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L'expérience accroît-elle notre connaissance ?

Publié le 28/01/2004

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En effet, elle ne semble pas s'imposer dans la pratique courante, dans l'expérience quotidienne de la vie, où nous usons d'autres critères de réussite et d'efficacité.La perception sensorielle, l'expérience, sont-elles les garanties fiables ou exclusives de la vérité ? La vérité a-t-elle besoin de preuves pour être vérité ? Ne risque-t-on pas de confondre certitude et vérité ? La vérité intervient dans notre existence la plus quotidienne, même si elle reste en elle-même un sujet d'interrogations, même si elle semble parfois nous empêcher d'agir. Nous ne pouvons en produire une définition rationnelle précise, néanmoins nous l'apercevons souvent au détour de préoccupations qui semblaient l'exclure. On s'accorde en général à définir la vérité comme une concordance ou une conformité : de la pensée avec elle-même, de la pensée avec les choses, du réel avec l'idéal, autant de rapports qui peuvent coïncider ou s'opposer.La problématique de la connaissance, quant à elle, met plus spécialement en jeu le rapport entre l'esprit et les choses. Ce rapport est moins simple qu'il n'y paraît lorsque l'on prend conscience de la diversité des éléments qu'une telle connaissance implique, en particulier des articulations complémentaires ou conflictuelles entre les concepts et les sensations, l'imagination et les sentiments. Nous pouvons aimer, craindre, ou imaginer le réel.

« la place d'un Socrate en sage-femme qui fait accoucher les idées déjà en soi à un esclave, il s'agit peut-être depréférer le feu du réel qui explose face à nous et nous fait accoucher d'affects assez forts pour nous détourner.L'expérience cruciale serait alors, à l'échelle d'une vie humaine, une maïeutique affective qui nous détourne pour debon, le feu d'artifice qui permet à cette larme d'enfin couler.

La volonté ne suffit pas: c'est la phrase du malheureuxpris dans les remous de l'existence, dans la dépression.

La raison ne suffit pas, l'expérience seule devient décisivepour extérioriser une connaissance unique, précieuse: enfin savoir ce que nous sommes, savoir ce que nouspouvons, savoir où nous devons aller.

Contre Flaubert à qui Nietzsche reproché d'être un « cul de plomb », entendant par-là un penseur assis et vissé à sa chaise, il faut penser en marchant, sentir le réel comme un appel às'extérioriser. Habitude et induction II. Nous avons évoqué l'idée, lors de notre introduction, qu'avoir de l'expérience reviendrait à épouser par son esprit lesrépétitions inlassables d'une réalité sans surprise.

Avoir de l'expérience, c'est savoir à la longue comment les chosesse passent.

En somme, s'y entendre c'est s'y attendre, c'est déjà avoir le regard dirigé vers ce qui est susceptiblede se présenter.

Mais pourquoi notre expérience aurait une valeur objective ou universelle? Qu'est-ce qui nousprouve que nous ne sombrons pas dans le relatif, soit qu'à partir d'une seule expérience, ou de quelques unes nousne généralisons pas un peu trop hâtivement? Dans son Enquête sur l'entendement humain , Hume se demande ce qui fonde ce type de raisonnement (très utilisé dans la pratique scientifique d'alors), à savoir le raisonnement inductif.L'induction consiste, à partir d'un certains nombres de cas constatés, à généraliser leur propriété à l'ensemble descas non observés.

Par exemple, j'ai vu un, puis deux, puis trois, (...) corbeaux noirs, et j'en déduis à partir de cenombre de cas qu'ils sont tous noirs.

D'un point de vue logique, ce type de raisonnement est injustifiable.

On peut,pour illustrer cette invalidité logique s'en référer à l'épistémologue Hempel et son paradoxe de la confirmation . Hempel nous dit que ce type de généralisation universelle, de la forme « tous les A sont B » est logiquement équivalent à ce que l'on appelle en logique sa contraposée qui est de la forme « Tous les non-B sont non-A ». Prenons un exemple pour illustrer ce formalisme logique du type: (x) [f(x) g(x)] ≡ (x) [~f(x) ~g(x)] 1 Ainsi, il est équivalent de dire que 'tous les corbeaux sont noirs' et que 'tous les objets qui ne sont pas noirs sontdes objets qui ne sont pas des corbeaux'.

