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SÉNAC DE MEILHAN Gabriel : analyse et critique de l'oeuvre

Publié le 14/10/2018

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SÉNAC DE MEILHAN Gabriel (1736-1803). Écrivain, Sénac de Meilhan l’est à plusieurs titres : celui que Sainte-Beuve tenait pour un « grand esprit » (Causeries du lundi, tome X) fut tour à tour moraliste, critique, publiciste, polémiste, historien, poète et romancier. Ce fils d'un premier médecin de Louis XV avait commencé une importante carrière publique : maître des requêtes au parlement de Paris, intendant dans I’Aunis, puis en Provence (les allées de Meilhan, à Marseille, lui doivent leur nom), enfin dans le Hainaut, intendant général des armées, il est disgracié par Necker, qu’il attaque dans ses Considérations sur la richesse et le luxe en 1787, où il développe des thèses proches de celles de Turgot.

 

Il se consacre alors à la morale, sur le mode sceptique et ironique, dans les Considérations sur l'esprit et les mœurs (1787), qui semblent illustrer sa formulation personnelle du Si non e vero, e hene trovato : « Rien n’a jamais fait effet sur moi comme vrai, mais comme bien trouvé »; on peut recueillir au hasard des pensées comme : « L’amitié est à l’amour ce qu’une estampe est à un tableau », ou « La médiocrité en tout genre assure le bonheur », ou encore « Il semble que l’esprit des femmes n'ait pas assez de force pour ne s’attacher qu’aux choses. Elles y joignent presque toujours un objet sensible ».

« meurt.

Autour de cette in trigue, une gale rie de port ra its romp t heureusemen t le fil de ce tte insou tenab le tragédie en mont r ant les réac tions amusées des émig rés français devan t les pré jugés de la noblesse a llemande, en déc rivant les consé quences de la pauvreté sur le c o m por teme nt d es exi lés ai nsi que l es expédie nts qu' ils inventent po ur surv i­ vre tant bien que mal.

Dans cet ensemble d'ouvrages, Sénac de Meilhan développe une a nalyse des causes de la Révolu tion q ui vaut mieux que les diverses élucubrations de l'époque sur ce sujet: la Révolution procède d'u ne corruption des mœurs et d'un affaiblissement du pouvoir monarchique, miné parce que ses soutiens naturels ne respectaien t plus les pr incipes fondamentaux de son organisation sociale.

Sénac ne ret ient nullemen t l'hypothèse d'un complot machiavélique, ourdi par les Philosophes, les francs­ maço ns ou les orléan istes, et il accuse les ordres privilé­ giés d'avoi r creusé leur propre fosse.

«Le défaut de système, l'oubli des anciens principes, l'inattention à suivre, à saisir la marche de l'esprit hu mai n peuvent avoir des suites plus fatales q ue la plus violente tyran­ nie ...

» (Du gouvernement ...

).

De plus, Sénac aff irme le caractère irréve rs ible de la Révol ution, à la fois criminelle e t facteur de progrès : «Les Fra nçais [ ...

] ont détruit, mais ils on t en même temps creusé, porté la lumière dans les routes les plus obsc ures, et ils en ont ouvert de nouvelles et forcé les barrières élevées par le préjugé» (l'Émigré) .

On voit do n c que le roman se fait idéolog ique; cet aspect coexiste avec l'utilisation habile de conventions : lettres entre­ coupées de récits, ép isodes convenus dans une intrig ue sen timentale qui fait jouer deux sensibili t és, le bonheur contra rié, etc.

La pei nture des situations et des mentalités des émigrés organise a u tour de la figure centrale de Sa int-Alban tout un monde et permet ainsi la cons titution d'un type promis à une g ra nde fortune littéraire: l'émi­ gré q ui devient un paria.

Sénac de Meilhan est donc à l'origine d'une littéra ture d e l'exil, thème romantique par excellence , en écrivant un roma n senti mental en une prose élégante très fin du x vme ( « J'ai été, i 1 y a hu it jours, chez la Comtesse, que j'ai trouvée lisant Clarisse; elle la isse tout pour cette lec tu re, et a déjà passé plusieurs nu its entières, sans pou­ voir la quitter.

P erso nne n 'est plus digne de sentir le prix de cet ouvrage que l'aimable Victorine.

Rien n'échappe à son esp rit, rien ne ma nque son effet sur sou cœur » [le ttr e XLI X]).

On retrouve cette distinction dans les poésies érotiques qu 'on lui attribue et qui arborent les titres délicieusement évocateurs de Foutromanie, Fou ­ triade et Masturbomanie, priapées héro ï-corniques, qui paraissent bien pâles aujour d 'hui, mais qui témo ig n ent des gofits mul tipl es de ce po lygraphe lucide, nosta lgique d'une mona rchie éclairée, t émo in d'une transition qui ébauche le roman du moi, lui qui reprena i t P ascal dans ses Portraits: « L'égoïs_te est ridictùe, et le perso nnel hâissable ».

[Voir aussi E~llGRATIO N (littérature de 1')].

BffiLIOGRAPHIE Πuvres .

- L'Émigré, P léiade , Romancier s du xvm• siècle, vol.

II, 1965; la Table Ronde, 2 vo l.

Des principes et des causes de la Révolution en France, éd.

M .

Delon, Desjonquères, 1987.

A consult er.

- Henry A.

Sta v an, Sé11ac de Meilhan moraliste, romancier, homme de lettres, Minard,. »

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