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VERLAINE: LE PROCES ET LA PRISON A MONS - STICKNEY ET BOURNEMOUTH - RETHEL - LUCIEN LETINOIS

Publié le 27/06/2011

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verlaine

La justice belge fut impitoyable. D'abord parce que le juge d'instruction avait saisi des lettres qui ne laissaient guère de doutes sur les relations des deux Français et qu'une expertise médicale confirma ses soupçons. Mais aussi parce que le magistrat vit en Verlaine un ancien Communard, un individu dangereux que les diverses polices surveillaient et dont il fallait protéger la société bourgeoise. Le 11 juillet, il fut transféré, en voiture cellulaire et menottes aux mains, à la prison des Petits- Carmes. Il subit ce jour-là son premier interrogatoire. Le 15, expertise médico-légale. Le 18, nouvel interrogatoire. Le 19, trop tard, Rimbaud renonce à toute action et se désiste de toute plainte. L'instruction se poursuit. L'inanité des premières accusations éclate. Impossible de retenir la préméditation et la tentative criminelle. On retient les coups et blessures ayant entraîné incapacité de travail. Le 8 août, Verlaine comparaît devant la 6e chambre du tribunal correctionnel. Il est condamné au maximum, deux ans de prison. Il fait appel. Le 27 août la sentence est confirmée. Il reste encore deux mois aux Petits-Carmes. Puis le 25 octobre, il est transféré à la prison de Mons. C'est là qu'il purgera le reste de sa peine.

verlaine

« est au contraire important de noter, c'est le double caractère que présente le catholicisme de Verlaine.

Il eut cecid'étonnant que cet homme malheureux et coupable alla tout de suite, tout droit et comme spontanément, au plusessentiel de l'esprit chrétien.

Il embrassa la doctrine de la Chute et de la Rédemption.

Il fut le pécheur qui du fondde son abjection élève sa prière vers le Christ qui rachète et qui purifie.

Plus tard le sentiment religieux revêtit desformes plus scolastiques, se figea en un dogmatisme parfois déplaisant.

Il fut, dans les premières années, admirablede force, de richesse, d'authenticité.Mais en même temps il signifia, pour Verlaine, une rupture avec le monde moderne.

Il y aura désormais en lui, etjusqu'à la fin, un prophète qui tonne contre cette société « abominable, pourrie, vile, sotte, orgueilleuse et damnée».

Rien n'échappera à ses anathèmes, la démocratie, la République, le suffrage universel, Victor Hugo, Flaubert etles Goncourt.

Autrefois, quand il était hébertiste, il eût volontiers coupé des têtes.

Maintenant il allumerait desbûchers.

Le fanatisme est le même.

Son journal, c'est l'Univers, et son maître à penser, c'est Joseph de Maistre.

LesOratoriens, Montalembert, Mgr Dupanloup sont de mauvais catholiques pour ce nouveau converti.

Il confond dansson zèle la cause de l'Église « qui a fait la France » et celle du parti légitimiste.Toute cette ardeur bien-pensante ne suffisait pas à faire illusion sur lui.

Les autorités pénitentiaires le jugeaientavec lucidité.

Elles notaient son caractère faible et disaient de sa moralité : « assez bonne » seulement.

Elless'inquiétaient de ne voir en lui nulle aptitude au travail.

De son amendement, elles pensaient qu'il était simplement «probable ».

Des démarches avaient été faites à Bruxelles pour obtenir une réduction de peine.

Elles furent inutiles.Verlaine ne dut qu'aux dispositions du règlement strictement appliquées une remise de 169 jours.

Il sortit de prison le16 janvier 1875. STICKNEY ET BOURNEMOUTH.

— Sa mère était à la porte qui l'attendait.

Elle l'emmena à Fampoux.

Il avait, enprison, formé le rêve d'une entreprise agricole.

Mais l'accueil, dans sa famille, fut réservé.

Lepelletier nous l'apprend,et Mathilde donne à son récit bien de la vraisemblance, car elle raconte que Victorine Dehée s'était rangée de soncôté et lui rapportait les projets de Verlaine.

Celui-ci rêvait toujours d'une réconciliation avec sa femme.

Il se rendità Paris et comprit vite qu'il n'avait rien à espérer.

Il songea peut-être à se faire trappiste.

Huit jours de retraite à laTrappe de Chimay lui firent mesurer son erreur.

Enfin il entreprit de convertir Rimbaud.

Il décida d'aller à Stuttgartpour le retrouver et le convaincre.

Il trouva un Rimbaud méconnaissable, correct, fureteur de bibliothèques,uniquement soucieux d'apprendre l'allemand, La rencontre se termina d'une façon qu'on sait mal.

