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Roman de Rimbaud (commentaire)

Publié le 29/03/2011

Extrait du document

rimbaud

I On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ans. — Un beau soir, foin des bocks et de la limonade, Des cafés tapageurs aux lustres éclatants! — On va sous les tilleuls verts de la promenade. Les tilleuls sentent bon dans les bons soirs de juin! L'air est parfois si doux, qu'on ferme la paupière; Le vent chargé de bruits, — la ville n'est pas loin, — A des parfums de vigne et des parfums de bière... II — Voilà qu'on aperçoit un tout petit chiffon D'azur sombre, encadré d'une petite branche, Piqué d'une mauvaise étoile, qui se fond Avec de doux frissons, petite et toute blanche...

Nuit de juin! Dix-sept ans! — On se laisse griser. La sève est du Champagne et vous monte à la tête... On divague; on se sent aux lèvres un baiser Qui palpite là, comme une petite bête... III Le cœur fou Robinsonne à travers les romans, — Lorsque dans la clarté d'un pâle réverbère, Passe une demoiselle aux petits airs charmants, Sous l'ombre du faux-col effrayant de son père... Et, comme elle vous trouve immensément naïf\ Tout en faisant trotter ses petites bottines, Elle se tourne, alerte et d'un mouvement vif... — Sur vos lèvres alors meurent les cavatines1... IV Vous êtes amoureux. Loué jusqu'au mois d'août. Vous êtes amoureux. — Vos sonnets La font rire. Tous vos amis s'en vont, vous êtes mauvais goût. — Puis l'adorée, un soir, a daigné vous écrire!... — Ce soir-là, ... — vous rentrez aux cafés éclatants, Vous demandez des bocks ou de la limonade... — On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ans Et qu'on a des tilleuls verts sur la promenade. Rimbaud

Image rêveuse de l'adolescence, Roman fut peut-être en son temps, et est longtemps resté, une image de liberté : à l'adolescent penché sur ses livres, à l'image de l'écolier qui attendait pour connaître « la vraie vie «, il substituait un adolescent sollicité par les premiers désirs sensuels ; le texte assumait cette sensualité au lieu de la censurer. Mais Roman prend-il au sérieux cette image qu'il donne, ou la tourne-t-il en dérision, en se moquant de la naïveté et, finalement, du conformisme anti-conformiste de cette adolescence?

rimbaud

« servent-ils? Le « sérieux » du texte : le poème débute par la négation de ce sérieux.

Faut-il, dès lors, prendre le poème ausérieux? Est-ce une dérision de ce qu'on est quand on a dix-sept ans? De ce que sont les autres (parce que soi-même on a franchi le saut — et dans le cas de Rimbaud, comment?)? De l'idée que s'en font les « grandes personnes»? Ces questions n'ont aucun ordre, et sont évidemment très incomplètes.

Ce sont celles que le travail de préparationdu commentaire en classe avait permis de dégager, et qui semblent donc pouvoir venir à l'esprit des candidats... Utiliser les questions En relisant le texte à l'aide de ces premiers points de repère, on peut avancer.

(Je ne donne ici que les « résultats »de la première question, les autres résultats étant utilisés dans le commentaire proposé.) Le titre : renseignementexterne (mais tout de même trouvable!).

Roman = histoire d'amour (roman de Tristan, mais aussi roman de quatresous).

En même temps, sens plus moderne: histoire purement imaginaire, et qui ne tient pas debout.

Le retour dumot au pluriel (v.

17) suggère cette précision : les romans = les histoires qu'on a lues et aussi celles dont on rêve(intrigues amoureuses, aventures, émotions neuves ou fortes qu'évoque le verbe « robinsonner », ou qu'on invente). Propositions Essai d'introduction Image rêveuse de l'adolescence, Roman fut peut-être en son temps, et est longtemps resté, une image de liberté :à l'adolescent penché sur ses livres, à l'image de l'écolier qui attendait pour connaître « la vraie vie », il substituaitun adolescent sollicité par les premiers désirs sensuels ; le texte assumait cette sensualité au lieu de la censurer.Mais Roman prend-il au sérieux cette image qu'il donne, ou la tourne-t-il en dérision, en se moquant de la naïvetéet, finalement, du conformisme anti-conformiste de cette adolescence? 1) Littérature et expression de soi Par le choix de son titre, le poème se trouve placé sous le signe de la littérature, qu'il utilise sans cesse (le modèlede rédaction versifiée vient tout droit, par exemple, de Musset) et avec laquelle, en même temps, il rompt. Roman désigne une histoire imaginaire, et plutôt une histoire d'amour.

Et le poème bâtit en effet un roman, l'histoirede la naissance d'un amour.

Rien n'y manque : personnages, décor, rythme du récit, rêves qui se mêlent àl'intrigue...

et qui se nourrissent justement d'autres romans, de ceux dont il est question au vers 17, grâce auxquelsle cœur robinsonne (ne pas comprendre seulement : «vit les aventures de Robinson Crusoé»; l'expression s'estaffranchie de ses origines et renvoie ici à toute la littérature d'aventures) : partout dans ce poème les référencessont romanesques, parce que sans doute c'est dans les livres, par les livres, que se vivent les premières aventureset que le désir ou la sensualité s'éveillent pour la première fois.

Le poème prend son départ non à partir d'uneexpérience réelle, mais à partir des histoires que les livres racontent.

Et il est normal que, le véritable apprentissageune fois fait ou les vraies découvertes une fois accomplies, ce soit au texte littéraire qu'on les « confie ».

Ici aupoème Roman. C'est pourquoi les lieux, la manière de suggérer l'atmosphère de ces « soir de juin » sont empreints de conventions : — La nuit (plus «sentimentale» que le jour, c'est bien connu!); les tilleuls (à cause de leur parfum); juin (qui sentdéjà les vacances?, et qui voit sortir des jeunes filles...). — La sève comparée au Champagne et les émois sans cause et sans aboutissement. — Et même les sonnets — forme traditionnelle, mondaine, reçue, que le jeune homme écrit ! C'est pourquoi aussi le poème abonde en points de suspension : procédé romanesque pour suggérer une foule dechoses qu'on ne peut dire, puisque ces moments sont ineffables, etc. Mais ces références implicites ou explicites à la littérature ont dans le texte un autre effet : elles permettent lamoquerie, l'ironie, les sourires sur « l'aventure de ce soir de juin ».

« On » éprouve sans doute, mais « on » sait enmême temps qu'on n'éprouve qu'au travers de clichés, d'images reçues, etc., ce que Rimbaud, plus tard, appellera «la forme vieille », et qui « étrangle », selon lui, les poètes romantiques.

C'est pourquoi « on » joue, avec lesmajuscules (« vos sonnets La font rire ») ou avec les mots extrêmes utilisés dans les romans d'amour : « puis unsoir l'adorée a daigné vous écrire...

» Il y a ainsi dans le poème une mise à distance permanente, qui empêche deprendre le texte tout à fait au sérieux et qui fait rupture. 2) Authenticité et poésie Malgré l'ironie, le poème ne devient pas satirique 4.

Les références conventionnelles à la littérature ou aux lieux. »

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