SUBLIMER SA SOUFFRANCE
Publié le 20/01/2020
Extrait du document
> QUESTION [4points]
Comparez les situations d’énonciation de ces trois poèmes : en quoi la mort concerne-t-elle chacun des locuteurs ?
> TRAVAIL D'ÉCRITURE [16 points]
I - Commentaire
Vous ferez le commentaire du texte de Guillaume Apollinaire (texte 2).
II - Dissertation
Vous vous demanderez dans quelle mesure la poésie permet le dépassement d’une épreuve. Vous vous appuierez sur les textes du corpus, ceux que vous avez étudiés en classe, et sur vos lectures personnelles.
III - Écrit d'invention
Vous écrirez un dialogue entre un interlocuteur qui pense que la poésie permet d’exprimer une expérience personnelle et un autre qui, au contraire, la critique en l’accusant d’être un travestissement, voire une trahison, de cette expérience.
>CORPUS
1. V. HUGO, « Demain, dès l’aube... », Les Contemplations, 1856.
2. G. APOLLINAIRE, « Si je mourais là-bas... », Poèmes à Lou, 1915.
3. P. DE RONSARD, «Je n’ai plus que les os... », Derniers Vers, 1586.
Le locuteur est directement confronté à la mort car il se trouve au « front de l’armée » (v. 1) et peut donc être tué à tous moments par un « obus ». Le champ lexical de la mort (« mourais, meurt, obus, sang, giclement »), abondant dans le poème, dit cette obsession et cette hantise d’être tué à la guerre. De nouveau, on peut penser que ce locuteur est Apollinaire lui-même, qui a été envoyé combattre au front durant la Première Guerre mondiale.
Enfin, le poème de Ronsard est lui aussi écrit à la première personne («Je n’ai... ») mais présente plusieurs destinataires. Le locuteur se peint sous les traits d’un cadavre en décomposition (« Je n’ai plus que les os »), totalement « dépouillé » (v. 9). Le premier destinataire du discours est le « Soleil » (« plaisant Soleil », v. 7). Il incarne la vie de laquelle le locuteur prend congé («Adieu »). Le second destinataire du discours est collectif (« vous ») : il s’agit des « compagnons », des « amis » du locuteur, qui lui sont « chers », et desquels le locuteur se trouve séparé par sa propre mort. Le locuteur est donc directement confronté à la mort en ce qu’il la vit dans sa chair : il décrit la décomposition de son propre corps (« Décharné, dénervé, démuselé, dépulpé »).
Ainsi, les trois locuteurs des poèmes sont concernés par la mort : ils ont soit perdu un être cher (texte 1), soit envisagent la mort comme leur avenir proche (texte 2), ou l’expérimentent dans leur chair (texte 3).
«
Polynésie, juin 2004
Il Texte 2: Guillaume APOLLINAIRE, Poèmes à Lou, 1915
Si je mourais là-bas sur le front de l'armée
Tu pleurerais un jour ô Lou ma bien-aimée
Et puis mon souvenir s'éteindrait comme meurt
Un obus éclatant sur le front de l'armée
5 Un bel obus sembable aux mimosas en fleur
Et puis ce souvenir éclaté dans !'espace
Couvrirait de mon sang le monde tout entier
La mer les monts les vals et l'étoile qui passe
Le soleil merveilleux mûrissant dans l'espace
JO Comme font les fruit d'or autour de Baratier 1
Souvenir oublié vivant dans toutes choses
Je rougirais le bout de tes jolis seins roses
Je rougirais ta bouche et tes cheveux sanglants
Tu ne vieillirais point toutes ces belles choses
15 Rajeuniraient toujours pour leurs destins galants
Le fatal giclement de mon sang sur le monde
Donnerait au soleil plus de vive clarté
Aux fleurs plus de couleur plus de vitesse à l'onde
Un amour inouï descendrait sur le monde
20 L'amant serait plus fort dans ton corps éclaté
Lou si je meurs là-bas souvenir qu'on oublie
Souviens-t'en quelquefois aux instants de folie
De jeunesse et d'amour et d'éclatante ardeur
Mon sang c'est la fontaine ardente du bonheur
25 Et sois la plus heureuse étant la plus jolie
Ô mon unique amour et ma grande folie
1.
Baratier: général français mort au combat en 1917.
Il Texte 3 : Pierre de RONSARD, Derniers Vers, 1586
Je n'ai plus que les os, un squelette je semble,
Décharné, dénervé, démuselé, dépulpé,
Que le trait 1 de la mort sans pardon a frappé,
Je n'ose voir mes bras que de peur je ne tremble.
23.
»
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