impersonnalite presque totale? A du Vair, son ami, pretendent certains historiens; l'influence de ce philosophe stoi- cien et chretien aurait ete considerable sur le rude gentilhomme.

Et l'on cite des developpements sur la fatalito de la mort, tout a fait dans l'esprit du stoicisme.

Pent-etre a-t-il appris, a cette ecole herolque, l'art de ren- fermer en lui-meme ses emotions.

Mais nous savons, par la lettre plus haut citee, qu'il ne savait cacher sa douleur que dans ses vers.

On a explique autrement ce goat de l'objectivisme.

Ce n'etait pas pour se soulager lui- meme, dit-on, mais pour plaire a autrui qu'il rimait.

C'ette hypothese nous parait plus plausible.

Mais ii en est une troisieme qui pourrait bien etre la plus probable.

N'etait-ce pas par reaction contre le subjectivisme de l'ecole de Ronsard que Malherbe se defendait ainsi d'etaler son moi dans ses poe- sies? Bient6t Pascal reprochera a Montaigne de trop parler de lui dans ses u Essais 1, et declarera le < moi haissable Malherbe n'a-t-il pas ete choque de lire ces apologies oil, sous pretexte de se defendre contre les predicantereaux et ministreaux Ronsard nous conte par le menu ses journees, nous expose ses goats, ses predilections, ses aversions? Nous sommes portes a croire que cette derniere raison est la bonne, la decisive. Avec son temps, Malherbe s'oriente vers l'ideal classique, ami de l'universel, dedaigneux de l'individuel. **Sr De Malherbe a Lamartine nous faisons, dans le temps et dans notre his- toire litteraire, un bond enorme; nous passons du general au particulier, de l'objectif au subjectif.

Nous rencontrerons, apres Lamartine, un individua- lisme audacieux jusqu'a en etre choquant, mais déjà l'auteur des Medita- tions, tout en developpant des lieux communs, se met continuellement en scene. Ce n'est plus une dame quelconque que Lamartine célèbre a grand ren- f ort de vieux clichés.

S'il lui donne encore un nom conventionnel, nous percons aisement le pseudonyme.

Elvire, c'est Mme Charles, tandis que Ca- ritee, Glycere, Philis, sont des inconnues, voire des personnages fictifs. Caliste est la vicomtesse d'Auchy, mais les pauvretes que lui adresse son soupirant pourraient convenir a toute autre.

Des les premiers vers de Lamar- tine on sent, au contraire, un fremissement nouveau, la fibre personnelle vibre, et des accents qui ne trompent pas jaillissent d'un coeur vraiment (1) Ii ecrit a Balzae : Je ne cross pas qu'il y alt de quoi m'accuser de presomption quand je dirai qu'il faudrait qu'un homme vint de l'autre monde pour ne savoir pas qui je suis.

» Sa monstrueuse vanité, qui s'étale dans sa correspondance (1), montre de temps à autre le bout du nez dans ses alexandrins coupés à l'hémistiche : Les ouvrages communs vivent quelques années, Ce que Malherbe· écrit dure éternellement, ou dans les octosyllabiques aussi connus : Et trois ou quatre seulement, Au nombre desquels on me range,.

Peuvent donner une louange Qui demeure éternellement.

Les vers de Malherbe ne nous apprennent rien de plus sur leur auteur.

Tout le reste est d'une impersonnalité à peu près absolue.

Tantôt il para­ phrase un psaume de David en strophes majestueuses et d'un lyrisme d'où le moi est soigneusement banni; tantôt, sous prétexte de consoler autrui, il développe des lieux communs sur la mort : La mort a des rigueurs à nulle autre pareilles ....

, tantôt il met à profit un événement récent ou tout proche pour f'liciter le Roi, souhaiter la bienvenue à la Reine, flatter un ministre; tantôt il prête la parole à une ville (Ostende) depuis plus de trois ans « théâtre de la guerre »; tantôt il adresse au ciel une prière pour le roi allant en Limousin ou pour le Cardinal allant châtier les Rochellois.

Stances, sonnets, ballets, mascarades, chansons, épitaphes, épithalames, rendent tous le même son anonyme.

Tout autre, quant au fond, eût pu signer ces vers; seule la facture permet de distinguer le rimeur impeccable.

A qui, à q~oi attribuer cette impersonnalité presque totale? A du Vair, son ami, prétendent certains historiens; l'influence de ce philosophe stoï­ cien et chrétien aurait été considérable sur le rude gentilhomme.

Et l'on cite des développements sur la fatalité de la mort, tout à fait dans l'esprit du stoïcisme.

Peut-être a-t-il appris, à cette école héroïque, l'art de ren­ fermer en lui-même ses émotions.

Mais nous savons, par la lettre plus haut citée, qu'il ne savait cacher sa douleur que dans ses vers.

On a expliqué autrement ce goût de l'objectivisme.

Ce n'était pas pour se soulager lui­ même, dit-on, mais pour plaire à autrui qu'il rimait.

Cette hypothèse nous paraît plus plausible.

Mais il en est une troisième qui pourrait bien être la plus probable.

N'était-ce pas par réaction contre le subjectivisme de l'école de Ronsard que Malherbe se défendait ainsi d'étaler son moi dans ses poé­ sies? Bientôt Pascal reprochera à Montaigne de trop parler de lui dans ses «Essais » et déclarera le «moi haïssable ».

Malherbe n'a-t-il pas été choqué de lire ces apologies où, sous prétexte de se défendre contre les .. »

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