On a parlé d'unepromenade hors de la ville, d'horions échangés, on a dit que des paysans trouvèrent dans un fossé Verlaine évanouiet qu'il resta couché chez eux plusieurs jours.

Mais ce récit s'accorde mal avec une lettre de Rimbaud : «Verlaineest resté deux jours et demi, et sur ma remons- tration, s'en est retourné à Paris, pour, de suite, aller finir d'étudierlà-bas dans l'île.

»C'est à ce dernier parti en effet que Verlaine s'arrêta.

Il arriva à Londres vers le 20 mars 1875.

Il descendit au 10 deLondon Street, Fitz Roy Square, à deux pas d'Howland Street.

Mais il n'avait pas l'intention de s'y attarder.

Ils'adressa à une agence.

Au bout de quelques jours il reçut avis qu'il y avait un poste pour lui à Stickney, dans leLincolnshire, à 13 kilomètres de Boston et à 200 au nord de Londres.

Il s'y rendit le 31 mars.Vingt ans plus tard il a raconté ses souvenirs des douze mois qu'il y passa.

On devine quelles inexactitudes ont puse glisser dans son récit.

D'excellentes recherches ont permis de les rectifier.

Dans ce paisible village de huit centshabitants il a laissé le souvenir d'un homme doux, patient et un peu triste.

Il assistait aux services anglicans dudimanche, mais le samedi il se levait de grand matin pour assister à la messe catholique de Boston.

Il passait sestemps libres en lectures et en longues promenades.

Sa conduite, disent les témoins, était parfaite.

A l'exceptiond'un seul qui le vit un jour, au retour de Boston, most gloriously tipt (fameusement éméché), tous sont d'accordpour dire qu'il ne buvait pas.

Le rector, Reverend Coltman, le jeune directeur de l'école, W.

Andrews, faisaient casde lui et ses élèves l'aimaient.Il n'était pas malheureux.

Il connaissait pour la première fois de sa vie le calme, le silence, la solitude dans la liberté.Il n'avait que de loin en loin des nouvelles de Paris et ne désirait pas pour le moment retourner en cette ville, liéepour lui à d'affreux souvenirs.

Quelques très rares amis restaient en correspondance avec lui.

Delahaye le tenait aucourant des voyages de Rimbaud et lui transmettait même quelques lettres de l'ancien compagnon.

Elles sontperdues.

Nous possédons une des réponses de Verlaine.

Elle est d'une sécheresse, d'un pharisaïsme prédicant etroublard qui laissent une impression navrante.

En revanche il s'était lié d'amitié, en avril 1875, avec GermainNouveau, qui avait été, un an plus tôt, le compagnon de Rimbaud, et qu'il fut heureux de ramener à la foichrétienne.Il n'avait pas renoncé à toute ambition.

Il lui fallait rétablir sa fortune, durement touchée par les folies récentes, etson poste de Stickney était trop mal payé.

Au mois d'octobre, il songeait déjà à partir dès qu'il aurait trouvé unesituation meilleure.

Le contrat de six mois qu'il avait souscrit expirait au milieu ou vers la fin de novembre.

W.Andrews le décida à rester jusqu'à Noël en lui promettant des conditions plus avantageuses.

Puis, une seconde fois,il accepta de prolonger son séjour.

Mais il cherchait ailleurs.

Il crut avoir trouvé.

On lui fit espérer qu'il vivrait àBoston en organisant des cours ou en donnant des leçons.

Vers le 1er avril il quitta donc ses amis de Stickney.

Maisà Boston, la déception fut grande.

Trois élèves seulement se présentèrent.

Il fallut chercher encore une fois autrechose.Le IER juin 1876 il quitta Boston et vint passer quelques semaines à Londres.

Il comptait y trouver un poste pourTannée scolaire suivante.

Il vint aussi en France, et peut-être poussa-t-il jusqu'à Paliseul, car Delahaye le vit àCharleville.

Sa santé était alors parfaite et son ami fut frappé de son nouvel aspect, corps nerveux et souple,jambes dansantes, esprit vif et délicieux.Au mois de septembre, il entra à l'Institution Saint-Aloysius de Bournemouth.

Le propriétaire-directeur s'appelaitFrederick Remington, mais le nom même de l'établissement prouve assez que les Jésuites y avaient la haute main.L'atmosphère n'était pas celle de Stickney.

Bournemouth est une ville élégante sur la côte sud de l'Angleterre.L'Institution Saint-Aloysius était petite, mais très sélect, et le prix de la pension était élevé.

Le directeur. »

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