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Souvenir de la nuit du 4 - Les Châtiments - Hugo

Publié le 04/10/2010

Extrait du document

hugo

Le poème dont ces vers sont extraits, est le noyau du second livre, intitulé: «L'ordre est rétabli «. Par la tragédie qu'il évoque, il souligne le caractère ironique d'un tel titre.

L'enfant avait reçu deux balles dans la tête.

Le logis était propre, humble, paisible, honnête; On voyait un rameau bénit sur un portrait.

Une vieille grand'mère était là qui pleurait.

Nous le déshabillions en silence. Sa bouche, Pâle, s'ouvrait; la mort noyait son oeil farouche ;

Ses bras pendants semblaient demander des appuis. Il avait dans sa poche une toupie en buis.

On pouvait mettre un doigt dans les trous de ses plaies.

Avez-vous vu saigner la mûre dans les haies?

Son crâne était ouvert comme un bois qui se fend. L'aïeule regarda déshabiller l'enfant,

Disant: — Comme il est blanc ! approchez donc la lampe ! Dieu! ses pauvres cheveux sont collés sur la tempe ! -

Et quand ce fut fini, le prit sur ses genoux. La nuit était lugubre; on entendait des coups De fusil dans la rue où l'on en tuait d'autres. — Il faut ensevelir l'enfant, dirent les nôtres,

Et l'on prit un drap blanc dans l'armoire en noyer.

L'aïeule cependant l'approchait du foyer

Comme pour réchauffer ses membres déjà roides. Hélas! ce que la mort touche de ses mains froides Ne se réchauffe plus aux foyers d'ici-bas!

Elle pencha la tête et lui tira ses bas,

Et dans ses vieilles mains prit les pieds du cadavre.

Jersey, août 1852.

 

 

Dans ce poème, Hugo fait le récit d'une veillée funèbre autour d'un enfant, tué lors de la répression du 4 décembre 1851, juste après le coup d'État de Louis-Napoléon Bonaparte. Dans les vingt-cinq premiers vers présentés ici, il restitue ce « souvenir «, effectivement authentique, avec un souci de réalisme que ne vient troubler aucun « effet « poétique ou rhétorique. Ce tableau, qui sera suivi par une complainte prononcée par la grand-mère de l'enfant (v. 26-48), puis par la réponse sarcastique du poète, est le premier moment d'un réquisitoire sans appel contre Napoléon III, qui oppose l'avidité de celui-ci au deuil des « vieilles grand'mères «.

hugo

« Un rythme morne.

Le poème est presque tout entier composé en parataxe, sans mots de transition.

Le retourlancinant des rimes suivies concourt à l'impression de calme. Le rythme même des alexandrins se fait prosaïque.

Dans la plupart des vers, la musique de l'alexandrin se trouve eneffet comme gommée par la place des accents et le jeu des e muets.

L'effet est particulièrement sensible au vers 2, où la présence de quatre e muets casse la cadence.

Au vers 14, Hugo avait d'abord écrit: « Ses cheveux par le sang sont collés sur sa tempe».

Dans la version définitive, il renonce à l'inversion poétique du complément d'agent et à la répartition trop équilibrée des accents (3-6-9-12). Dramatisation et pathétique retenus Le dernier poème du livre II, « À l'obéissance passive », évoquera de façon beaucoup plus directe la violence de larépression du 4 décembre ; ici l'au teur semble retenir son souffle, adoucir la scène décrite, pour mieux souligner par contraste la brutalité des événements de la rue. Une dramatisation discrète.

Dès le premier vers, la mort de l'enfant est posée comme inéluctable par l'usage du plus-que-parfait « avait reçu».

La majorité des verbes se trouvent ensuite à l'imparfait, accentuant la lenteur recueillie de l'action.

Le passé simple apparaît par petites touches, de même que le présent du style direct, pourmettre en valeur les gestes ou les paroles qui accompagnent la préparation du corps. La mention des tueries extérieures fait l'objet d'un rejet ( « on entendait / Des coups de fusil»), d'une sorte de mise en suspens qui maintient à distance les événements, déjà éloignés par le verbe qui les introduit: « on entendait».

La menace, même lointaine, de la répression, contribue à la pesanteur de l'atmosphère, et n'en paraît que plusredoutable. Le refus du pathos.

Malgré le réalisme des notations, Hugo atténue tout d'abord l'évocation du mort. L'enjambement expressif qui souligne le mouvement de la bouche ( «Sa bouche, / Pâle, s'ouvrait»), comme la précision « en silence», semblent faire de cette ouverture un dialogue muet entre l'enfant et sa grand'mère.

L'oeil du défunt est resté «farouche», comme vivant, ses « bras», qui demeurent sujet d'un verbe, semblent prêts à se mouvoir : l'enfant, toujours propriétaire de sa « toupie», semble prêt à jouer.

Enfin, le rapprochement des «M'aies» avec la mûre qu'on voit «saigner», et la comparaison du « crâne ouvert» avec le « bois qui se fend», tempèrent la description du blessé par l'évocation de la nature. Dans la dernière partie du texte (v.

21-25), cependant, la description devient plus brutale, avec notamment lamention des « membres déjà roides» et celle des «pieds du cadavre»: elle reflète ainsi dans son mouvement même, la lenteur des témoins à accepter cette mort scandaleuse. La disposition des personnages.

Le narrateur, qui n'apparaîtra en tant que tel que dans la troisième partie du poème, se trouve ici confondu avec les autres témoins de la scène dans un «nous» collectif, repris plus loin par « les nôtres», puis par le pronom « on».

Cet usage de l'indéfini permet de mettre en valeur les deux protagonistes, « l'aïeule» et. »

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