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THÉÂTRE

Publié le 14/10/2018

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THÉÂTRE. Les rapports entre littérature et théâtre sont évidents : cet ouvrage en témoigne sans cesse. Ceci explique la brièveté de cette note. On la complétera en consultant non seulement les articles consacrés aux auteurs qui ont écrit pour la scène, aux œuvres anonymes anciennes, mais surtout aux grands genres [voir Comédie, Drame, Mélodrame, Tragédie].

 

Il faut cependant rappeler que le statut du texte écrit pour la scène est très spécifique. Sa structure dénonciation est remarquable, puisque — mis à part les indications ou didascalies — tout y est, explicitement ou implicitement, à la « première personne ». Hormis les monologues, toute « pièce » est une succession — ou plutôt une mosaïque — de discours dont les énonciateurs alternent. Le texte théâtral est donc une forme essentiellement dialogique ou polylogique, dans une sémantique dénonciation fictivement directe, dans un simulacre d’oralité constante — sauf lorsqu’un personnage est

« censé lire ou réc iter, moments où intervi ent la reconnais­ sance de l'écrit - où toute phrase est une intention d'acte, inséré dan s le projet scénique e t spectac ulaire, projet appelant voix, espace, temporali té réell e et fictive, corps er décors- fût-ce le vide ou le mur nu -, appelant pour le s mots une reprise en charge mimétique et cathar­ tique, impliquant un public réel et réellement réuni- à la différen ce d'autres spectacles.

Mimé sis et catharsis: ces deux notions aristotélicien nes, pour peu qu'on veuille bien les ressourcer à leur origine et les élargir à tous leurs effet s, comma ndent et co ntinu ent de comman­ der le projet théâtral.

La sévère critique qu 'en ont faite des dramaturges contempo rains, tel Augusto Boa !, suffi­ rait à le mont re r.

Issu de la danse et du mime , le théâtre ne cesse de vouloir y retourner, contournant et congédiant l'encom ­ brant texte « littéraire».

Ce dernier , à certaines époques non lointaines , avait pu - pédagogie aidant - paraî tre son essence même.

Non sans contradictions.

Ainsi, qu'on ait pu, qu'on ait osé parler de« théâtre poétique » révèle qu'on voyait le théâtre hors de la poéticité, peut -être bors de la littér ari té, alors qu'on prétendait faire du texte écrit le seul axe stable du spectacl e th éâtral.

Ces temps ne sont plus.

La r estitution du discours théâtr al au projet scé nique nous est indispensable - on en trouvera ici maints exemples, notamment à propos d'auteurs que l'idéologie pé da gog ique avait ramenés avec le plu s de violence à l'état de texte, de discours, de Ji v re nu (Corneille ou Racine, comprimés par l'école).

Reste qu'on peut lire Mo li ère, Mari vaux, Claudel ou Beckett dès qu'on sait lire le français (et Shakespeare ou Schiller en tra duct ion ), alors que peu d'amateurs de musique sont aujourd'hui en état de «Lire » Bach (et même cette «musiq ue de papier » qu'est l'Art de la fugue ) ou Schoenberg.

Reste qu'on les lit en effe t, comme le montre la circulation du liv re de théâtre q ui est loin d'être co nfidentielle.

Si la v ie d ' une œuvre poétique, d'un roman du passé se renouvelle au fil d'innombrables lectures individuel ­ les, au prix d'une difficulté de lecture accrue par les siècles -au point qu'après avoir traduit les œuvres médiévale s, il faudra, il faut tradui re ou adapter les textes renaissants et class iques -, celle d'un e œuvre théâtra le est rythmée par bien d'autres cont rai ntes : ce11es que tisse nt les vision s de l'homme, les conceptions de l'es ­ pace, des rythmes et des timbr es vocaux (écouter Mou ­ net-Sully ou Sarah Bernhardt nous tire vers l'inco mpré ­ hensible passé plus en core que lire Charles d'Orléans); celles, techniques et complexes, de la « mi se en scène», qui fait d'une seu le œuvre une plur alité d'œuvres diffé­ rente s, parfois incomparables.

Ce phénomène est souve nt vécu dans l'inconscience - lorsqu'une tradition théâ ­ trale l 'empo rte et élim ine les autr es - ou bien dans le scandale réciproque : des traditions différentes se heur­ tent, interfèrent, attaquant et renouvelant un «texte » inamovible , inchangé, et à cause de ce la rendu étranger à lui-même.

Derrière ces révo lutions, derrière la vie ou Ja renais­ sance de spectacl es sans textes, de dialo gues improvisés (aujourd'hui enregistrables comme de la musique) résis te la « litt érature», la présence sourde d'un besoin d'« écriture» au sei n de 1' oralité recherchée - cc ne p eut être qu'une reconquête, la culture ayant perdu depuis longtemps le sens de la voix vive -au sein même du silence.

Les tematives pou r extirper le théâtre de la gangue d"éc rit où il s'étiolait mont rent par leur faible succès, par leurs comprom iss ions à toutes les modes de l' idéologie, que, dans notre culture au moins, c' était de la « litt éra­ rité» des grands textes que venait, avec la faiblesse et l'alanguissement du théâtre, sa force.

La dialectique théâtre-littérature, spectacle-écriture, altère ses d eux ter- mes, et pas seulement le premier.

Peut-être fallait-il rap­ peler ici que.

si le littéraire se défait sur scène, s ·il empê ­ tre le th éâtre, le théâ tre et la scène, par leur contestation, l'enrichisse nt.. »

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