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VERNE (Jules)

Publié le 21/05/2019

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verne

l'avertissement au lecteur qu'il donna en 1866 en préface aux Voyages et Aventures du capitaine Hatteras} et de l’adolescence (passion de l'inconnu et de la découverte, symbolisée par le message chiffré ; désir de liberté et de libération, incarné notamment par Mathias San-dorf ; aspiration vers le monde souterrain et intersidéral comme projection du désir intérieur). La technologie de plus en plus élaborée de Jules Verne est servie par des hommes dont l’intelligence et l'énergie frôlent sans cesse la folie et le désespoir (le capitaine Hatteras comme le mineur maudit des Indes noires, en 1877, sont des fous sans équivoque) ou, du moins, participent de l'« excentricité » (Phileas Fogg) ou de la solitude esthétique et destructrice (le capitaine Nemo). Aussi la tonalité de cette œuvre, lue souvent comme une prophétie scientifique et industrielle et comme un hymne au progrès, est-elle au fond singulièrement pessimiste (Un hivernage dans les glaces, 1855; Cïng Semaines en ballon, 1863 ; Voyage au centre de la Terre, 1864 ; De la Terre à la Lune, 1865 ; les Enfants du capitaine Grant, 1865 ; Vingt Mille Lieues sous les mers, 1869 ; le Tour du monde en quatre-vingts jours, 1872 ; Vile mystérieuse, 1874 ; Michel Strogoff, 1876 ; les Cinq Cents Millions de la bégum, 1879 ; Hobur le Conquérant, 1886 ; le Château des Carpathes, 1892 ; l'ile à hélice, 1895; le Sphinx des glaces, 1897; le Superbe Orénoque, 1898; Maître du monde, 1904 ; le Phare du bout du monde, 1905 ; VÉtonnante Aventure de la mission Barsac, 1919). Du moins vision inquiète, car le regard profond de Jules Verne n'est pas vraiment tourné vers l'avenir, mais vers l'intérieur.

 

C’est qu'au fond, comme le remarque M. Serres (Jouvences sur Jules Verne, 1974), la Terre est finie et l'âge des voyages aussi avec le cycle des Voyages extraordinaires (ce titre général apparaît, en faux titre, sur les livres de J. Verne dès novembre 1866). Le héros de Verne marche sur des traces : l'aventure vemienne n'est pas une Odyssée, mais une Télémachie. C'est d'abord en cela que les voyages de Verne sont des

 

voyages pour enfants. Suivant l'antique tradition du voyage littéraire (Rabelais, Fénelon), les Voyages extraordinaires sont des itinéraires pédagogiques : les enfants du capitaine Grant — comme le jeune Anacharsis que promène en Grèce l'abbé Barthélemy, comme aussi André et Julien que G. Bruno lancera dans un « Tour de France » qui sera le manuel de base de l'école de Jules Ferry — font plus le tour du savoir que du monde. Apprentissage et initiation. L'épopée vemienne est l'épopée du « voyage second », celui qui, succédant à l'exploration conquérante du navigateur ou du bâtiment d'empire, est le périple du savant : géologue, astronome. Le voyage de Verne, c'est le « grand tour » du cartographe qui s'acharne à donner une couleur spécifique aux taches blanches des mappemondes. Remplir les blancs de la carte, comme toutes les cases du savoir. Le voyage de Verne est un parcours encyclopédique, qui projette dans la fiction la « philosophie positive » d'Auguste Comte comme les dénombrements lexicographiques et techniques de Diderot. Le monde est à découvrir, c'est-à-dire à déchiffrer. Le monde est un livre à lire. Le monde est fait pour aboutir à un beau livre. Donc le monde est clos. Le devenir de l'humanité, une boucle. L'œuvre de Verne est « un cycle de cycles, au sens où Hegel prétendait que ('Encyclopédie est un cercle de cercles ». Le voyageur revient à son point de départ, riche de savoir et de sagesse ou fou, après avoir cherché un point « vélique » (le pôle, le centre de la Terre) au cœur d'espaces contradictoires (la ville souterraine et les soleils électriques des Indes noires; le volcan au milieu des glaces). Au bout du compte, au centre se tient Verne — et son lecteur. L'avancée linéaire, constante et orientée de la science se double ainsi d'un retour aux grandes « figures » obsessionnelles de l'humanité, toutes prêtes à resurgir dans un monde neuf : l'hymne au progrès rejoint le mythe, Arthur Gordon Pym (en 1864 Verne consacra dans le Musée des familles une analyse critique à « Edgar Poe et ses œuvres ») retrouve Livingstone, Nemo plonge dans l'in-

