Devoir de Philosophie

On parle volontiers aujourd'hui de la responsabilité de l'écrivain. Comment faut-il entendre cette notion? Quelle étendue et quelles limites lui donneriez-vous ?

Publié le 17/01/2022

Extrait du document

...

« publier n'importe quoi.

Il y a des époques où une oeuvre est une mauvaise action, par exemple pendant l'Occupationoù, comme le remarque Sartre, beaucoup d'écrivains n'ont pas eu le courage de se taire et ont été responsablesd'oeuvres qui, en d'autres circonstances, auraient beaucoup moins engagé leur responsabilité.

Dans un même ordred'idées, un écrivain qui sent que le grand public n'est pas encore apte à le comprendre sera peut-être responsables'il cherche une diffusion prématurée: ainsi Stendhal dédiait son oeuvre aux happy few, prévenant nettement que le beylisme n'était pas accessible à tout le monde. 2 L'écrivain en outre est responsable d'une certaine authenticité de sa peinture.

Etant donné que de toute façon les sots et les faibles risquent de lire de travers, il est difficile de toujours penser à eux et il vaut mieux visertout de suite aux responsabilités les plus élevées, chercher au moins à ne pas tromper et présenter une peintureintégrale des questions et des problèmes de son temps.

Sartre écrit que Haubert et Goncourt sont responsablespersonnellement de la répression qui a suivi la Commune parce qu'ils n'ont pas écrit une ligne pour l'empêcher, ce quiest peut-être excessif, mais suggère bien que la responsabilité de l'écrivain est peut-être plus dans ce qu'il ne ditpas que dans ce qu'il dit.

En d'autres termes, un écrivain serait moins responsable de se tromper (ce qui arrive àtout le monde) que de masquer une partie de la vérité.

D'où cet impérieux besoin qu'éprouvent souvent desécrivains d'intervenir dans des questions qui, en apparence, ne sont pas les leurs, tels Voltaire intervenant dans lesaffaires Calas, Sirven et La Barre ; Hugo se dressant contre Napoléon III ; Zola intervenant dans l'affaire Dreyfus ; Gide se sentant responsable de certaines exploitations colonialistes s'il ne les dénonce pas et écrivant son Voyageau Congo.

En tout ceci apparaît le sentiment aigu de la responsabilité: certes, responsabilité n'est pas infaillibilitéet un écrivain ne peut pas être tenu pour responsable de toutes ses erreurs et inadvertances, mais au moins doit-il dire tout ce qu'il croit savoir. IV Discussion Montrer essentiellement que l'écrivain n'est pas le seul responsable.

Tout un public aussi est responsable. 1 Responsabilité du grand public.

Interprétation plus ou moins intelligente, plus ou moins généreuse qu'il fait des grandes oeuvres.

Un mauvais public appelle des artistes flatteurs et démagogues. 2 Responsabilité des professeurs et des critiques, bref de tous ceux qui forment le public.

Il faut apprendre à celui-ci à lire intelligemment les grandes oeuvres littéraires.

Un public qui ne demande aux auteurs que desémotions purement superficielles et sensuelles est responsable ainsi que ceux qui l'ont formé. Conclusion Malgré tout, la responsabilité de l'écrivain semble toujours plus grande parce qu'il peut, dans une certaine mesure,former son public, l'attirer à lui, faire appel par son art aux tendances les plus nobles de ses lecteurs.

Il est doncresponsable, d'une certaine manière, même de ses lecteurs.

Grandeur et misère de la condition d'écrivain: êtreresponsable de gens que l'on ne connaît pas ; il faut donc que l'artiste soit aussi sûr que possible de parler à cesgens le langage de leur temps, d'aller dans le sens des grandes questions ambiantes.

Ce point est très important:par exemple, un roman comme Les Liaisons dangereuses, qui peint des moeurs immorales, engage laresponsabilité de son auteur, non pas parce que ses peintures pourront exciter au vice (celui qui en tirerait unetelle leçon a l'esprit si faible ou si pervers que son cas est désespéré!), mais parce que Laclos laisse entendre, dufait même de la généralité inhérente à toute oeuvre d'art, que les moeurs immorales qu'il évoque sontreprésentatives d'un temps et d'un milieu.

S'il trompe son lecteur, il est responsable de faire passer pouruniverselles les moeurs d'un petit groupe de détraqués ; s'il dit vrai ce n'est pas lui qui est responsable, mais lemonde, la société, si bien qu'en dénonçant ces moeurs il fait plutôt oeuvre libératrice.

Au fond, la question de laresponsabilité se ramène en grande partie à la question de la vérité: il faut qu'un écrivain ne soit pas plusresponsable que ne l'est la réalité.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles