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Racine et son oeuvre

Publié le 16/02/2011

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Guidé par les anciens et par son amour du naturel, Racine a consacré le genre tragique à l'étude des forces passionnelles; l'intérêt des situations, la vérité psychologique, la fidélité des tableaux historiques, l'harmonie du style concourent également à la beauté de ses pièces.    La carrière littéraire et mondaine de Racine a duré dix ans, du succès d'Andromaque (1667) à l'échec de Phèdre (1677).    Né à La Ferte-Milon, Jean Racine (1639-1699) fit trois années d'études aux Petites Écoles de Port-Royal où il acquit, en même temps qu'une forte éducation religieuse, une connaissance directe des lettres grecques. S'étant tourné vers la poésie dramatique, il connut une carrière mêlée de succès brillants et d'échecs très pénibles.    Après le désastre de Phèdre (1677), le découragement, des scrupules moraux, des raisons de famille le font renoncer au théâtre. Il est nommé historiographe du roi et ne compose plus que douze ans après ses deux tragédies pieuses Esther et Athalie, écrites à la prière de Mme de Maintenon. Il a laissé en prose un Abrégé de l'Histoire de Port-Royal. La nouveauté de son art et la vivacité de son caractère lui firent de nombreux ennemis, mais il eut d'illustres protecteurs (Colbert, Henriette d'Angleterre), posséda l'estime personnelle de Louis XIV et trouva en Boileau un ami judicieux et fidèle.    Racine offre l'exemple très rare d'un tempérament extrêmement nerveux dominé par une intelligence sereine et lumineuse ; son génie respire l'équilibre.    Ses chefs-d'œuvre, sauf les deux derniers, s'échelonnent sur une courte période :    • Andromaque (1667). Épisode consécutif à la guerre de Troie : Andromaque, veuve d'Hector, captive de Pyrrhus, veut sauver la vie de son enfant Astyanax.    • Les Plaideurs, comédie (1668). Imitation libre des Guêpes d'Aristophane. Amusante parodie des mœurs judiciaires : le plaideur Chicaneau, la comtesse de Pimbesche, l'avocat Petit-Jean, le juge Perrin Dandin.    • Britannicus (1669). Premiers crimes de Néron et disgrâce d'Agrippine : enlèvement de Junie, empoisonnement de Britannicus.    • Bérénice (1670). Reine de Judée répudiée par l'empereur Titus, invitus invitam (malgré lui, malgré elle).    • Bajazet (1672). Une « grande tuerie « dans un sérail au XVIIe siècle ; rôle impétueux et passionné de la sultane Roxane ; caractère du vizir Acomat.    • Mithridate (1673). Jalousie et guerres d'un vieux monarque oriental vaincu par les Romains ; rôle touchant de Monime.    • Iphigénie en Aulide (1674). Fille d'Agamemnon et de Clytemnestre sacrifiée avant le départ des Grecs pour Troie.    • Phèdre (1677). Aventure légendaire de la femme de Thésée, amante incestueuse de son beau-fils Hippolyte.    • Esther (1689). Délivrance du peuple Juif, grâce à l'intervention de la reine près d'Assuérus.    • Athalie (1691). Révolution dynastique et théocratique à Jérusalem ; mort de l'usurpatrice étrangère et proclamation du roi Joas.

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« Cela ne veut pas dire que l'action soit pauvre pour autant : au fond, les pièces de Racine sont aussi complexes quecelles de Corneille, mais leur complexité est d'ordre psychologique ; elles se développent par le jeu normal etréciproque des passions qui se précisent, s'accélèrent et se heurtent.

Tout est suspendu à la déterminationpassagère ou décisive d'un personnage principal, à ses sautes d'humeur, à son amour, à sa rancune. Véhémence des passions.

Cependant ces personnages n'agissent pas librement : Corneille qui voulait faire de lamorale exposait les démarches de la volonté ; Racine qui fait de la psychologie observe les mouvements du cœur,les impulsions aveugles de la nature. C'est la véhémence des passions qui est la marque spéciale de son théâtre.

Alors qu'en soi l'intrigue d'Andromaque,ou de Mithridate pourrait constituer le thème d'un vaudeville, ce qui différencie et élève le genre de Racine, c'estl'intensité des passions étudiées : au lieu de présenter, pour ainsi dire, « au ralenti » les réflexes anodins descaractères dans la vie courante, Racine les porte au paroxysme.

