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J . ONIMUS : L'inquiétude c'est la vie même de la conscience

Publié le 13/10/2011

Extrait du document

conscience

 

L'auteur s'adresse à un professeur de lettres, son lecteur :

Au risque de s'y briser ... vous apercevez l'objection? Vous entendez

les cris des gens prudents : à quoi bon montrer aux jeunes,

grondent-ils, ces images extrêmes et contradictoires de l'humanité où

dominent peut-être les fous et les déséquilibrés; à quoi bon les initier à

Lautréamont, à Kafka et leur faire lire les horreurs d'Henri Michaux ? Et

de proche en proche, Flaubert n'est-il pas immoral? Faites-vous un

choix dans Balzac? N'est-il pas risqué d'étudier Baudelaire? Rimbaud

vous paraît-il très sain ?

Oui, Madame, l'enseignement comporte des risques :d'un point de

vue comme le vôtre, toute culture serait dangereuse parce qu'elle

détruit la naïveté. Elle est aux antipodes de l'innocence, elle vieillit,

elle flétrit votre enfant; il se peut même qu'elle lui fasse mal. Toute

croissance est douloureuse. L'existence, à moins d'enfermer votre fils

dans le paradis de l'enfant Bouddha, se chargera aussi de le meurtrir.

Simplement la culture vieillit précocement et en profondeur : c'est

ainsi qu'elle prépare à la vie . C'est toute une aventure que de suivre

une classe de lettres et ce n'est pas aussi anodin que vous le croyez.

Le propre de cet enseignement, j'allais dire son honneur, c'est de

n'avoir pas peur de la réalité et de ne tolérer aucun interdit. On peut

tout aborder à condition de l'expliquer, de le faire parfaitement

comprendre. Et c'est pourquoi l'on considère comme un excellent

maître un homme comme votre ami J., ce doux sceptique, cet aimable

dilettante qui par son ironie sait si bien brusquer l'esprit de ses élèves,

les étonner et les faire réfléchir. Il faut croire à la vertu pédagogique

du scepticisme; il arrive même qu'il provoque par contraste des

ardeurs et des fidélités plus intenses; il purifie les fausses convictions

au feu de ses sarcasmes, il force pour ainsi dire les vocations à se faire

jour. Il faut croire aussi à la vertu des influences contradictoires.

Après Vigny, il est bon d'étudier Balzac; après Baudelaire, Hugo. La

distance qui les sépare ouvre des horizons. Il est bon d'avoir plusieurs

maîtres, différents d'esprits et de goûts. C'est le contraste, ici comme

partout, qui fait penser, c'est le jeu complexe des influences qui

libère : l'homme d'un seul livre est un esclave. Vous vous rappelez ce

mot de l'an dernier : je n'ai rien à leur enseigner, disait-il avec son

bon sourire, tout ce que je peux faire c'est de les inquiéter un peu .

Mais, ajoutait-il, ils sont tellement niais que c'est presque

impossible. « L'inquiétude c'est la vie même de la conscience. Toute

vie suppose effort, dépense de forces. Ce que cherchent les élèves

trop souvent, c'est une réponse de catéchisme ce qu'il faut penser

de ...  et dans leurs devoirs ce qu'ils disent c'est ce qu'ils croient que

l'on doit dire. Or le principe de l'enseignement littéraire est de leur

faire admettre qu'il n'y a pas de dogme tout fait et qu'à chacun sa

vérité. C'est à ce prix qu'on les arrache au troupeau et qu'on les rend

à eux-mêmes. Mais combien savent en profiter ?

J . ONIMUS.

 

Suivant votre préférence, résumez le texte en respectant le mouvement, ou faites-en une analyse qui, distinguant et ordonnant les thèmes, s'attache à rendre compte de leurs rapports. Puis après avoir choisi dans ce texte un problème qui vous semble important, vous en préciserez les données, le discuterez éventuellement, et exposerez, en les justifiant, vos propres vues sur la question.

conscience

« détruit la naïveté.

Elle est aux antipodes de l'innocence, elle vieillit, elle flétrit votre enfant; il se peut même qu'elle lui fasse mal.

Toute croissance est douloureuse.

L'existence, à moins d'enfermer votre fils dans le paradis de l'enfant Bouddha, se chargera aussi de le meurtrir.

Simplement la culture vieillit précocement et en profondeur : c'est ainsi qu'elle prépare à la vie.

C'est toute une aventure que de suivre une classe de lettres et ce n'est pas aussi anodin que vous le croyez .

Le propre de cet enseignement, j'allais dire son honneur, c'est de n'avoir pas peur de la réalité et de ne tolérer aucun interdit.

On peut tout aborder à condition de l'expliquer, de le faire parfaitement comprendre.

Et c'est pourquoi l'on considère comme un excellent maître un homme comme votre ami J., ce doux sceptique, cet aima­ ble dilettante qui par son ironie sait si bien brusquer l'esprit de ses élè­ ves, les étonner et les faire réfléchir.

Il faut croire à la vertu pédagogi­ que du scepticisme; il arrive même qu'il provoque par contraste des ardeurs et des fidélités plus intenses; il purifie les fausses convictions au feu de ses sarcasmes, il force pour ainsi dire les vocations à se faire jour .

Il faut croire aussi à la vertu des influences contradictoires .

Après Vigny, il est bon d'étudier Balzac; après Baudelaire , Hugo.

La distance qui les sépare ouvre des horizons.

Il est bon d'avoir plusieurs maîtres, différents d'esprits et de goûts.

C'est le contraste, ici comme partout, qui fait penser, c'est le jeu complexe des influences qui libère : l'homme d'un seul livre est un esclave.

Vous vous rappelez ce mot de J.

l'an dernier :. »

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