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Un homme bon, en son obscure aspiration Demeure conscient de la bonne voie. Prologue dans le Ciel, Pari avec Méphisto - Le premier Faust de Goethe.

Publié le 01/04/2011

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faust

   Selon Wilhelm Scherer, l'historien allemand de la littérature « l'idée du Faust de Gœthe, ou, si l'on veut, sa morale — car le Faust a une morale comme une fable — est exprimée dans ces paroles du Prologue dans le Ciel et cette proposition se confirme à toutes les phases critiques de la pièce. «    Lorsque Scherer écrit cela, il a présent à la mémoire l'ensemble des deux Faust. Pour nous qui, tel le lecteur de 1808, ne connaissons encore que le premier, une question doit se poser, celle que le lecteur de 1808 devait se poser à la fin de la pièce : quel rapport doit être établi entre cette affirmation du Seigneur (son opinion certaine sur Faust) et la pièce telle qu'elle se développe dans la première partie de la tragédie ?   

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« universitaire.

Faust oscille de l'un à l'autre ; il doute — jusqu'au moment où la magie (ultime recours) lui permet decontempler face à face l'Esprit de la Terre.

Prélude d'acquisitions plus substantielles pour le but qu'il se propose,cette satisfaction demeure brève, l'Esprit le rejette, Faust retombe au désespoir.

L'Ecriture le guidera-t-elle, elle quiest Parole Divine ? De subtilité en subtilité, il en vient à la conclusion que l'alpha et l'oméga de toute chose estl'action.

Dans le brouillard de sa recherche, las, déçu, insatisfait, désemparé, bafoué par la plus grande des visionsqu'il ait pu souhaiter, il a songé à la mort : retourner au Tout, s'intégrer à lui, n'est-ce pas enfin connaître?Qu'advient-il alors de sa mission ? De sa bonté ? Car le suicide, n'est-ce pas le renoncement au droit chemin ? Et leshymnes divins delà Résurrection le rappellent à la rectitude. Dieu n'a-t-il pas dit : L'homme erre tant qu'il s'efforce et cherche ? N'a-t-il pas ajouté, après avoir livré Faust auDiable : Entre tous les esprits négateurs, c'est le Malin qui m'est le moins à charge.

L'activité de l'homme mollit tropaisément, il a vite fait de se complaire dans le repos absolu ; c'est pourquoi je lui adjoins volontiers ce compagnonqui aiguillonne et stimule... Aussi Méphisto peut-il maintenant entrer en action, contre et pour ce droit chemin que Faust a bien failliabandonner.

Ce démon n'est-il pas l'Esprit qui toujours veut le mal et toujours fait le bien ? N'est-il pas égalementl'obscurité qui crée la lumière ? Le pacte a eu lieu, il a été signé du sang de Faust.

Le savant Docteur ne sort pas de ses brumes, de la confusionde son aspiration : il précise pour Méphisto l'orientation d'une intuition toujours obscure et avide d'activitéhypothétique que celui-ci devra l'aider à clarifier.

Dans son humanité divine, il est fidèle à la conception de Dieu : ilne sera pas de ces hommes qui mollissent et se complaisent dans le repos absolu.

Car le crime, celui quihumainement et divinement entraîne la damnation, c'est-à-dire l'impossibilité d'atteindre au divin, c'est, pour Faustcomme pour Dieu, de se complaire en l'instant qui passe et de lui dire : arrête-toi, tu es trop beau...

Car cela, c'estrefuser de poursuivre le chemin, c'est s'arrêter dans une impasse : c'est cesser d'agir (Au commencement étaitl'action.) Ou bien Faust, même dans la brume, ne se laissera pas dérouter par son compagnon — ou bien Dieu et Faustperdront leur pari.

L'homme est-il, oui ou non, capable de ne pas abandonner la voie, droite selon les conceptionsdivines? Le Prologue sur la Terre est fini; nous connaissons Faust.