De ce fait – et c'est ici le paradoxe – on peut dire que, l'observation d'unobjet quelconque qui n'est ni noir ni un corbeau ne confirme pas seulement l'énoncé selon lequel tous les objetsnon-noirs sont des non-corbeaux, mais également l'hypothèse logiquement équivalente selon laquelle tous lescorbeaux sont noirs.

L'observation de la régularité avec laquelle notre expérience nous montre des objets qui sontdes non-corbeaux non-noirs semble nous donner le droit d'inférer que tous les corbeaux sont noirs! Hume pressent bien avant Hempel qu'aucune justification logique ne peut venir à l'appui de l'induction.

Pour lui, leraisonnement inductif tire sa force d'une réalité toute psychologique.

Dans ses raisonnements, nous dit Hume« l'esprit doit être entraîné par un autre principe égal en poids et en autorité » , et ce principe, c'est ce qu'il nomme l'accoutumance (custom ).

A force d'observer la répétition régulière de certains événements, ceci laisse une trace dans ma mémoire.

J'observe par exemple qu'à chaque fois que j'approche mes doigts du feu je suis brûlé, etprogressivement, dès que le premier événement se produit, j'envisage le second.

La relation que je suis habitué àvoir dans la réalité correspond à une relation entre deux idées dans mon esprit: la structure dans la réalité estrépétée au sein de l'esprit.

Ainsi, nous pouvons croire qu'il existe une causalité entre deux événements, mais il ne s'agit jamais que d'une association d'idées en notre esprit qui suit un principe de similitude (les deux idées de chaqueévénement se ressemblent) ou de contiguïté spatio-temporelle.

La croyance, retranchée du côté d'une attitudepurement psychologique, purement subjective, correspond pourtant à un type de raisonnement.

Voilà qui nous mèneà deux choses regrettables.

La première, c'est le danger qu'il y a à laisser reposer son esprit de tout son long surl'expérience, généralisant ainsi à outrance.

La deuxième, c'est que cette soi-disante écoute respectueuse du réel,cet apprentissage par l'expérience, repose en vérité sur une fâcheuse habitude d'esprit: l'habitude. III.

Heisenberg vs le vieillard Revenons à notre vieillard tranquillement assis sur son banc et qui, d'un geste de sa canne, nous parle d'expérience.Déjà, nous nous méfions: en lui se taire la bête fatiguée qui ne voit dans le monde qu'un incessant défilé du même.Nous savons que son cœur est déjà froid et qu'il se retranche inlassablement sur les rouages d'une tristemécanique: l'habitude.

Le monde est un disque rayé pour son oreille.

Mais maintenant, allons plus loin, soupçonnons-le! Et s'il tentait de nous contaminer son désir fatigué sur la vie? Et s'il tentait de travestir une soi-disante réalitéobjective qu'il connaît apparemment si bien en la recouvrant d'un dégoût pour ce qu'il ne goûtera plus jamais? Peut-être faut-il revoir l'image d'Épinal du sage toujours représenté sous les traits d'un vieil homme à barbe: et si le sageétait jeune! Faisons appel à un physicien allemand, et apercevons-nous dès maintenant que l'on ne trouve dans laréalité que ce que l'on y cherche préalablement.

Il s'agit de partir d'un principe scientifique présent dans la physiquequantique (partie de la physique qui s'occupe du réel à son échelle microscopique), appelé principe d'Heisenberg (du nom de son inventeur).

Ce dernier stipule qu'on ne peut connaître en même temps la position et la vitesse d'unemolécule.

En somme, il faut choisir entre l'un de ces deux paramètres, car l'un implique l'ignorance de l'autre, l'unimplique qu'on ne puisse connaître l'autre.

Ce qui signifie que nous choisissons ce que nous étudions, que nousopérons une sélection dans le réel. Ainsi, le réel n'est plus considérer comme un espace où résiderait la vérité: nous découpons le réel, pis, nous lecréons tout simplement autant que nous le percevons.

Il serait même possible de dire que la perception par le biais. »

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