Poussés aux dernières limites, ilsdonnent lieu à des conséquences extrêmes et tragiques. L'application des règles et le développement de l'intrigue.

Au point de vue technique, et précisément parce qu'ilsubordonne tout à l'expression morale, Racine est l'auteur qui s'est le mieux accommodé de la régularité du genretragique : observation précise de la loi des trois unités, absence des décors, petit nombre de personnages. L'heureux emploi des confidents, l'apparition et la succession opportune des acteurs, l'art de ménager les situationstragiques et les moments d'espoir, la gradation de la terreur et de la pitié, souvent la soudaineté et l'horreur dudénouement montrent dans Racine une véritable maîtrise de dramaturge.

A cet égard les intrigues d'Andromaque(actes II et IV) et de Britannicus, la « pièce des connaisseurs » (avec les scènes violentes de l'acte III et lespéripéties morales de l'acte IV), sont particulièrement remarquables. Les tragédies passionnelles de Racine peignent surtout l'amour furieux et jaloux. Racine a donc surtout placé l'intérêt de ses pièces dans la peinture des mouvements de l'âme.

Si l'on excepteAthalie — pièce d'intérêt politique et religieux — la passion prédominante qu'il a représentée est l'amour, qui estd'ailleurs la plus mobile et la plus impétueuse des passions.

Parfois il l'a montrée sous forme élégiaque teintée degalanterie moderne avec Junie, Atalide, Monime, Iphigénie, Aricie, ou avec les soupirants courtois que sontBritannicus, Xipharès, etc.

Mais il a su également la représenter avec puissance et l'a peinte, incarnée depréférence dans des personnages féminins et portée à un degré d'impulsion violente, affranchie d'hésitations,souvent surexcitée par la jalousie et capable même de crime. Dans Andromaque, à côté de la veuve d'Hector, symbole émouvant d'affection conjugale et maternelle, nous voyonsHermione, l'amoureuse déçue, arrogante, égoïste, aux sentiments agités et fougueux : S'il ne meurt aujourd'hui, je puis l'aimer demain. Dans Bérénice, au contraire, c'est l'image de l'amour mélancolique et tendre qui ne peut se résigner sans unesurprise douloureuse à prononcer « pour jamais » l'adieu de séparation :Pour jamais! Ah! seigneur, songez-vous en vous-même Combien ce mot cruel est affreux quand on aime ? Dans Phèdre enfin, « c'est Vénus tout entière à sa proie attachée », c'est dans une femme malade, victime d'unehérédité funeste, une véritable « flamme » qui dévore les sens et annihile la conscience, et qui, par une suite fatale,surmontant le devoir, les convenances, l'honneur (« Seigneur, ma folle ardeur malgré moi se déclare »), en arrive auparjure et à l'homicide sans pouvoir étouffer les angoisses du remords : Hélas ! du crime affreux dont la honte me suitJamais mon triste cœur n'a recueilli le fruit. A côté de ces héroïnes, les personnages virils semblent tracés avec moins de relief.

Mais il y a une psychologieprofonde et sympathique dans l'étude d'Oreste, cet être sans volonté, amoindri par la souffrance morale, sombre etneurasthénique : « Je me livre en aveugle au destin qui m'entraîne.

» Il y a une vérité effrayante dans la descriptiondes mauvais instincts de Néron, le « monstre naissant », despote sensuel, cruel et peureux. Racine a peint également l'amour maternel, plaintif chez Andromaque, farouche chez Clytemnestre (« Venez, si vousl'osez, la ravir à sa mère! »), l'ambition féminine avec Agrippine, l'ambition masculine avec Agamemnon, l'énergieappuyée sur la foi chez Joad : Je crains Dieu, cher Abner, et n'ai point d'autre crainte ! Le décor historique est traité avec la même fidélité que la psychologie. Contrairement aux objections des amis de Corneille, Racine a été un grand peintre d'histoire.

S'inspirantheureusement d'Homère, de Tacite ou de la Bible pour projeter sur ses personnages le reflet d'une époque fameuse,Racine ajoute ainsi à leur prestige et à leur vérité.. »

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