Il va entrer dans la vie active, par l'expérience de l'amour: c'est la Tragédie de Marguerite, la pièce commence. Sur cette terre où il doit se faire le pourvoyeur de la volonté faustienne d'activité, Méphisto a promis au savant delui faire connaître le petit et le grand monde.

Pour lui, le petit monde — celui qui a le plus souvent raison des âmes àdamner, celui qui damnait le Faust traditionnel — c'est le monde de la sensualité, le Faust gœthéen l'ignore : c'estun savant qui ne connaît guère que les joies de laboratoire et à la rigueur les plaisirs, rares, un jour de liberté, d'unepromenade à travers champs.

La sensualité basse, lourde, grossière n'est pas son élément.

Dans la Taverned'Auerbach comme dans la Cuisine de Sorcière, si Méphisto se sent en son élément dans l'ivrognerie ou l'obscénité,Faust, lui, est mal à son aise.

Ce n'est que la vue de la beauté féminine qui le peut enflammer.

Il n'est donc pasquestion d'abandonner la Quête, et de se complaire dans l'instant. Mais Faust, une fois rajeuni, Faust sentant couler dans ses veines le philtre qui lui ôte trente années de vie.

etl'enflamme pour Marguerite, ce Faust n'est-il pas mûr pour la tentation selon Méphisto et selon Dieu ? N'oubliera-t-ilpas, dans les joies ignorées et l'apaisement des sens enfin découverts, le but sublime de son existence? Le Diable lepense et agit dans ce sens, force obstinée visant à projeter Faust hors du droit chemin qu'est la quête.

Mais Faust,parti du désir, a abordé l'amour véritable; et même dans l'amour il est capable de renoncer au désir pour s'abîmerdans la contemplation de la nature.

Il faut que Méphisto l'aiguillonne pour qu'enfin il séduise Marguerite au sensphysique du mot.

Pourtant là, Faust n'a péché qu'au sens diabolique et humain, il n'a pas péché au sens divin duPrologue.

S'il jouit physiquement, il est torturé moralement, et reste fidèle à son contrat : Je me voue au vertige, àla jouissance la plus douloureuse, avait-il dit.

Alors — puisque c'est Méphisto qui est la force active, dont Faustn'est que la réaction — le Malin (ce ne peut être que lui) suscite la mort de la Mère, l'attaque et l'Assassinat deValentin, écarte Faust de Marguerite (parce que le criminel ne peut se montrer dans la ville où il a tué), et — car ilfaut que la tentation poursuive son cours jusqu'au bout — entraîne Faust au sabbat diabolique de la sensualitédéchaînée sur le Brocken au cours de la Sainte Walpurge.

Si la sensualité purement humaine, nids trop divinisée parla pureté d'amour de Gretchen, est inefficace, la sensualité diabolique aura sans doute raison de Faust. Mais non ! Méphisto s'est trompé.

Faust peut danser avec des sorcières, assister à leurs lubriques ébats; il n'enporte pas moins en lui le remords — non le regret : c'est sa fatalité d'aller et de chercher et d'entraîner avec lui lesautres dans la jouissance la plus douloureuse, — un remords qui a nom Marguerite, qui a nom l'amour et la faute enamour. On sait que pour Gœthe il n'y a « d'autre faute morale bien définie que celle-ci : attirer à soi, passionnément, uneautre âme dont on devient le centre et la raison d'être, puis l'abandonner, par légèreté, par fantaisie, par la peurdes chaînes, par un besoin de liberté qui est à la fois légitime et coupable et qui impose d'autres devoirs, en premierlieu celui de l'expiation...

» (G.

Bianquis).

Et cette faute qui est celle de Faust, comme elle a été souvent celle deGœthe, il la porte en lui comme une plaie, « non qu'il ne se sache pas d'excuse, mais le tragique est là justement : ilpèche et ne peut faire autrement, il se condamne et ne se repent point.

» (G.

Bianquis).

Mais du fait justement qu'il. »

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