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Bergson: Le talent du peintre

Publié le 19/04/2005

Extrait du document

bergson
Le portrait achevé s'explique par la physionomie du modèle, par la nature de l'artiste, par les couleurs délayées sur la palette ; mais, même avec la connaissance de ce qui l'explique, personne, pas même l'artiste, n'eût pu prévoir exactement ce que serait le portrait, car le prédire eût été le produire exactement ce que serait le portrait, car le prédire eût été le produire avant qu'il fût produit, hypothèse absurde qui se détruit elle-même. Ainsi pour les moments de notre vie, dont nous sommes les artisans. Chacun d'eux est une espèce de création. Et de même que le talent du peintre se forme ou se déforme, en tout cas se modifie, sous l'influence même des oeuvres qu'il produit, ainsi chacun de nos états, en même temps qu'il sort de nous, modifie notre personne, étant la forme nouvelle que nous venons de nous donner. On a donc raison de dire que ce que nous faisons dépend de ce que nous sommes ; mais il faut ajouter que nous sommes, dans une certaine mesure, ce que nous faisons et que nous nous créons continuellement nous-mêmes. » Bergson

Problème:

Comment nous créer nous-mêmes sans pour autant être déterminés par notre nature ou par l'imprévisibilité de nos actes ? Il s'agit de comprendre comment se forme notre être: n'est-il que la stricte réalisation de notre nature, auquel cas nous serions prédéfinis, ou bien nous réalisons-nous au hasard de nos actes, de façon imprévisible ? Quelle place accorder à la liberté dans la construction de soi ?

Thèse:

Pour Bergson, il faut combiner ces deux démarches. Nous nous créons aussi bien à partir de notre nature qu'à partir de nos actes. Notre être engendre certains actes, mais ceux-ci ont une part d'imprévisibilité qui pourra, en retour, venir enrichir notre être. Ainsi nous ne sommes ni absolument déterminés, ni soumis au hasard. Nous nous créons nous-mêmes librement, à la manière d'un artiste créant une oeuvre.

 

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« angoissée et angoissante du monde culminera dans sa peinture expressionniste.

Cette seconde cause fournit uneexplication subjective de la création artistique.Et enfin, "les couleurs", c'est ici le versant objectif de la création: les procédés picturaux, l'étendue de la palette,les matériaux utilisées, les techniques que l'artiste emploie et qui semblent introduire une prévisibilité de la créationartistique.Toutefois, l'oeuvre n'est pas totalement explicable par ces trois causes.

Quelque chose en elle n'est pas explicable.Un "je-ne-sais-quoi" d'indéterminé, qu'aucune explication rationnelle et savante ne saurait rendre compte.Ces trois causes ne sont que des conditions nécessaires à la réalisation mais n'en demeurent pas moinsinsuffisantes.

Par exemple, ce n'est pas l'enfance de Léonard de Vinci, ni la beauté du modèle qui peuvent permettred'expliquer à eux seuls la beauté de la Joconde.Pour démontrer l'imprévisibilité de l'oeuvre d'art, Bergson affirme qu'elle se fait au fur et à mesure de sa réalisation etnon en amont.

En ce sens, une oeuvre ne sera jamais réductible à une production technique qui elle est toujours lefruit de la réalisation préalable d'un plan.

Ici Bergson retrouve une idée développée par Sartre dans "L'existentialismeest un humanisme":"Lorsqu'on considère un objet fabriqué, comme par exemple un livre ou un coupe-papier, cetobjet a été fabriqué par un artisan qui s'est inspiré d'un concept; il s'est référé au concept de coupe-papier, etégalement à une technique de production préalable qui fait partie du concept, et qui est au fond une recette.

Ainsi,le coupe-papier est à la fois un objet qui se produit d'une certaine manière et qui, d'autre part, a une utilité définie,et on ne peut pas supposer un homme qui produirait un coupe-papier sans savoir à quoi l'objet va servir."L'oeuvre ne peut être prévue avant d'être produite de même qu'elle n'est pas présent dans l'esprit de l'artiste avantque d'être créée.

Sans quoi, elle ne serait plus une oeuvre unique et originale.A la ligne 6, Bergson dresse une analogie entre notre propre création et celle de l'artiste en faisant de chacun denous des "artisans".

Bergson retrouve-t-il ici Nietzsche et sa célèbre injonction: "Faire de sa vie une oeuvre d'art" ?Les moments cruciaux de notre existence sont pour une part déterminés mais d'autre part totalement imprévisibles.Notre être les détermine, comme la "nature de l'artiste" influence forcément l'oeuvre.

Mais ils ne sont pas que cela,et la vie les façonne aussi sans que nous puissions les prévoir totalement.Notre trajectoire d'existence ne peut donc être connue à l'avance.

L'existence procède de choix indécidables. Deuxième partie: Bergson reprend l'exemple de l'artiste.

Son oeuvre est déterminée par lui mais puisqu'elle est en partie imprévisible,elle pourra apporter quelque chose à son auteur.

Son talent, sa vision du monde pourra se former, se réformer, sedéformer en fonction de réalisation ratées, avortées ou réussies.A la ligne 7, Bergson reprend sa comparaison pour montrer que nous aussi nous pouvons changer à partir de ce quenous avons créé, à partir de nos "états".

Par exemple, une personne courageuse par nature fera "sortir" d'elle mêmeun état courageux engendrant un acte héroïque.

Mais cet acte n'étant pas la stricte reproduction de son couragenaturel, il pourra, par ce qu'il ajoute d'imprévu et d'imprévisible au départ, rejaillir sur la personne courageuse et lamodifier en la renforçant ou en l'affaiblissant dans son courage. Troisième partie: Ainsi il faut bien comprendre notre création comme le résultat, jamais définitif, d'un mouvement réciproque allant denotre être à nos actes et de nos actes à notre être.

L'un influence les seconds qui eux mêmes influencent ànouveau le premier.C'est la vie même qui rend nos actes imprévisibles et qui nous fait échapper au déterminisme imposé par notrenature, notre être de base, ce que nous sommes d'abord.. »

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