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XVIe siècle : culture et sagesse, grâce à la connaissance du monde

Publié le 03/03/2011

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Montaigne écrit dans ses Essais (Livre I, chapitre 26, De institution des enfants) : «(1) Il se tire une merveilleuse clarté, pour le jugement humain, de la fréquentation du monde. (2) Nous sommes tous contraints et amoncelés en nous, et avons la vue raccourcie à la longueur de notre nez. (3) On demandait à Socrate d'où il était. (4) Il ne répondit pas : d'Athènes; mais : du monde. (5) Lui, qui avait son imagination plus pleine et plus étendue, embrassait l'univers comme sa ville, jetait ses connaissances, sa société et ses affections à tout le genre humain, non pas comme nous qui ne regardons que sous nous. (6) Quand les vignes gèlent en mon village, mon prêtre en argumente l'ire de Dieu sur la race humaine. (7) A voir nos guerres civiles, qui ne crie que cette machine se bouleverse et que le jour du jugement nous prend au collet, sans s'aviser que plusieurs pires choses se sont vues et que les dix mille parts du monde ne laissent pas de (se donner) le bon temps cependant. (8) A qui il grêle sur la tête, tout l'hémisphère semble être en tempête et orage... (9) Nous sommes insensiblement tous en cette erreur : erreur de grandes suite et préjudice... (10) Mais qui se présente, comme dans un tableau, cette grande image de notre mère Nature en son entière majesté, qui lit en son visage une si générale et constante variété, qui se remarque là-dedans, et non soy mais tout un royaume, comme un trait d'une pointe très délicate : celui-là seul estime les choses selon leur juste grandeur. « Vous dégagerez de ce texte plein d'humour et de poésie quelques-uns des traits permanents de l'esprit de Montaigne, tels que la largeur de vue, le sens de la relativité, la paisible sagesse de l'humaniste et sa confiance dans l'ordre universel. Étude du texte I L'idée maîtresse apparaît nettement à la première lecture : il faut connaître le monde pour juger des choses non à l'échelle de nous-mêmes et de notre village, mais de l'Univers.

II Une seconde lecture fait sentir les articulations du texte qui opère surtout par oppositions : 1 phrases (1) et (2) : l'idée générale; 2 phrases (3), (4), (5) : le bon exemple de Socrate; 3 phrases (6), (7), (8), (9) : par contraste, Terreur des voisins et concitoyens de Montaigne et par extension de tous les hommes; 4 phrase (10) : la place d'un homme dans la nature, vue par le sage.

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« de la phrase. Analyse du libellé Il y a d'abord deux mots difficiles.

C'est relativité (« fait qu'une chose ne se conçoit pas isolée, mais par rapport àune autre ») : on vous demande donc de montrer comment Montaigne sait apprécier justement les choses parceque son expérience et sa culture lui permettent de les comparer entre elles et de déterminer leur vraie valeur.Humaniste fait aussi difficulté : s'agit-il du sens historique ou du sens général? Vous pouvez ici concilier les deux, car si le sens historique implique l'effort pour le savant du XVIe siècle d'assimilerla culture antique, c'est pour l'intégrer à la vie et développer, grâce à elle, les qualités essentielles de l'homme,développement qu'implique le sens actuel.

Une seconde difficulté du libellé, c'est qu'il contient un qualificatif pleind'humour et de poésie qui est en réalité une discrète invitation à étudier la forme.

Il y a là aussi deux mots difficiles: humour, qu'un dictionnaire vous définira en gros par deux aspects : mise en valeur d'une certaine absurdité;détachement souriant (ce qui diffère de l'engagement passionné de l'ironie); et poésie, terme très vague, qu'il fautprendre ici dans son sens le plus général, et qui implique une certaine présentation des choses qui nous fait sortir duréel et, au lieu de nous proposer simplement des idées, nous suggère par le style un état d'âme.

