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Poésie et prostitution chez Baudelaire

Publié le 07/09/2013

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baudelaire

 

Quand Benjamin associe la technique de Baudelaire à celle

des« coups de main«, quand il compare l'usage des métaphores

et des allégories dans la poésie baudelairienne aux

moyens à la fois sûrs et discrets mis en oeuvre par les conspirateurs,

peut-être se souvient-il du passage de «Crépuscule

du soir« où Baudelaire écrit de la prostitution :

" Comme une fourmilière elle ouvre ses issues;

Partout elle se fraye un. occulte chemin,

Ainsi que l'ennemi qui tente un coup de main;,,

Cette double assimilation de la Poésie et de la Prostitution à

une technique des «coups de main« renvoie au lien qui unit

les deux, lien auquel Baudelaire lui-même a fait plusieurs fois

allusion dans ses Journaux intimes. Mais c'est dans son poème

en prose sur «Les Foules« qu'il a développé le plus amplement

cette relation :

«Le poète jouit de cet incomparable privilège, qu'il peut

à sa guise être lui-même et autrui. Comme ces âmes

errantes qui cherchent un corps, il entre, quand il veut,

dans le personnage de chacun. Pour lui seul, tout est

vacant; et si de certaines places paraissent lui être fermées,

c'est qu'à ses yeux elles ne valent pas la peine

d'être visitées.

Le promeneur solitaire et pensif tire une singulière

ivresse de cette universelle communion. Celui-là qui

épouse facilement la foule connaît des jouissances fiévreuses

dont seront éternellement privés l'égoïste, fermé

comme un coffre, et le paresseux, interné comme un

mollusque. Il adopte comme siennes toutes les professions,

toutes les joies et toutes les misères que la circonstance

lui présente.

Ce que les hommes nomment amour est bien petit,

bien restreint et bien faible, comparé à cette ineffable

orgie, à cette sainte prostitution de l'âme, qui se donne

tout entière, poésie et charité, à l'imprévu qui se montre,

à l'inconnu qui passe.«

Cette confession retentit comme une déclaration des nouveaux

droits et devoirs du poète. Celui-ci n'est plus l'élu qui a

le privilège de parler aux dieux, d'entendre leur message et

de le transmettre aux foules. Mêlé à la foule, il est devenu

«un simple mortel«.

Cependant il ne se fond pas au nombre pour s'oublier,

comme l'homme des foules de Poe, pour conjurer sa solitude,

mais pour la peupler, pour aiguiser la conscience de sa propre

identité. La solitude est la condition nécessaire de son génie

de visionnaire. Il s'est donné pour tâche de distinguer et de

déchiffrer les destins particuliers qui composent cette masse

apparemment homogène. Dans cette humanité redevenue

matière, rendue à la matière, il porte la flamme de l'esprit.

Naufragé de l'idéal, il s'est institué le sauveteur des vies perdues.

Il restaure dans leur unicité, leur intégrité et leur

dignité des êtres que la société de masse et de consommation

condamne à l'état d'objets manipulés à des fins mercantiles, à

l'état de marchandises.

baudelaire

« épouse facilement la foule connaît des jouissances fié­ vreuses dont seront éternellement privés l'égoïste, fermé comme un coffre, et le paresseux, interné comme un mollusque.

Il adopte comme siennes toutes les profes­ sions, toutes les joies et toutes les misères que la circons­ tance lui présente.

Ce que les hommes nomment amour est bien petit, bien restreint et bien faible, comparé à cette ineffable orgie, à cette sainte prostitution de l'âme, qui se donne tout entière, poésie et charité, à l'imprévu qui se mon­ tre, à l'inconnu qui passe.» Cette confession retentit comme une déclaration des nou­ veaux droits et devoirs du poète.

Celui-ci n'est plus l'élu qui a le privilège de parler aux dieux, d'entendre leur message et de le transmettre aux foules.

Mêlé à la foule, il est devenu «un simple mortel».

Cependant il ne se fond pas au nombre pour s'oublier, comme l'homme des foules de Poe, pour conjurer sa solitude, mais pour la peupler, pour aiguiser la conscience de sa propre identité.

La solitude est la condition nécessaire de son génie de visionnaire.

Il s'est donné pour tâche de distinguer et de déchiffrer les destins particuliers qui composent cette masse apparemment homogène.

Dans cette humanité redevenue matière, rendue à la matière, il porte la flamme de l'esprit.

Naufragé de l'idéal, il s'est institué le sauveteur des vies per­ dues.

Il restaure dans leur unicité, leur intégrité et leur dignité des êtres que la société de masse et de consommation condamne à l'état d'objets manipulés à des fins mercantiles, à l'état de marchandises.

Une thérapeutique de l'âme Ce serait faire injure à Baudelaire et le confondre avec Victor Hugo que de l'identifier à l'image d'un apôtre de l'humanité, d'un missionnaire du Progrès.

La finalité de la poésie n'est pas selon lui le Bien, mais le Beau.

Si le poète, déçu et rejeté par !'Idéal se tourne vers la foule de la grande ville, c'est. »

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