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Une rencontre fatale. Manon Lescaut, l'Abbé Prévost

Publié le 06/07/2010

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J’avais dix-sept ans et j’achevais mes études de philosophie à Amiens où mes parents qui sont une des meilleures maison de P…, m’avaient envoyé. Je menais une vie si sage et si réglée que mes maîtres me proposaient pour l’exemple du collège.

J’avais marqué le temps de mon départ d’Amiens. Hélas ! Que ne le marquais-je pas un jour plus tôt !… J’aurais porté chez mon père toute mon innocence…

La veille même de celui que je devais quitter cette ville, étant à me promener avec mon ami Tiberge, nous vîmes arriver le coche d’Arras et nous le suivîmes jusqu’à l’hôtellerie où ces voitures descendent. Nous n’avions pas d’autre motif que la curiosité. Il en sortit quelques femmes qui se retirèrent aussitôt. Mais il en resta une, fort jeune, qui s’arrêta seule dans la cour, pendant qu’un homme d’un âge avancé, qui paraissait lui servir de conducteur, s’empressait pour lui faire tirer son équipage des paniers.

Elle me parut si charmante que moi, qui n’avais jamais pensé à la différence de sexes, ni regardé une fille avec un peu d’attention, moi, dis-je, dont tout le monde admirait la sagesse et la retenue, je me trouvais enflammé tout d’un coup jusqu’au transport. J’avais le défaut d’être excessivement timide et facile à déconcerter ; mais loin d’être arrêté par cette faiblesse, je m’avançais vers la maîtresse de mon cœur.

Quoiqu’elle fût encore moins âgée que moi, elle reçut mes politesses sans paraître embarrassée. Je lui demandais qui l’amenait à Amiens et si elle avait quelques personnes de connaissance. Elle me répondit ingénument qu’elle y était envoyée par ses parents pour être religieuse. L’amour me rendait si éclairé, depuis un moment qu’il était dans mon cœur, que je regardai ce dessein comme un coup mortel pour mes désirs. Je lui parlai d’une manière qui lui fit comprendre mes sentiments car elle était bien plus expérimentée que moi.

C’était donc malgré elle qu’on l’envoyait au couvent, pour arrêter sans doute son penchant au plaisir qui s’était déjà déclaré et qui a causé par la suite, tous ses malheurs et les miens. Je combattis la cruelle intention de ses parents par toutes les raisons que mon amour naissant et mon éloquence purent me suggérer. Elle n’affecta ni rigueur ni dédain. Elle me dit, après un moment de silence qu’elle ne prévoyait que trop qu’elle allait être malheureuse, mais que c’était apparemment la volonté du Ciel, puisqu’il ne lui laissait nul moyen de l’éviter. La douceur de ses regards, un air charmant de tristesse en prononçant ces paroles, ou plutôt, l’ascendant de ma destinée qui m’entraînait à ma perte, ne me permirent pas un moment de balancer sur ma réponse. Je l’assurai que, si elle voulait faire quelque fond sur mon honneur et sur la tendresse infinie qu’elle m’inspirait déjà, j’emploierais ma vie pour la délivrer de la tyrannie de ses parents et la rendre heureuse.

Je me suis étonné mille fois en y réfléchissant, d’où me venait alors tant de hardiesse et de facilité à m’exprimer ; mais on ne ferait pas une divinité de l’amour s’il n’opérait souvent des prodiges.

Objectif : Analyser le système de la narration propre au récit rétrospectif.

 

Au cours de l’un de ses voyages, le narrateur, le Marquis de Renoncour, rencontre à Calais un jeune homme dont le chagrin le frappe. C’est le Chevalier des Grieux qui va lui raconter sa propre histoire et celle de Manon.

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« 30 35 40 Séance 2 : UNE RENCONTRE FATALE . Manon Lescaut , l'Abbé Prévost- 1731 Objectif : Analyser le système de la narration propre au récit rétrospectif. Travail en autonomie après étude linéaire du texte (sert d'évaluation). 1/ Par qui cette scène est-elle rapportée ? Par qui est-elle vue ? Analysez les différentes fonctions des narrateurssuccessifs. La scène est rapportée par le Marquis de Renoncour auquel Des Grieux se confie. Elle est vue à travers les yeux de Des Grieux. Renoncour est le narrateur-relai (qui amène le deuxième narrateur) Des Grieux est le narrateur à la fois témoin et acteur: il a un double statut. 2/ Quel est le point de vue dominant ? (interne, externe, omniscient) Justifiez votre réponse. Le point de vue dominant est interne : tout est vu à travers les yeux de Des Grieux.

Il relate une histoire qu'il avécue et porte un jugement de valeur sur elle, un jugement empreint de subjectivité (voir les multiples qualificatifsrelatifs à Manon, à lui-même et aux conséquences de cette rencontre.) 3/ Quelles hypothèses les deux premières phrases du second paragraphe vous permettent-elles de faire sur la suitedu récit ? Le narrateur s'exclame « Hélas ! » et déplore que cette rencontre ait eu lieu.

A cet effet, il regrette de n'être pasparti un jour plus tôt d'Amiens, ce qui lui aurait évité bien des péripéties.. »

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