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VERRIERES - LE ROUGE ET LE NOIR DE STENDHAL (Analyse du roman)

Publié le 14/03/2011

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L'action commence aux dernières années de la Restauration, dans une petite ville de la Franche-Comté, pittoresquement située à flanc de coteau, au-dessus du Doubs, et que l'auteur nomme Verrières. Le nom est fictif. Verrières n'en ressemble pas moins à toutes ces petites villes qu'au temps de Louis XIV déjà, La Bruyère avait si joliment décrites d'un trait de plume, et où la vie se passe à se jalouser, à s'épier ou s'espionner les uns les autres. Mais sous le règne de Charles X et de la Congrégation, cet espionnage et ces jalousies sont plus âpres que jamais. Il ne suffit pas aux royalistes de faire la guerre aux libéraux; ils se la font entre eux, se disputant les places, les honneurs, la protection de la préfecture et de l'évêché.    A peine entre-t-on dans la ville que l'on est étourdi par le fracas d'une machine bruyante et terrible en apparence. Vingt marteaux pesants, et retombant avec un bruit qui fait trembler le pavé, sont élevés par une roue que l'eau du torrent fait mouvoir. Chacun de ces marteaux fabrique chaque jour je ne sais combien de milliers de clous. Ce sont des jeunes filles fraîches et jolies qui présentent aux coups de ces marteaux énormes les petits morceaux de fer qui sont rapidement transformés en clous. Ce travail, si rude en apparence, est un de ceux qui étonnent le plus le voyageur qui pénètre pour la première fois dans les montagnes qui séparent la France de l'Helvétie. Si, en entrant à Verrières, le voyageur demande à qui appartient cette belle fabrique de clous qui assourdit les gens qui montent la Grande-Rue, on lui répond avec un accent traînard : « Eh ! elle est à M. le maire «.

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« annonçait plus de légèreté que de vigueur.

Dès sa première jeunesse, son air extrêmement pensif et sa grandepâleur avaient donné l'idée à son père qu'il ne vivrait pas, ou qu'il vivrait pour être une charge à sa famille.

Objet dumépris de tous à la maison, il haïssait son père et sa mère; dans les jeux du dimanche, sur la place publique, il étaittoujours battu. Sous cet air pensif, sous cette « figure de jeune fille », se cache une âme ardente, farouche, l'âme d'un révolté.Naturellement sensible et tendre, mais condamné à vivre parmi des êtres grossiers qui le méprisaient pour safaiblesse et abusaient de leur force pour le rudoyer, il s'est replié sur lui-même et n'a vécu jusqu'ici que d'une vieimaginaire.

Un vieux chirurgien-major, un survivant des grandes guerres, s'est intéressé à lui, lui a donné un peud'instruction, lui a appris le latin, et, en mourant, lui a légué ses livres, — trente ou quarante volumes, entre autresles œuvres de Jean-Jacques Rousseau, les bulletins de la grande armée, et le Mémorial de Sainte-Hélène.

Sonadolescence s'en est nourrie, ou plutôt enivrée; des ambitions lui sont venues.

Il rêve de s'élever au-dessus de sacondition, d'arriver très haut.

Il est intelligent et capable de vouloir.

Grisé de récits épiques, il eût voulu être unsoldat de Napoléon.

Mais il sait que les temps ne sont plus où un enfant du peuple pouvait gagner sur les champs debataille un bâton de maréchal ou un titre de duc ou de prince, qu'à présent l'Eglise est toute puissante, et qu'onvoit des prêtres de quarante ans avoir cent mille francs de rente.

La couleur qui symbolisait la fortune a changé : lerouge du sang et des uniformes guerriers a fait place au noir de la soutane.

Il s'est donc promis d'être prêtre,quoique rien ne répugne plus à sa nature passionnée, et que pour lui la religion ne soit que fourberie et momerie.

Ils'est fait fourbe lui-même; il est allé trouver le bon vieil abbé Chélan, lui a déclaré son intention d'entrer auséminaire, a reçu de lui des leçons de théologie, et, ayant une mémoire étonnante, a achevé de gagner ses bonnesgrâces en apprenant par cœur tout le Nouveau Testament en latin. Son père, avec qui M.

de Rénal vient de causer, se met à sa recherche, et le découvre dans la scierie, à cheval surune des pièces de la toiture, le Mémorial de Sainte-Hélène à la main. Un coup violent fit voler dans le ruisseau le livre que tenait Julien ; un second coup aussi violent donné sur la tête,en forme de calotte, lui fit perdre l'équilibre.

Il allait tomber à douze à quinze pieds plus bas, au milieu des leviers dela machine en action qui l'eussent brisé, mais son père le retint de la main gauche comme il tombait... — Réponds-moi sans mentir, lui cria aux oreilles la voix dure du vieux paysan, tandis que sa main le retournaitcomme la main d'un enfant retourne un soldat de plomb.

Les grands yeux noirs et remplis de larmes de Julien setrouvèrent en face des petits yeux gris du vieux charpentier, qui avâit l'air de vouloir lire jusqu'au fond de son âme. — Réponds-moi sans mentir, si tu le peux chien de lizard; d'où connais-tu Mme de Rénal ? quand lui as-tu parlé ? — Je ne lui ai jamais parlé, répondit Julien, je n'ai jamais vu cette dame qu'à l'église. — Mais tu l'auras regardée, vilain effronté ? — Jamais ! Vous savez qu'à l'église je ne vois que Dieu, ajouta Julien avec un petit air hypocrite, tout propre, selonlui, à éloigner le retour des taloches. — Il y a pourtant quelque chose là-dessous, répliqua le paysan malin, et il se tut un instant ; mais je ne saurai riende toi, maudit hypocrite.

Au fait, je vais être délivré de toi, et ma scie n'en ira que mieux.

Tu as gagné M.

le curé outout autre, qui t'a procuré une belle place.

Va faire ton paquet, et je te mènerai chez M.

de Rénal, où tu serasprécepteur des enfants. — Qu'aurai-je pour cela ? — La nourriture, l'habillement et trois cents francs de gages. — Je ne veux pas être domestique. — Animal, qui te parle d'être domestique ? est-ce que je voudrais que mon fils fût domestique ? — Mais avec qui mangerai-je ? Rassuré sur ces deux points qui sont pour lui de première importance, il se laisse aller au plaisir de se figurer « cequ'il verra dans la belle maison deM.

de Rénal.

Il va donc vivre sur un pied d'égalité avec les personnes les plus considérées de la ville ! — Dieu sait, maudit paresseux, lui dit le lendemain son père après un nouvel et décisif entretien avec M.

de Rénal, situ auras jamais assez d'honneur pour me payer le prix de ta nourriture que j'avance depuis tant d'années ! Prendstes guenilles, et va-t-en chez M.

le maire. Il se hâte de partir.

Chemin faisant, il juge qu'il peut être « utile à son hypocrisie » de se montrer à l'église.

Il ypénètre. Il la trouva sombre et solitaire.

A l'occasion d'une fête, toutes les croisées de l'édifice avaient été couvertes. »

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