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Poètes français des XIXe et XXe siècles

Publié le 03/03/2011

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L'alexandrin a été la clef de voûte de l'édifice poétique français. La plupart des poèmes retenus sont basés sur ce vers de douze pieds où les « e « muets comptent comme pieds. Et beaucoup se coulent dans la forme du sonnet (deux quatrains et deux tercets). Romantiques, parnassiens et symbolistes usent de l'alexandrin et jouent de toutes les subtilités du rejet, de l'enjambement, voire des rimes riches, croisées ou enchâssées. Mais un tel modèle, même s'il se perpétue quelque peu au XXe siècle, a été contesté dès le milieu du XIXe siècle.   

« 3.

Le calligramme Certains poètes n'ont pas hésité à faire « éclater » les formes.

Échapper à l'alexandrin n'a dès lors plus consisté àfuir la rime et à trouver refuge dans la prose, mais à user d'une disposition typographique originale.

Fasciné parl'exemple de ses amis peintres — notamment les « cubistes » qui remettaient en question l'espace traditionnel —,Guillaume Apollinaire a créé le calligramme.

Les mots deviennent des dessins.

La lecture linéaire se voit contestée auprofit de certains effets d'optique.

La primauté du sens s'estompe au profit d'un jeu de formes, qui a chance à sontour de susciter des sens nouveaux.

On trouvera ainsi, à côté de calligrammes d'Apollinaire (« La petite auto », p.100 ; « Cœur couronne et miroir », p.

102), un poème optique de Cendrars (« OpOetic », pp.

103-104), et un poème«à disposition picturale» de Reverdy (« Nomade », p.

108). 2.

Les thèmes principaux 1.

Les thèmes éternels On a longtemps considéré que la poésie était, en dehors de son enveloppe formelle, l'expression de thèmes éternelscomme l'amour, la mort, la beauté.

Le romantisme a largement illustré ces thèmes, sous la plume de Lamartine,Vigny, Hugo, et même du premier Baudelaire.

Certains lieux étaient plus propices que d'autres à l'éclosion du «sentiment » poétique, comme les lacs, les hautes cimes montagneuses ou les forêts.

Un vocabulaire empreint desolennité et de noblesse ne pouvait faire défaut, au risque même de tomber dans l'emphase.

Ces thèmes dits «éternels » continuent d'alimenter toute poésie, mais ils ont parfois subi un gauchissement symbolique etprovocateur.

Ainsi, pour Baudelaire, la beauté peut émaner d'une « charogne », et, loin d'être associée à l'idée de «bien », elle se coalise avec le « mal » — cette « fleur » poétique nouvelle.

Quand Rimbaud célèbre, dans « Roman »(pp.

66-68) ses amours adolescentes, c'est sur un ton parodique.

Et Lautréamont trempe carrément sa plume dansle vitriol.

Il y a incontestablement, à la fin du XIXe siècle, une remise en question des thèmes éternels.

Maintspoètes sentent alors intuitivement que leur art repose moins sur des thèmes plus ou moins bien chantés que sur uneutilisation décapante du langage.

La poésie thématique s'estompe au profit de la « poéticité ». 2.

Le poétique Le linguiste Roman Jakobson (in Questions de poétique, Éd.

du Seuil) s'est efforcé de démontrer ce qui fait laspécificité d'un poème.

A ses yeux, un poème digne de ce nom place le lecteur en position de trouble.

Celui qui litles mots et les phrases du poème en saisit, certes, la signification au premier degré (comme dans les descriptionsdes romans traditionnels), mais il y perçoit une signification différente qui vient mettre en doute son approche duréel.

Sous la plume d'un poète, une « table » n'est pas seulement un espace sur lequel on peut écrire, mais elle peutentraîner vers l'idée de table d'opération, voire vers la « table des lois ».

Le véritable poème est polysémique.

Sousun sens premier, il cache des sens multiples, et parfois même des sens nouveaux.

La poésie, ce serait donc, ainsique le voulait Mallarmé, l'art de donner un sens nouveau aux « mots de la tribu ».

A côté du langage journalistiquequi s'use dans sa fonction purement inforrnative, le langage poétique revivifie les forces de contestation.

Le motdevient riche de virtualités insoupçonnées. La poésie perd ainsi ce côté « art d'agrément » dont Molière avait sarcastiquement fait ses délices dans LesFemmes savantes.

Elle devient désormais un art d'éveil contre la « rouille de la pensée ».

Mais si Mallarmé a vouluprovoquer son lecteur en usant d'un apparent hermétisme, beaucoup de ses successeurs ont préféré se servir del'arme de l'humour, comme Desnos, Tardieu ou Queneau pour qui l'essentiel est de conduire le lecteur sur les voiesde la démystification.

C'est alors un peu comme si le poème avait pour fonction de créer chez le lecteur un réflexecritique, une distanciation.

La poésie devient ainsi le fer de lance de la lutte contre les idéologies rampantes, elle setransforme en une dénonciation des ruses multiples dont se pare tout discours.

A ce niveau, le poétique rejointassurément le politique, mais pas la politique. 3.

Les pièges de l'engagement Les poètes ont souvent connu la tentation de l'engagement, et les romantiques — de Lamartine à Hugo — n'ont pasété à l'abri de cette tentation.

Pourtant, force est de constater que les poèmes les plus périssables sont ceux quiont voulu être à l'écoute de l'événement sans parvenir à le transcender.

La formule utilisée par Rimbaud dans sacélèbre « Lettre du voyant » mérite une fois de plus d'être rappelée : « La poésie ne rythmera plus l'action, elle seraen avant.

» Le poème ne saurait se contenter de décrire un événement, si dynamisant soit-il, ou de chanter uneidée, si noble qu'elle soit.

Loin d'être à l'écoute de ce qui se réalise, la poésie voit au-delà et trace le chemin d'unavenir toujours à redéfinir.

Ni injonction ni propagande, la poésie est utopie, dans le sens le plus noble de ce mot.Elle ouvre des avenues, elle offre des perspectives — toujours inattendues. 4.

Pour un lecteur nouveau Dès lors que la poésie sort de sa simple fonction de récitation scolaire (où elle est trop souvent cantonnée), elledevient une alliée pour le lecteur exigeant.

Si la poésie moderne est souvent jugée difficile, c'est qu'on n'a pastoujours de bons réflexes pour l'aborder.

La poésie du XXe siècle a perdu le caractère descriptif ou sentimental qui afait la fortune du romantisme.

Les poèmes d'un Tzara, d'un Michaux, d'un Ponge se font provocants, et ilsdemandent que nous aiguisions sur eux nos propres forces de provocation.

A la sacralisation du langage a succédé. »

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