VERNE (Jules), écrivain français (Nantes 1828 - Amiens 1905). La vie de Jules Verne offre de grandes plages blanches mystérieuses comme celles des cartes de géographie de son temps qui fascinaient les explorateurs de ses romans. En face de banales études de droit (1847-1851), de vagues débuts dans le théâtre (secrétaire de Jules Seveste au Théâtre-Lyrique de 1852 à 1854, il écrira des livrets d'opérette, principalement en collaboration avec Aristide Hignard : Colin-Maillard en 1853, Monsieur de Chimpanzé en 1858, l'Auberge des Ardennes en 1860) et d'une carrière d'auteur à succès (qui débute avec sa participation en 1864 au Magasin d'éducation et de récréation d'Hetzel), sillonnant les mers sur ses yachts toujours plus magnifiques mais sous l'unique invocation de « Saint-Michel », on note deux crises : une fugue à onze ans sur un voilier la Coralie, partant pour les Indes (il voulait, dira-t-il à son père qui le rattrapa à Paimbœuf et lui administra une correction exemplaire, aller chercher « un collier de corail pour Caroline », sa cousine) ; un coup de revolver que lui tire, en mars 1886, son neveu préféré et qui le laissera boiteux.

 

Mais sa légende, qui à la fois l’aplatit en écrivain pour enfants et fait de Verne l'auteur le plus traduit de toutes les littératures, ignore le diagnostic de Pierre Louÿs, qui voyait en lui un « révolutionnaire souterrain ». Père présumé de la science-fiction, bien que ses anticipations soient plutôt des rêves d'ingénieur que de savant, Verne trouva dans son contrat avec Hetzel un terrain propre à cultiver ses fantasmes qui se trouvent être, pour une bonne part, ceux de l'enfance (l'éditeur en était parfaitement conscient comme en témoigne

verne

« l'avertissement au lecteur qu'il donna en 1866 en prl!face aux Voyages et Aven· tures du capitaine Hatteras) et de l'ader lescence (passion de l'inconnu et de la découverte, symbolisée par Je message chiffré ; désir de liberté et de libération.

incarné notamment par Mathias San· dorf; aspiration vers le monde souter· rain et intersidéral comme projection du désir intérieur).

La technologie de plus en plus élaborée de Jules Verne est servie par des hommes dont l'intelli· gence et l'énergie frôlent sans cesse la folie et le désespoir (le capi tain e Hatt e· ras comme Je mineur maudit des Indes noires, en 1877, sont des fous sans équivoque) ou, du moins, participent de l'« excentricité " (Phileas Fogg) ou de la solitude es th étiqu e et destructrice (le capitaine Nemo).

Aussi la tonalité de cette œuvre, lue souvent comme une prophétie scientifique et indu strielle et comme un hymne au progrès.

est·elle au fond singulièrement pessimiste (Un hivernage dans les glaces, 1855; Cinq Semaines en ballon, 1863; Voyage au centre de la Terre, 1864; De la Terre à la Lune, 1865; les Enfants du capitaine Grant, 1865; Vingt Mille Lieues sous les mers, 1869; le Tour du monde en quatre-vingts jours, 1872; l'Ile mysté· rieuse, 1874 ; Michel Strogoff, 1876 ; les Cinq Cents Millions de la bégum, 1879; Robur le Conquérant, 1886; le Chtlteau des Carpathes, 1892 ; l'Ile à hélice, 1895; le Sphinx des glaces.

1897; le Superbe Orénoque, 1898; MaUre du monde, 1904; le Phare du bout du monde, 1905; l'Étonnante Aventure de la mission Barsac, 1919).

Du moins vision inquiète, car le regard profond de Jules Verne n'est pas vraiment tourné vers l'avenir, mais vers l'intérieur.

C'est qu'au fond, comme le remarque M.

Serres (Jouvences sur Jules Verne, 1974), la Terre est finie et l'âge des voyages aussi avec le cycle des Voyages extraordinaires (ce titre général appa­ raît, en faux titre, sur les livres de J.

Verne dès novembre 1866).

Le héros de Verne marche sur des traces : l'aven· ture vernienne n'est pas une Odyssée.

mais une Télémachie.

C'est d'abord en cela que les voyages de Verne sont des voyages pour enfants.

Suivant l'antique tradition du voyage littéraire (Rabelais, Fénelon), les Voyages extraordinaires sont des itinéraire s pédagogiques : les enfants du capitaine Grant -comme le jeune Anacharsis que promène en Grèce l'abbé Barthél emy, comme aussi André et Julien que G.

Bruno lancera dans un. »

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