Vous pensez alors àla dernière phrase. Questions pour la recherche des idées FEUILLE 1 : La largeur de vue de Montaigne : a) les mots qui la suggèrent? b) en quoi consiste-t-elle? FEUILLE 2 : Le sens de la relativité : a) comment Montaigne enseigne-t-il à juger les choses par comparaison? b)par quels procédés souligne-t-il cet enseignement? FEUILLE 3 : L'humanisme : a) l'information? b) comment ce texte peut-il rendre l'homme plus humain? c) sa valeurpour l'éducation? d) en quoi consiste la sagesse? e) en quoi est-elle paisible? FEUILLE 4 : La confiance en l'ordre universel : a) sur quoi repose-t-elle ? b) quels mots ou procédés de stylel'expriment-ils? c) d'autres passages des Essais témoignent-ils du même sentiment? FEUILLE 5 : L'humour : a) la mise en valeur de l'absurdité; b) le sourire : vocabulaire, images, expressions familières,choix des détails? FEUILLE 6 : La poésie : rythme et autres procédés de la dernière phrase.

FEUILLE 1 : a) La largeur de vue de Montaigne est suggérée par les mots qui évoquent la vision de l'Univers dansson ensemble (ex.

monde, univers, etc.), l'homme dans sa généralité (jugement humain, genre humain), unmouvement ou un cadre qui s'élargit (embrassait, jetait à, etc., comme dans un tableau, etc.), des adjectifs commeentière, grande, générale, constante, etc.

b) Elle consiste à s'élever du local à l'universel, du contingent aupermanent.

Montaigne nous suggère cela : 1 par la variété des exemples qu'il donne; 2 par une opposition constanteentre l'erreur et la bonne attitude; et, à l'intérieur de chaque phrase, par des antithèses entre le particulier et legénéral, l'étroit et l'immense. FEUILLE 2 : Le sens de la relativité est une des conquêtes de la culture de Montaigne, et une des bases de saphilosophie, puisqu'il en tire à la fois une leçon de tolérance, et un fondement pour une sagesse qui consiste à sedétacher de soi et de son milieu étroit pour s'élever jusqu'à l'homme et à la vision de l'Univers, a) Il nous enseigne àjuger les choses par comparaison en rapprochant le particulier du général pour les opposer : on voit ainsi la vanitédes conclusions qu'on tire d'une vue trop braquée sur l'accidentel ou le local, b) D'où le procédé essentiel de Yantithèse qui varie rythmiquement selon les phrases. FEUILLE 3 : L'humanisme apparaît : a) dans le souci de connaître tout ce qui est humain : dans le temps (Socrate),dans l'espace (autres pays, autres mœurs), b) Il vise à rendre l'homme plus humain en formant le jugement, qualitéessentielle d'une tête bien faite, puisque l'information nous permet de juger en tenant compte de toutes les donnéesde la question, sans dogmatisme étroit, c) D'où sa valeur pour l'éducation, dont le but n'est pas d'emplir l'esprit,mais de lui apprendre à discerner le vrai, d) Mais l'humanisme enseigne aussi à être tolérant et à sortir de l'égoïsme.Il permet surtout de s'apercevoir que la plupart des malheurs sont particuliers (6), (7), (8) et, somme toute, peuimportants dans l'ordre universel, e) Cette sagesse est paisible parce qu'elle nous donne un moyen de dominer nospassions et nos maux, de sortir de notre individu pour accéder à l'homme en général, et de constater que, de par lemonde, le bien d'ailleurs compense le mal d'ici. FEUILLE 4 : D'où une confiance en l'ordre universel qui : a) repose sur l'idée que la nature, c'est-à-dire la puissanceémanée de Dieu et qui nous a formés, ne peut l'avoir fait que pour le bien; b) s'exprime surtout dans la dernièrephrase par des mots comme mère (amour), constante et entière majesté (respect), et un rythme grave et serein(cf.

p.

187).

c) C'est là un thème essentiel des Essais, surtout à partir du livre III : il faut accepter la nature et lasuivre.. »

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